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Contexte

Sur les terrains d’intervention de Médecins Sans Frontières (MSF), de nombreuses personnes sont confrontées à des situations de détresse. Les populations contraintes à l'exil, exposées à la guerre ou à des violences permanentes, forcées de vivre dans des conditions de vie inhumaines, victimes d'abus sexuels et de mauvais traitements ou encore celles qui survivent à des catastrophes naturelles sont particulièrement exposées et souffrent souvent d'anxiété, de dépression et/ou du syndrome de stress post-traumatique. Un suivi psychosocial s’avère crucial pour les aider. Cet accompagnement peut se dérouler lors de séances collectives, ou en consultation individuelle si les souffrances psychiques sont trop importantes. Les personnes souffrant de maladies telles que le VIH/Sida, la tuberculose ou le cancer, nécessitent également un soutien psychologique de long cours tant pour les aider à faire face à la maladie, à observer des traitements souvent très contraignants et à affronter les problèmes d’exclusion et le stigma auquel elles sont exposées. 

Les personnes atteintes de maladies mentales et neurologiques requièrent une attention particulière : dans des contextes où les services de santé sont défaillants, elles sont négligées sur le plan de la prise en charge médicale et sont souvent stigmatisées, voire maltraitées.

Les activités de santé mentale menées par MSF couvrent ainsi un vaste champ, des premiers secours psychologiques au traitement des pathologies psychiatriques sévères. En 2020, les besoins en santé mentale des populations se sont aggravés avec la pandémie de Covid-19 et les mesures restrictives qu'elle a impliquées. Pour beaucoup, le sentiment de solitude et d'abandon s'est accru. Les équipes MSF sont par ailleurs intervenues en soutien au personnel soignant de maisons de retraite, là où le coronavirus a fait le plus de victimes. 

Il n'y a pas de santé sans santé mentale. Mais dans les zones de conflits et plus généralement les contextes précaires dans lesquels MSF intervient, les possibilités de prise en charge sont très limitées et les personnes souffrant de troubles mentaux plus ou moins sévères sont souvent livrées à elles-mêmes.

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Premiers secours psychologiques, soutien psychosocial et suivi des soins de santé mentale

La violence de certains événements – torture, détention, exaction, viol, mort, etc. – peut provoquer des bouleversements et de la souffrance psychologique chez les personnes qui en ont été témoins ou victimes. Sans que cela ne devienne forcément pathologique, il est cependant nécessaire d'y apporter une attention particulière. Ce que l'on appelle les premiers secours psychologiques consiste à répondre aux besoins immédiats d’une personne traumatisée : à écouter son histoire, la réconforter et la guider pour qu’elle parvienne à se reconnecter rapidement avec son entourage et à reprendre le cours d'une vie quotidienne plus sereine. Cette technique est avant tout préconisée pour prévenir l'apparition d’éventuels troubles psychologiques par la suite.

Ce type de soin est par exemple apporté aux personnes secourues en mer Méditerranée par les équipes MSF à bord du Sea-Watch 4. Celles-ci sont en effet traumatisées par les atrocités vues et vécues en Libye, le naufrage de leur embarcation une fois en mer. Dans les centres de détentions libyens, les équipes MSF proposent un espace d'écoute et de parole ainsi que des activités psychosociales pour permettre aux personnes détenues arbitrairement d'extérioriser la souffrance.

LIBYE - Témoignage de Kristin Pelzer

À la suite des explosions du port de Beyrouth, au Liban, les équipes ont effectué des visites à domicile et ont également assuré des premiers secours psychologiques et un soutien en santé mentale aux personnes vulnérables affectées par la catastrophe. Deux mois après l'événement, dans les quartiers les plus touchés, deux tiers des patients ayant bénéficié d’une consultation en santé mentale fournie par MSF présentaient encore des symptômes liés à l'anxiété et à la dépression. Pour répondre aux besoins de la population libanaise qui cumulent les crises, MSF a mis en place une offre de soins en santé mentale sur le long terme.

Entre 2016 et 2019, les équipes MSF ont assuré plus de 1,3 million de consultations individuelles de santé mentale et plus de 250 000 sessions de groupe.

L’intervention d’un psychologue et la mise en place d'un accompagnement psychosocial (groupes de parole ou de soutien) peuvent renforcer la capacité des patients à traverser un événement traumatique. Les équipes de santé mentale MSF offrent ainsi un certain nombre de services, dont des consultations individuelles, familiales et de groupe, au cours desquelles des psychologues se concentrent sur les mécanismes d'adaptation et le renforcement de la résilience chez les patients. Dans le cadre de son programme de santé mentale auprès des populations civiles palestiniennes à Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, où la violence de l’occupation israélienne est quotidienne et entraîne des effets psychologiques dévastateurs, MSF veille notamment à prévenir des risques de ruptures au sein des familles et des communautés

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Prise en charge des troubles mentaux et épileptiques

Dans les contextes de conflit, comme au Burkina Faso, la prévalence des troubles mentaux a tendance à augmenter :  environ 5 % des personnes concernées développent des troubles mentaux graves et 17 % des troubles légers ou modérés. Dans le nord et l'est du pays, le conflit en cours – attaques répétées, assassinats, enlèvements, pillages – a forcé plus d'un million de personnes à fuir la région, pour se réfugier dans des camps de fortune aux conditions de vie extrêmement précaires (manque d'accès à l'eau, à la nourriture, à des abris décents et aux soins de santé). Là encore, les équipes MSF sur place diagnostiquent de nombreux cas d'anxiété, de dépression, ou de stress post-traumatique au sein des populations, la plupart due à l'expérience traumatisante des violences subies. Lorsque les symptômes dépassent leurs capacités d’adaptation, des soins plus spécialisés peuvent être nécessaires. 

En Irak, pays ravagé par des années de guerre et l'occupation de certaines localités – dont la ville de Mossoul – par le groupe État islamique, les impacts psychologiques des traumatismes endurés (exécutions, esclavage sexuel, endoctrinement etc.) ont été particulièrement profonds au sein de la population civile, notamment chez les enfants et jeunes adolescents. L'offensive militaire lancée par la coalition internationale pour reprendre la ville de Mossoul fin 2016 s’est accompagnée de violences massives contre les civils  et les a forcés à fuir pour échapper aux bombardements et aux combats. Beaucoup ont trouvé refuge dans des camps, notamment au Kurdistan irakien davantage sûr, où les équipes MSF leur ont apporté un soutien psychologique et un suivi psychiatrique adapté pour soigner dans la plupart des cas des syndromes de stress post-traumatique.

Antonin Guinche, psychologue MSF de retour d'Irak

Au Liberia, qui a connu près de quinze années de guerre civile, l’offre de soins de santé mentale est quasiment inexistante. Des personnes atteintes de maladies mentales, comme la schizophrénie ou la psychose, ou de troubles neurologiques tels que l’épilepsie n’ont presque aucune possibilité d’être pris en charge. Depuis 2017, les équipes MSF interviennent à Monrovia, la capitale du Liberia, auprès de patients atteints d'épilepsie ou de troubles de santé mentale. Les activités menées par MSF comprennent la formation et la supervision des agents de santé locaux à ces maladies, l'administration de traitements et le suivi médical des patients, ainsi que des sessions de sensibilisation aux troubles mentaux. Le documentaire « Welcome back » nous plonge au cœur du quotidien des personnes prises en charge par les équipes MSF, de leurs interactions avec leur entourage et avec des groupes d’entraide et d’écoute.

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Accompagnement psychologique des patients souffrants de maladies chroniques

Les personnes atteintes de maladies chroniques graves, comme le VIH/Sida ou la tuberculose résistante, sont fragilisées par la découverte de leur maladie et par les bouleversements physiques et psychologiques auxquels elles sont confrontées. Certains traitements spécifiques de ces maladies s’accompagnent par ailleurs d’effets secondaires affectant la sphère psychique, en particulier avec la manifestation de signes dépressifs. Les équipes MSF soutiennent psychologiquement les patients atteints de maladies chroniques graves en soulageant leurs symptômes et en les aidant à accepter le parcours long, éprouvant et souvent décourageant que représente leur traitement. Dans les programmes MSF de prise en charge du cancer au Mali et au Malawi, l'accompagnement psychologique des patients est également un des éléments fondamentaux de la réponse à la maladie.

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Covid-19 : soutien psychologique au personnel soignant en première ligne

Dans leur réponse à la pandémie de coronavirus, les équipes MSF sont notamment intervenues dans les maisons de retraite et établissements médicaux-sociaux pour offrir au personnel soignant un soutien psychologique (en Belgique, en Espagne, en Suisse, aux États-Unis …).

En France, face à la détresse du personnel dans les établissements, MSF a lancé un appel d'urgence pour une mobilisation dans les EHPAD, notamment en Île-de-France, en Provence-Alpes-Côte d'Azur et en Occitanie, dans le but d'ouvrir des espaces d'écoute et de parole pour atténuer les souffrances psychologiques des soignants.