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Contexte

Le 11 mars 2020, l'OMS qualifie l’épidémie de Covid-19 de « pandémie ». Appartenant à la famille des coronavirus, le SARS-CoV-2 est un nouveau virus contagieux, qui se caractérise par des atteintes des voies respiratoires pouvant aller du simple rhume à des syndromes respiratoires aigus sévères.

Les moyens de transmission de la Covid-19 sont multiples : 

  • entre humains, par voie aérienne via des gouttelettes émises lors d’une toux, d’un éternuement, d’une conversation etc. 

  • par contact physique rapproché entre personnes (bise, poignée de mains…)

  • par l'intermédiaire de surfaces contaminées. 


La Covid-19 est une maladie bénigne pour la grande majorité des patients qui la contractent (estimée à 80 % des cas confirmés), mais on observe un taux plus élevé de complications graves pour les personnes vulnérables (personnes âgées et personnes avec des comorbidités) par rapport à d'autres virus comme la grippe. Le grand nombre de cas sévères de la maladie, qui nécessitent des soins de soutien et des soins intensifs importants, et parfois pendant plusieurs semaines, représente un énorme défi même pour les systèmes de santé, même les plus développés. La pandémie de coronavirus a des conséquences sociales et économiques graves, qui creusent davantage les inégalités, notamment au niveau de l'accès aux soins, voire de l'insécurité alimentaire pour les plus précaires. Les populations les plus précaires sont d'ailleurs davantage exposées au virus. La surmédiatisation du coronavirus occulte aussi les autres urgences sanitaires. La Covid-19 a eu des impacts considérables sur d'autres activités de santé à la fois à cause du ralentissement de la production et de la circulation des biens et des personnes (ralentissement de la vaccination de routine, interruption des traitements pour les patients atteints de maladies chroniques...), mais également à cause de la difficulté à protéger le personnel soignant et à garantir le respect des gestes barrière. Certaines maladies ont ainsi fait l'objet d'une réduction de leur financement, leurs fonds ayant été réorientés (sans réel échelonnage des priorités sanitaires selon la zone géographique) vers la lutte contre la Covid-19.

C'est pourquoi, la réponse de MSF s'est constituée autour de deux piliers principaux : faire face à la Covid-19 avec des opérations dédiées là où c'est nécessaire et maintenir l'accès aux services médicaux vitaux sur ses terrains d'intervention. Traiter les personnes atteintes de paludisme, soigner les blessures de guerre ou assister des grossesses compliquées, par exemple, a été rendu encore plus difficile avec la pandémie. Dans le même temps, un nombre élevé de nouvelles infections et des systèmes de santé surchargés ont conduit au déploiement d'équipes supplémentaires pour soutenir la réponse. 

Face à cette maladie qui s'avère particulièrement contagieuse et dont la létalité est importante dans certains groupes de populations, le développement de moyens thérapeutiques en cours – traitements et vaccins – laisse espérer une limitation des formes graves de la maladie et la réduction de la transmission du virus. 

 

En mars 2020, Clair Mills, la directrice du département médical de MSF, exposait les enjeux posés par la Covid-19 aux équipes MSF.

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Évolution de la pandémie

Pour suivre la propagation du virus, les chercheurs d'Epicentre - – Centre de recherche épidémiologique créé par MSF – ont mis en place une carte interactive montrant le nombre et la localisation des cas de Covid-19 à travers le monde.

Vous pouvez cliquer ici pour l'afficher en plus grand format dans une nouvelle fenêtre.

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Difficultés logistiques et contraintes d'approvisionnement 

Les personnes atteintes par une forme grave de la maladie nécessitent une hospitalisation sur le long terme, avec des soins très spécialisés. Cela peut représenter un véritable défi pour les systèmes de santé les plus avancés, et avoir des conséquences désastreuses dans les pays dont le système de santé est détruit ou défaillant. L'impact de la pandémie de Covid-19 s'est fait sentir dans chacun des quelque 450 projets de MSF dans plus de 70 pays. « Maîtriser la pandémie est clairement une priorité pour tout le monde, mais cela n'a jamais été une option pour nous d’abandonner nos services médicaux réguliers et de nous concentrer uniquement sur la Covid-19 », explique Kate White, point focal médical pour le groupe de travail Covid-19 de MSF. Face au risque que les systèmes de santé soient rapidement débordés par la prise en charge de patients atteints de la Covid-19, se sont ajoutées les restrictions en matière de voyages qui ont fortement limité la capacité du personnel international MSF à se déplacer dans ses différents pays d'interventions – les mesures de confinement adoptées ayant drastiquement réduit la mobilité des personnes. Dans ce contexte, la force de MSF a néanmoins été de pouvoir s’appuyer sur le personnel employé localement qui représente 90 % de son personnel dans les pays d’intervention. 

Cette pandémie a également causé, dès le mois de mars 2020, une pression mondiale sur la production de certaines ressources médicales, en particulier les équipements de protection individuelle des professionnels de santé, dont les masques. Au vu de la demande mondiale, les systèmes de santé ont dû faire face une véritable pénurie d'équipement de protection, mettant d'abord en danger le personnel soignant en première ligne, face au risque d'infection. Les activités médicales se sont poursuivies dans de nombreux projets MSF, mais les capacités d'approvisionnement de certains matériels essentiels, tels que les masques chirurgicaux, les compresses, les gants et les produits chimiques nécessaires au diagnostic du coronavirus, étaient loin d'être garanties. Sur le marché, la concurrence – sans précédent – de ces fournitures médicales a entraîné une forte augmentation des prix qui n'a pas permis une distribution équitable, selon les besoins.
 

MSF s'est également inquiétée d'un risque de pénurie de production de médicaments génériques et des difficultés d'importation de médicaments essentiels (par exemple les antibiotiques et les antirétroviraux) dues aux mesures de confinement, à la réduction de la production de produits de base, à l'arrêt des exportations, à la réaffectation ou au stockage de médicaments et de matériel pour faire face au coronavirus. MSF a par exemple dû mettre en suspens certaines de ses activités médicales. Dans ce contexte de pandémie, il a été primordial de préserver l'accès aux soins de santé, tant pour les patients atteints de Covid-19 que pour tout autre patient. Il a donc fallu veiller à ce que les hôpitaux ne soient pas débordés et que le personnel de santé puisse accueillir les patients nécessitant des soins intensifs, tout en continuant à fournir des traitements aux autres patients en ayant besoin. 

 

© Giulio Piscitelli

L’enfer libyen au temps du coronavirus

ou l’échec des politiques d’aide humanitaire destinées aux migrants

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Dans la plupart des pays où MSF intervient, les équipes se sont mobilisées, en coordination avec l'OMS et les ministères de la Santé nationaux, pour aider les hôpitaux à faire face à l'afflux de patients. Elles ont en priorité dispensé des formations sur le contrôle des infections dans les établissements de santé.

En termes techniques et logistiques, MSF a réhabilité, rénové, voire construit des centres de traitement pour pouvoir prendre en charge les cas confirmés de Covid-19. Dans  leurs centres de traitement de la Covid-19 à Hérat en Afghanistan, à Port-au-Prince en Haïti, à Aden au Yémen, à Bamako au Mali, etc., les équipes ont pu traiter les patients en les plaçant sous oxygène et se sont ainsi engagées dans le traitement des patients atteints des formes sévères de la maladie. L'un des principaux défis est de leur fournir d'importantes quantités d'oxygène, de façon constante. En effet, 80 % des patients hospitalisés à cause du coronavirus ont besoin de 3 à 15 litres d'oxygène par minute

 

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Soutien aux hôpitaux et centres de santé 

MSF est venue en aide aux hôpitaux, centres de santé et autres structures de soins gérées par les ministères de la Santé nationaux. Elle a apporté son soutien sur trois volets d'activités : 

  • la formation du personnel soignant sur les mesures de précaution à adopter face à la Covid-19 

  • le support technique et logistique quant au triage, au dépistage et à l'isolement des patients 

  • le traitement de la forme sévère du coronavirus en soins intensifs, en assurant les besoins en oxygène des malades

Les équipes MSF ont dispensé des sessions de formation sur les mesures de prévention et de contrôle des infections aux travailleurs de santé impliqués dans les projets MSF ou dépendants des autorités sanitaires nationales, pour limiter la propagation du virus. Ces formations ont principalement permis de renforcer les procédures de désinfection des lieux et du matériel, de sensibiliser sur les gestes barrières et les mesures d'hygiène – en particulier des mains – à suivre, de respecter des circuits stricts pour le lavage du linge et d'informer sur la bonne utilisation des équipements de protection individuelle. 

ACTIVITÉS DE PRÉVENTION :  SE PROTÉGER ET PROTÉGER LES AUTRES

Les équipes MSF ont mis en place des activités de promotion de la santé dans de nombreux  projets. L'objectif : sensibiliser sur les gestes barrières et les mesures de protection simples : tousser dans son coude, se tenir à distance des autres, éviter les lieux clos, porter un masque lorsque cela est nécessaire, se laver régulièrement les mains, etc. Au Mali, les équipes MSF, en partenariat avec le ministère de la Santé et des acteurs de la société civile locale, ont parcouru la ville de Bamako pour sensibiliser et donner aux gens les moyens de se protéger. MSF a notamment apporté son soutien à la production locale de masques. 
 

Dans d’autres contextes, les équipes MSF ont également participé à la réorganisation des circuits de soins dans les hôpitaux et centres de santé afin de réguler les flux de patients. Elles y ont mis en place des espaces de triage pour éviter que les personnes qui présentaient des symptômes similaires à ceux du coronavirus ne contaminent les autres. 
 
MSF a par exemple mis en place deux centres Covid-19 au Yémen, à Sanaa et Aden, les deux villes principales du pays, dont le système de santé est dévasté par des années de guerre.


 

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Aider les populations vulnérables 

Pour répondre à la pandémie, MSF a concentré ses efforts sur les populations les plus exposées aux formes graves de la Covid-19, comme : 
 

  • les personnes âgées

  • les personnes atteintes de maladies chroniques

Les équipes sont également venues en aide aux populations précaires, tels que : 

  • les sans-abri

  • les migrants

  • les communautés exclues des systèmes de soins

Les personnes âgées sont particulièrement touchées par la pandémie de coronavirus, les plus de 65 ans représentant la très grande majorité des décès liés à la maladie. MSF a collaboré avec des maisons de retraite et établissements médicaux-sociaux nationaux et locaux en Belgique, en France, en Italie, au Portugal, en Espagne, en Suisse, aux États-Unis... en aidant plus de 600 résidences pour personnes âgées. Les équipes ont formé le personnel de ces structures aux mesures de prévention et de contrôle des infections et ont accompagné les résidents pendant et après la période de confinement. Des soins psychologiques ont été apportés au personnel soignant de ces structures pour les aider à affronter la situation plus sereinement. Face à leur détresse, MSF a lancé un appel d'urgence pour une mobilisation dans les EHPAD, notamment en Île-de-France, en Provence-Alpes-Côte d'Azur et en Occitanie, dans le but d'accompagner les établissements fragilisées par la crise et d’y augmenter la prise en charge 

«L'intervention de MSF nous a permis aussi de nous délester de ce poids de culpabilité en prenant conscience qu'on avait bien fait les choses

mais qu'on n'y pouvait rien, quelque part. Et que la gestion d'une crise, c'est un métier. Ce n'est pas notre métier. Et ce n'est pas qu'on a mal fait les choses, mais à un moment donné, ça nous dépasse. »
Marie-Pierre Becheiron, directrice d’Ehpad dans lequel les équipes MSF sont intervenues.

En Île-de-France, MSF est aussi intervenue dans les structures mises en place par les autorités pour abriter les populations les plus vulnérables (migrants, demandeurs d'asile, personnes sans domicile fixe etc.) afin d’évaluer leur état de santé et d'identifier les cas potentiels de Covid-19. Les équipes ont déployé des cliniques mobiles dans Paris et sa banlieue pour dispenser des soins de santé primaires aux personnes vivant à la rue, afin que leur accès aux soins soit maintenu. En France et en Belgique, MSF a également fourni une assistance médicale dans des « centres Covid+ » mis en place pour isoler et héberger les plus précaires infectés par le coronavirus.

Une enquête de séroprévalence menée par MSF,  Épicentre et l’Institut Pasteur durant l’été 2020 sur quatorze lieux d’intervention de l’ONG en région parisienne a montré qu’une forte proportion de personnes y ont été infectées par le virus SARS-CoV-2 : la séroprévalence a pu atteindre 94%, indiquant l’ampleur des contaminations sur des sites de regroupement de populations précaires. 

 

À New-York, São Paulo, Matamoros (frontière États-Unis/Mexique), au Mali, en Suisse, MSF est intervenue pour améliorer les conditions d'hygiène des populations les plus socialement vulnérables, en installant des points d'eau, des "camions-douches", des stations de lavage des mains, ainsi qu'en distribuant du savon, du gel désinfectant, et d'autres matériels d'hygiène. Les équipes sont également venue en aide aux communautés exclues des systèmes de soins, comme les amérindiens de la Nation Navajo et des Pueblos aux États-Unis, les habitants des bidonvilles de Nairobi au Kenya, ou les réfugiés rohingyas des camps de Cox's Bazar au Bangladesh, en réalisant entre autres, en collaboration avec les chefs de santé communautaires, des activités de promotion de la santé.
 

Lutter contre le coronavirus au cœur de l'Amazonie

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Recherche épidémiologique, services ambulanciers et télémédecine

Pour mieux retracer la propagation du virus et comprendre son évolution, les équipes MSF travaillent à la recherche des cas contacts pour remonter les chaînes de transmission, notamment dans les pays africains comme au Tchad, au Sénégal, en Sierra Leone ou encore au Soudan du Sud. À l’hôpital de Djoungolo à Yaoundé, au Cameroun, Épicentre – la branche de recherche et d'épidémiologie de MSF –, a mené des activités de recherche sur l'efficacité des tests de dépistage, en partenariat avec le centre national des opérations d'urgence.

Sur certains de ses terrains d'intervention, notamment au Salvador et au Honduras, MSF a renforcé ses services d'ambulances dans les zones rendues difficiles d'accès par la violence qui y règne et les restrictions de mouvements dues au confinement, afin d'alléger la charge de travail du système d'urgence dédié au transport des patients Covid-19 dans ces pays.

Des services de télémédecine ont également été mis en place, en particulier en Côte d'Ivoire, où les équipes MSF ont ainsi assuré des télé-consultations aux patients du centre Covid-19 de Yopougon à Abidjan, pour diagnostiquer et détecter les cas de comorbidités tels que le diabète, l'hypertension, l'insuffisance respiratoire et les maladies cardiovasculaires avec pour objectif de réduire la mortalité parmi les patients les plus vulnérables. 

 

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Vaccins contre la Covid : pour la transparence et contre le nationalisme vaccinal 

Dès les premières semaines suivant la déclaration de la pandémie, les laboratoires pharmaceutiques et les États se sont lancés dans une course au vaccin contre la Covid-19. Fin décembre 2020, environ 230 candidats-vaccins étaient répertoriés, dont près de 60 en cours d’essai clinique chez l’humain. Ils utilisent différentes technologies et mécanismes d’immunisation, nécessitant dans certains cas des conditions de conservation particulièrement contraignantes (une chaîne du froid à -70° par exemple pour le vaccin développé par le laboratoire Pfizer/BioNtech). Certains de ces vaccins ont reçu une autorisation d’utilisation par des autorités de réglementation nationales ou internationales, sur la base des premières informations disponibles sur leur efficacité et leur immunité.

Les conditions d’accès à ces vaccins pour les pays en développement demeurent toutefois incertaines : en juin 2020 l’OMS, la GAVI (Alliance du vaccin) et d’autres partenaires ont lancé le COVAX, un mécanisme de financement et de négociation globale des vaccins censé permettre un accès et une distribution équitable des vaccins. En réalité, malgré les engagements des pays riches à soutenir ce mécanisme, beaucoup d’entre eux ont négocié de façon bilatérale des accords d’achat avec les fabricants, souvent sans que les termes de ces accords ne soient rendus publics, et en préemptant ainsi les capacités de production, parfois au-delà de leurs réels besoins. MSF a appelé les laboratoires et les États à davantage de transparence sur les coûts de fabrication et les contrats d’achat de ces vaccins ; à garantir qu’ils soient disponibles à un prix abordable ; et à assurer un accès à tous les pays qui en ont besoin pour protéger les personnes les plus à risque (dont le personnel de santé). MSF soutient par ailleurs la démarche initiée par l’Afrique du Sud et l’Inde auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), et déjà soutenue par une centaine de pays, appelant au renoncement des droits de propriété intellectuelle pour les médicaments, vaccins, outils de diagnostic et autres équipements (comme le matériel de protection et les respirateurs) permettant de lutter contre la pandémie de Covid-19.