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Contexte

Les cancers désignent de manière générale une catégorie de maladies chroniques pouvant affecter n'importe quelle partie du corps. Les cancers se caractérisent par la formation de cellules anormales se développant au-delà de leurs limites habituelles, envahissant en conséquence des parties adjacentes du corps et se propageant vers d'autres organes : c'est le processus de métastase, la cause majeure des décès liés au cancer. 

Le nombre de cas de cancers diagnostiqués est en hausse chaque année et la maladie est une des  principales causes de mortalité dans le monde. Selon le Centre international de recherche contre le cancer (CIRC), une agence spécialisée de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 19,3 millions de nouveaux cas de cancers ont été diagnostiqués dans le monde en 2020 et la maladie a provoqué le décès de 10 millions de personnes. Selon les projections du CIRC, 28,4 millions de nouveaux cas de cancer devraient survenir en 2040, soit une augmentation de 47% par rapport à 2020. On estime qu'environ 70% des décès liés au cancer surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire (OMS).

À l'échelle mondiale, le cancer du sein est désormais le plus fréquent. Si les taux d'incidence du cancer du sein sont en hausse dans le monde entier, les taux de mortalité qu'il induit sont particulièrement élevés dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, notamment en Afrique subsaharienne, où les inégalités d’accès au dépistage et au traitement du cancer sont criantes : manque de personnel qualifié, infrastructures spécialisées insuffisantes, aucun circuit de soins mis en place. Ainsi, plus de 80% des femmes arrivent à un stade très avancé de la maladie, ce qui rend presque impossible une prise en charge curative

Les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) sont mobilisées depuis plusieurs années dans la prévention des cancers, notamment celui du col de l'utérus, en menant par exemple des activités de vaccination contre les infections à papillomavirus humains (HPV). Plus récemment, au Mali et au Malawi, MSF a mis en place des programmes de dépistage et de prise en charge du cancer, en fournissant des soins curatifs – avec des traitements à base de radiothérapie et de chimiothérapie – et des soins palliatifs, selon une approche médicale centrée sur le patient. Les maladies non transmissibles, comme le cancer, pourraient devenir l’une des toutes premières causes de mortalité en Afrique dans les prochaines décennies, alors que le continent lutte toujours contre les ravages des maladies infectieuses telles que le paludisme ou le VIH/Sida

 

Source : CICR - OMS, 2020


 
Source : CICR - OMS, 2020  

En Afrique, la prise en charge du cancer devient un problème de santé publique majeur. Une grande partie du continent est effectivement en transition épidémiologique, ce qui signifie que le nombre de décès liés aux maladies cardiovasculaires et aux cancers est en augmentation face aux maladies infectieuses (VIH, paludisme, tuberculose). 

Le cancer est une des maladies chroniques les plus difficiles à prendre en charge. Son diagnostic et son traitement sont très complexes et nécessitent une coordination des soins entre plusieurs spécialités et disciplines médicales. 

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Prévenir les risques de cancer à temps

Sur le continent africain, les diagnostics des cas de cancer sont trop tardifs et ne permettent la plupart du temps pas aux personnes souffrant de la maladie d'en guérir. Les difficultés à détecter les tumeurs de manière précoce s'expliquent notamment par le manque d'information et de sensibilisation à la maladie au sein des communautés, l'absence de circuit de soins appropriés pour sa prise en charge, ainsi que par le peu de personnel qualifié et d’infrastructures dans certaines régions. Au Mali par exemple, l'offre de soins dédiée au cancer n'est disponible que dans la capitale, Bamako, où MSF mène un projet d'oncologie. 

Les équipes sur place constatent que dans 80 à 90 % des cas de cancers du sein et du col de l'utérus, les femmes se présentent à l'hôpital à des stades avancés de la maladie – cancers de stade 3 ou 4 –, pour lesquels les chances de guérison sont très limitées. Or une sensibilisation et une prévention précoce, notamment grâce à la vaccination contre le papillomavirus humain dans le cas du cancer du col de l'utérus, réduirait largement le risque que des lésions précancéreuses et cancéreuses ne se développent. 

La vaccination doit débuter avant l'exposition au HPV, c'est-à-dire avant les premières relations sexuelles. Elle est donc destinée aux filles et adolescentes entre neuf et quatorze ans. Dans de nombreux pays africain, l'accès au vaccin contre le papillomavirus humain est encore très restreint, notamment en raison d'un approvisionnement considérablement insuffisant. Pour beaucoup, le vaccin est également inaccessible à cause de son coût trop élevé. Seuls 21 % des pays à faible revenu recourent au vaccin contre le HPV, contre 79 % des pays à revenu élevé. Par ailleurs, le risque de développer un cancer du col de l'utérus est six à huit fois plus élevé chez une femme séropositive

Dans les pays où la prévalence du VIH est très élevée, comme au Mozambique ou au Malawi, les équipes MSF sont particulièrement attentives au dépistage des lésions précancéreuses et cancéreuses chez les femmes atteintes du VIH/Sida. Le personnel détecte leur présence par inspection visuelle à l'acide acétique (IVA), à l'œil nu ou à l'aide d'une caméra ou d'un smartphone (cervicographie). Pour prévenir du cancer du col de l'utérus, ces lésions doivent  être immédiatement éliminées, soit par le froid grâce à la technique de la cryothérapie, soit par le chaud grâce à celle de la thermocoagulation, soit par la réalisation de petites chirurgies si nécessaire. 

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L'accès insuffisant à une prise en charge thérapeutique adaptée

Dans les pays à faible revenu, notamment en Afrique subsaharienne, le diagnostic d'un cancer chez un patient est souvent  synonyme de catastrophe économique pour lui et sa famille. Les personnes atteintes de tumeurs sont obligées de quitter leur emploi pour pouvoir suivre les traitements nécessaires et se retrouvent ainsi avec des ressources financières très limitées alors que les frais liés aux soins (imageries, biopsies, consultations, bilans d'extension entre chaque cure de chimiothérapie, médicaments anti-douleurs etc.) représentent un coût extrêmement élevé : un scanner peut coûter 150 euros au Mali par exemple. La plupart du temps, les familles des malades se cotisent pour payer le traitement, mais elles ne parviennent généralement à en régler qu'une petite partie. L'interruption d'un traitement faute de moyens est fréquente, les  patients pouvant laisser passer plusieurs mois avant de retourner vers les soins. Pendant ce temps-là, l'extension de la tumeur empire. 

Il existe trois principales armes thérapeutiques pour traiter le cancer :

  • la chirurgie

  • la radiothérapie 

  • la chimiothérapie

Elles sont généralement complémentaires  : selon le type de cancer et le stade de la maladie, une, deux, voire les trois techniques vont être utilisées, de manière combinées, pour adapter les soins aux besoins du patient. Le recours à la chirurgie est un traitement consistant à retirer en partie ou en intégralité la tumeur de l'organe malade. La radiothérapie permet, par une exposition à des rayons, l'élimination des cellules cancéreuses. La chimiothérapie repose quant à elle sur des cures de médicaments visant à supprimer les cellules tumorales, soit en les détruisant directement, soit en les empêchant de se multiplier. La chimiothérapie est un traitement lourd, entraînant d'éventuels nombreux effets secondaires (perte de cheveux, troubles digestifs, nausées, atteintes des globules blancs, douleurs, etc.) Il y a donc une véritable nécessité d'assurer un suivi régulier des soins aux patients. 
 

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Soins palliatifs : soulager la douleur et accompagner le patient vers la fin de vie

Pour les patients atteints d'un cancer de stade 3 ou 4, il existe peu, voire pas  d'option thérapeutique. L'urgence médicale de la prise en charge de la douleur a été un élément clé dans la mise en place des deux programmes d'oncologie de MSF, au Mali et au Malawi. Les soins palliatifs visent ainsi à améliorer le confort des patients, de soulager leurs douleurs ainsi que d'appréhender la fin de vie dignement. Les équipes MSF fournissent des soins palliatifs à l'hôpital, mais également directement à domicile afin d'épargner aux patients, déjà affaiblis par leur cancer, des déplacements. Cela permet également d'apporter un soutien psychosocial aux patients et à leurs familles. 

Les conséquences psychologiques et sociales du cancer peuvent en effet être  dramatiques pour certains patients. Les cancers du sein et du col de l'utérus sont souvent stigmatisant en raison d'une croyance partagée selon laquelle la maladie serait infectieuse : beaucoup de patientes n'ont alors plus aucun rapport sexuel. Parfois, certaines patientes peuvent se retrouver seules, abandonnées par leur propre famille. La prolifération des tumeurs jusqu'à la peau et la création de plaies tumorales malodorantes peuvent avoir un effet dévastateur pour les patients qui se retrouvent alors dans une situation d'exclusion sociale et de désarroi psychologique.