Les politiques gouvernementales européennes condamnent les migrants à l’horreur de la détention en Libye ou à la noyade

Secours en mer juin 2017
Embarcations de naufragés secourues par MSF, sur le Prudence, le 9 juin 2017 au large de la Libye.  © Andrew McConnell/Panos Pictures

Les gouvernements européens réunis à Bruxelles doivent revenir à la raison et trouver une politique alternative à celle qui consiste à piéger des personnes vulnérables en Libye ou à les laisser mourir en mer. 

Les 19 et 20 juin, au moins 220 personnes se sont noyées, faisant de la semaine dernière la plus meurtrière de l’année en Méditerranée.

Ces tragédies peuvent et doivent être évitées. Mais les gouvernements européens ont bloqué les opérations de recherche et de sauvetage des ONG, en transférant la responsabilité des sauvetages aux garde-côtes libyens.

Les gouvernements européens financent, entraînent et équipent les garde-côtes libyens pour intercepter les bateaux en détresse et les ramener en Libye, où ils sont détenus dans des conditions inhumaines. Dans un développement sans précédent, quelque 2 000 personnes ont été renvoyées en Libye au cours du week-end dernier. À leur arrivée, elles ont été placées en détention, sans procédure légale.

Les mêmes gouvernements européens qui, il y a quelques mois à peine, condamnaient les marchés d'esclaves en Libye, sont en passe de renforcer des politiques et des pratiques qui exposent des êtres humains aux pires des souffrances. Des personnes dont le seul crime est de fuir les conflits, la violence ou la pauvreté.

« Nous attendons des gouvernements européens qu’ils fassent preuve de décence et d’humanité, déclare Thierry Allafort, directeur général de MSF France. Comment l’Europe peut-elle défendre le renforcement de sa coopération avec les garde-côtes libyens, dont la porosité avec les réseaux criminels est documentée, tout en criminalisant les ONG, comme le font les gouvernements italiens et français ? L’Union européenne doit associer les ONG à l’effort de secours en mer au lieu de les écarter comme on se débarrasserait de témoins gênants. Elle doit faciliter  les débarquements rapides dans des ports sûrs, c’est-à-dire hors de Libye, où les migrants sont soumis à des niveaux de violence extrême notamment dans des lieux de détention clandestins. »

Dans les centres de détention officiels libyens, où l’accès des organisations humanitaires et internationales est très restreint, les migrants sont maintenus dans un état de grande vulnérabilité. Le mois dernier MSF a cependant été en mesure d’accéder à quatre centres de détention et a mené plus de 3 000 consultations médicales. Ses équipes ont pu constater les effets délétères de l’extrême promiscuité, des conditions d’hygiène déplorables et du manque d’accès à l’eau sur la santé des personnes détenues.

Alors que  les besoins en termes de recherche et de sauvetage sont criants, une véritable campagne destinée à paralyser les actions des ONG s’intensifie. Les missions indépendantes de recherche et de sauvetage sont graduellement bloquées dans les eaux internationales et se voient refuser l'accès aux ports locaux. Ce week-end, l'Aquarius était l'un des trois seuls navires de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale.

« Faire des ONG des boucs émissaires est un moyen de détourner l'attention des vrais problèmes : le manque de solidarité dans l'UE, le non-respect des engagements de relocalisation des migrants, et un système d'asile en miettes, dit Karline Kleijer, responsable des urgences de MSF. Ces entraves empêchent les ONG d’apporter l’assistance et la protection minimale à des personnes en détresse, ce qui devrait incomber aux gouvernements européens. Ce sont eux qui ont maintenant le pouvoir de vie et de mort sur ces personnes. »

 

Notes

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