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Niger, Nigeria, Cameroun : l'épidémiologie au service de la lutte contre le choléra

Alphonse Elogo, expert MSF en eau et assainissement, observe un point d'eau potentiellement contaminée dans un quartier du district de santé de Pitoa. 2019. Cameroun. 
Alphonse Elogo, expert MSF en eau et assainissement, observe un point d'eau potentiellement contaminée dans un quartier du district de santé de Pitoa, dans la région du Nord. 2019. Cameroun.  © MSF/Juliette Muller

De nombreux cas de choléra ont été signalés depuis plusieurs mois au Cameroun, alors que la maladie avait déjà touché plus de 45 000 personnes dans les pays voisins du Lac Tchad (Cameroun, Niger, Nigeria) en 2018. Les équipes de Médecins Sans Frontières interviennent pour apporter une aide aux populations et aux autorités sanitaires. Elles peuvent compter sur le soutien d’une équipe régionale d’épidémiologistes, basée à Dakar, pour les épauler dans leur travail de terrain et contrer les épidémies de choléra.

Franck Ale, membre de cette équipe, explique les enjeux de cette veille épidémiologique.

Quel est le rôle de l’épidémiologie face à ce type d’épidémie ?

L’investigation épidémiologique permet d’identifier les causes d’une épidémie et d‘orienter la réponse de terrain.

Deux outils importants sont utilisés. La surveillance permet d’identifier rapidement les premiers cas et de suivre l’évolution du nombre de cas par zone géographique. L’investigation, à savoir enquêter sur la façon dont chaque patient a contracté la maladie, permet d’identifier les personnes et lieux les plus à risques (sources d’eau contaminées, etc.). Cela permet d’organiser une réponse ciblée : il peut s’agir d’une campagne de vaccination, mais aussi de mesures de sensibilisation ou d’assainissement de l’eau.

Alphonse Elogo, expert MSF eau et assainissement contrôle un puits dans un quartier du district de santé de Pitoa. 2019. Cameroun. 
 © MSF/Juliette Muller
Alphonse Elogo, expert MSF eau et assainissement contrôle un puits dans un quartier du district de santé de Pitoa. 2019. Cameroun.  © MSF/Juliette Muller

Une partie de ce travail est réalisée par des épidémiologistes sur le terrain, en collaboration avec les autorités sanitaires. Notre équipe basée à Dakar vient en complément, en apportant une perspective régionale et en suivant l’évolution des épidémies au-delà des frontières et dans les régions où MSF n’intervient pas. Nous nous basons pour cela sur les données rendues disponibles par les États ou par d’autres acteurs présents sur le terrain.

Interventions de MSF en réponse aux épidémies de choléra dans le bassin du lac Tchad en 2018. 
Interventions de MSF en réponse aux épidémies de choléra dans le bassin du lac Tchad en 2018. 

Ainsi, l’an dernier, en surveillant ce qui se passait au Nigeria, nous avons pu avertir les équipes MSF présentes au Cameroun de l’arrivée des premiers cas dans le nord du pays. MSF n’avait pas d’équipes régulières dans cette région et cela nous a permis d’être prêts à répondre rapidement. À partir de Dakar, nous pouvons également échanger des informations sur le choléra avec les acteurs de la Plateforme choléra régionale pour l’Afrique de l’Ouest et centrale et ainsi contribuer à une réponse globale plus rapide.

Quelle est la situation épidémiologique du choléra dans la région aujourd’hui ?

On observe des cas au Cameroun depuis le début du mois de mars 2019. Ceux-ci surviennent très probablement d’un résidu de la dernière épidémie qui s’est propagée dans le pays et la région environnante en 2018. MSF avait alors soutenu les autorités sanitaires pour la prise en charge de près de 30 000 patients et pour la vaccination de plus de 550 000 personnes au Cameroun, au Niger et au Nigeria. Mais la fin de l’épidémie n’avait pas été officiellement déclarée.

Intervention au Cameroun

Depuis le mois de mai 2019, le nombre de cas de choléra est en augmentation dans le nord du Cameroun, zone officiellement déclarée en épidémie. Les équipes MSF soutiennent les autorités sanitaires notamment dans la ville de Garoua et ses environs, ainsi que dans le district de santé de Kaélé, avec des prises en charge médicales et de la prévention pour les populations affectées par le choléra ainsi que des aménagements et des formations pour certaines structures de santé et leurs personnels. Elles ont notamment participé à un travail d’investigation pour identifier les sources d’eau contaminées, un travail d’épidémiologie essentiel pour lutter efficacement contre les épidémies de choléra.

© MSF/Juliette Muller

Avec le début de la saison des pluies en mai, on a constaté une forte augmentation des cas, avec un taux de mortalité élevé. Des mesures ont été prises par le ministère de la Santé et les équipes MSF sur le terrain sont également en alerte. La vigilance est ainsi accrue dans toute la région, notamment dans l’État de Borno, dans le nord-est du Nigeria et au Tchad, dans les districts proches du nord du Cameroun.

Que sait-on des épidémies de choléra qui ont touché la région l’an dernier ?

Dans des pays comme le Niger, le Nigeria ou le Cameroun, le choléra est une maladie endémique qui réapparaît régulièrement avec les saisons des pluies. Des épidémies sont ainsi régulièrement signalées depuis plus de 40 ans dans la région du lac Tchad et des investissements ont été faits pour participer à la lutte contre le choléra. Mais les conflits qui affectent cette région rendent les interventions compliquées.

Des enfants jouent dans la ville de Pulka, située dans l'État de Borno, à proximité de la frontière camerounaise. Nigeria. 2017.
 © Igor Barbero/MSF
Des enfants jouent dans la ville de Pulka, située dans l'État de Borno, à proximité de la frontière camerounaise. Nigeria. 2017. © Igor Barbero/MSF

Si MSF dispose aujourd’hui des moyens nécessaires pour contrer une épidémie dans une zone stable, c’est en revanche plus difficile dans des zones soumises à des conflits, dans lesquelles le système sanitaire et l’accès à l’eau potable sont défaillants, où les populations sont soumises à des déplacements et certaines zones sont inaccessibles. Il faut alors trouver les moyens d’identifier rapidement les foyers épidémiques et d'en négocier l’accès malgré les conditions de sécurité, pour pouvoir apporter une réponse rapide.

L’année dernière, le Niger, le Nigeria et le Cameroun ont ainsi rapporté de nombreux cas de choléra. Les premiers ont été observés dans le nord-est du Nigeria, en lien avec les conflits et les déplacements de population dans cette zone. Mais des cas suspects ont été recensés jusqu’à Yaoundé, la capitale du Cameroun, située à des centaines de kilomètres.

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