Libye : les équipes de MSF se tiennent prêtes à reprendre leurs activités médicales, plus de deux mois après leur suspension forcée

Une Responsable des activités de protection MSF échange avec un patient dans l'un des centres où MSF intervenait à Zuwara. Libye, décembre 2024
Une Responsable des activités de protection échange avec un patient, dans l'un des centres où MSF intervenait à Zuwara, en décembre 2024, Libye © MSF

Deux mois et demi après la suspension forcée de ses activités par les autorités libyennes, à la suite d’une vague de répression qui a touché dix organisations humanitaires présentes dans l’ouest du pays, Médecins Sans Frontières (MSF) réaffirme sa volonté de reprendre ses services médicaux et son soutien aux autorités libyennes. MSF reste très préoccupée par la santé de ses anciens patients qui dépendaient de ses services pour leurs traitements. 

Le 27 mars 2025, MSF a dû suspendre l’aide médicale qu’elle apportait dans le pays, après la fermeture de ses locaux par l’Agence de sécurité intérieure (ISA) de Libye et l’interrogatoire de plusieurs membres de son équipe. Tout le personnel de MSF a été libéré, mais après la répression, MSF a dû évacuer ses employés étrangers de Libye et mettre fin aux contrats de son personnel libyen. Depuis la mi-mars, l’ISA avait commencé à convoquer et interroger le personnel des organisations internationales non gouvernementales (OING) qui s’occupent des migrants et des réfugiés en Libye. 

« Les équipes de MSF sont prêtes à reprendre les projets médicaux en cours pour la prise de charge de la tuberculose, la santé mentale et la santé maternelle, pour tout patient ayant besoin de soins, et en collaboration avec les autorités libyennes compétentes », déclare Steven Purbrick, le chef de mission pour la Libye. « MSF demande la levée de cette suspension, à condition que la sécurité de notre personnel et de nos patients soit garantie ». 

MSF n’a reçu aucune notification formelle justifiant la suspension de ses activités de la part de l’ISA et déplore les menaces et la pression dont l’organisation a fait l’objet, compromettant ainsi l’accès aux soins médicaux. Parmi les patients, les migrants et les réfugiés sont victimes d’abus et de violences avec de graves conséquences sur leur santé et des besoins médicaux aigus. Le mécanisme de référencement de MSF vers l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) ou l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) pour l’évacuation des migrants et des réfugiés identifiés comme des cas médicaux prioritaires a été interrompu. 

Avant la suspension des activités, MSF traitait une cohorte de plus de 300 patients libyens, migrants et réfugiés, principalement pour des soins contre la tuberculose, des soins prénataux et un soutien psychologique, en particulier pour les survivants de violences. Certains patients étaient dans une situation critique. MSF a réussi à référer la plupart d’entre eux à d’autres structures, comme le Centre National de Contrôle des Maladies, mais a également perdu le contact avec plusieurs d’entre eux.

« Deux de nos patients atteints de tuberculose sont décédés à Misrata immédiatement après notre suspension. Nous avons appris que quatre autres patients hospitalisés sont décédés depuis, dans le même établissement », explique Carla Peruzzo, coordinatrice médicale de MSF en Libye. « Nous sommes très inquiets pour les patients atteints de maladies chroniques, comme les diabétiques qui ont besoin d’insuline et les personnes souffrant de maladies rénales chroniques qui ont besoin de dialyse »

MSF soutenait le seul centre public pour les patients atteints de tuberculose en Libye. L’unité de traitement de la tuberculose a été mise en place par MSF au sein de l’hôpital thoracique de Misrata en 2020. Les médicaments destinés à être donnés aux hôpitaux publics étaient stockés dans les locaux de MSF, mais devront être détruits, en raison de la perte du contrôle de la température. 

« Les besoins médicaux couverts par MSF ne le sont pas toujours par le système de santé publique libyen, qui fait face à des défis structurels, tels que le manque de personnel et les pénuries de médicaments », explique Carla Peruzzo. « Une interruption du traitement de la tuberculose peut entraîner le développement d’une forme résistante de la maladie, une détérioration rapide de l’état de santé du patient, voire son décès »

Au fil des années, MSF a développé avec succès une collaboration technique avec le Programme National de lutte contre la Tuberculose afin de renforcer les capacités de détection des cas dans les établissements spécialisés, de réviser les directives nationales du laboratoire central de Tripoli et de soutenir le département d’éducation sanitaire. Les équipes de MSF sont prêtes à poursuivre leur soutien au programme national de lutte contre la tuberculose, ainsi qu’à poursuivre leurs activités médicales. 

Notes

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