Au Burundi, MSF lance une approche innovante de « triple protection » des enfants contre le paludisme

Au Burundi, le paludisme est depuis des années la première cause d’hospitalisation et de mortalité chez les enfants de moins de cinq ans. Pour réduire les risques et les conséquences de la maladie, Médecins Sans Frontières (MSF) a lancé une approche innovante de « triple protection » dans l’une des régions les plus touchées du pays.
Dans ce pays d'environ 14 millions d’habitants, plusieurs millions de cas sont rapportés chaque année. D’après l’OMS, plus de 1 800 décès liés à la maladie ont été enregistrés en 20231 , principalement chez les enfants de moins de 5 ans. Plusieurs facteurs — géographiques, climatiques, écologiques, sanitaires et socio-économiques — contribuent au caractère endémique et à l’ampleur de la maladie. Pour y remédier, les autorités sanitaires et leurs partenaires déploient depuis plusieurs années diverses stratégies : distribution de moustiquaires, traitements préventifs, pulvérisations intra-domiciliaires et, depuis la fin de l’année 2024, introduction de la vaccination antipaludique.
C’est dans ce cadre que MSF et le Ministère de la santé ont initié une approche unique dans le pays : combiner trois approches préventives simultanément, dans le district de Cibitoke.

« Ce district figure parmi ceux enregistrant le plus grand nombre de cas et de décès liés au paludisme, et nos équipes y ont déjà intervenu dans le passé pour faire face à des flambées », explique Zakari Moluh, coordinateur du projet MSF à Cibitoke. « Pour apporter une réponse plus durable, nous avons lancé une approche pilote de « triple protection » pour protéger les enfants : une vaccination antipaludique, un traitement préventif par chimioprophylaxie pérenne [consiste à administrer des médicaments antipaludiques aux enfants durant les premières années de leurs vie], ainsi que la fourniture de moustiquaires aux familles ».
Chimioprophylaxie pérenne
Ce sont des comprimés de sulfadoxine-pyriméthamine, ils s'écrasent en poudre et se mélangent avec de l'eau pour être donnés aux enfants.

À l’échelle nationale, Cibitoke est le seul district de santé à bénéficier de cette stratégie de « triple protection ». « La vaccination, le traitement préventif et la protection physique par les moustiquaires, se renforcent mutuellement pour assurer une durée d’efficacité optimale », explique Zakari Moluh. L’objectif est de réduire drastiquement la mortalité chez les enfants de moins de cinq ans, la tranche d’âge la plus vulnérable au paludisme, grâce à l’effet cumulé de ces trois approches. Près de 17 900 enfants sont pris en charge par ce programme.
Concrètement, les équipes de MSF appuient 20 centres de santé du district sanitaire de Cibitoke dans la mise en œuvre de cette approche. Dans ces centres, chaque enfant entre 6 et 18 mois bénéficie de quatre doses de vaccin antipaludique RTS,S. Lors de la première dose, une moustiquaire est remise à la famille. Entre 9 et 24 mois, ces enfants reçoivent une protection supplémentaire via des comprimés antipaludiques (sulfadoxine/pyriméthamine), une approche préventive appelée « chimioprophylaxie pérenne ».
Centre médical de Kaburantwa
Il fait partie des 20 structures appuyées par MSF dans le cadre de ce programme de lutte contre le paludisme au Burundi.

« Quand il était petit, un de mes fils a souvent souffert du paludisme. Il avait dû être hospitalisé et avait reçu une transfusion sanguine », témoigne Claudine Tuyishimire, en sortant du centre après avoir fait vacciner son bébé âgé de 9 mois. « Quand on m’a expliqué la protection offerte aujourd’hui, je n’ai pas hésité. Je suis tout de suite venue ». L’ampleur du problème, ainsi que les frais que la maladie coûtent aux foyers, créent un grand soulagement au sein des communautés. « Les frais médicaux liés à la prise en charge du paludisme, surtout dans ses formes graves, constituent un poids énorme pour les familles et le système de santé burundais, alors que la stratégie de triple protection nécessite un investissement nettement moindre », explique Adélaïde Ouabo, coordinatrice pays de MSF au Burundi. En effet, la vaccination antipaludique et les distributions de moustiquaires sont déjà intégrées dans le système sanitaire du Burundi, et les molécules de traitement préventif sont bon marché. L’approche est donc facilement absorbable par le système de santé, et réplicable ailleurs dans le pays.
L’implémentation de ce système est à la fois simple et peu coûteuse au regard des bénéfices qui en découlent.
Quels résultats ?
Les équipes de MSF ont constaté une diminution significative des admissions pour paludisme depuis le troisième trimestre de 2025, comparé à la même période l’année précédente.
Si l’amélioration de la prévention est au cœur de ce projet, l’urgence de soigner les enfants atteints par le paludisme reste là. Les équipes de MSF continuent donc d’appuyer les autorités sanitaires dans la prise en charge médicale.
De plus, dans les villages, des agents de santé communautaires ont été formés par MSF pour détecter rapidement les signes de paludisme, réaliser des tests de diagnostic rapide et administrer un traitement en cas de résultat positif.
Lorsque des cas plus graves sont identifiés, ils sont immédiatement référés vers un des centres de santé appuyés par MSF. En cas d’urgence, les patients sont transférés en ambulance vers l’hôpital de district de Cibitoke, où les équipes de MSF soutiennent la prise en charge des cas les plus complexes en pédiatrie et aux soins intensifs.