Nord-Mali : maintenir nos activités malgré l’insécurité à Tombouctou

Hôpital de Tombouctou février 2013
Hôpital de Tombouctou, février 2013 © Trevor Snapp

Au Nord-Mali, du fait des affrontements entre forces maliennes et groupes armés d’opposition, dont des éléments djihadistes, l’année 2014 aura été marquée par une forte dégradation de la situation sécuritaire. Si leurs cibles principales restent militaires (MINUSMA, Barkhane et armée malienne),  depuis le dernier trimestre 2014, une multiplication du nombre d’incidents de sécurité touchant les ONG et autres organisations Internationales présentes dans le nord est à déplorer.  

La faible densité de population (0,56 habitants/km² sur la région de Tombouctou) et l’éloignement des structures de santé qui en découle, cumulés à l’insécurité, entravent l’accès aux soins des populations. Or le paludisme (2 millions de cas recensés en 2013) et la malnutrition sont des problèmes de santé publique majeurs dans le pays. Au Nord-Mali, la prise en charge des urgences obstétricales et le système de transfert des patients dans un état sévère/grave vers les hôpitaux sont défaillants. Les services de santé peinent à assurer une continuité et une qualité des soins - par ailleurs payants - et les ressources humaines et matérielles sont inégalement réparties sur la région, voire totalement manquantes sur certaines zones.

Dès 2012, alors que groupes armés islamistes et rebelles Touaregs occupaient les trois principales régions du Nord, MSF a initié une intervention dans la région de Tombouctou. La mise en place d’équipes médicales mobiles et le soutien au personnel de santé encore présent dans les centres de santé ont permis de restaurer un accès aux soins primaires pour la population (environ 133 000 personnes) – dont le dépistage de la malnutrition aiguë sévère et la vaccination. De 2012 à fin 2014, nos équipes ont ainsi dispensé près de 200 000 consultations, dont plus du quart (27%) concernaient des cas de paludisme ; vacciné plus de 6 200 enfants contre la rougeole ; et pris en charge 4 084 enfants malnutris.  En parallèle, MSF intervient à l’hôpital régional de Tombouctou (72 lits) où, sur la même période, environ 1 600 enfants ont été hospitalisés (dont plus de 500 pour malnutrition sévère) ; plus de 3 200 accouchements ont été effectués ; et 1 056 patients admis en chirurgie.

Cependant, depuis 2014, le volume de nos activités décroît. La dégradation du contexte sécuritaire, la présence d’engins explosifs sur les routes et les risques de braquage des véhicules (MSF en a elle-même été victime en mars 2014), nous empêchent par exemple de poursuivre la supervision de certains centres de santé communautaires situés en périphérie. Pour les mêmes raisons, il est difficile de mettre en place un système de transfert des patients vers l’hôpital, où (en conséquence) le taux de fréquentation reste inférieur à 60%. En raison des difficultés d’accès, les patients qui parviennent jusqu’à cette structure arrivent généralement (trop) tard et dans un état de santé très dégradé.

MSF poursuit malgré tout son soutien à trois centres de santé communautaires situés dans les environs de la ville de Tombouctou (soins primaires, obstétricaux et néonataux d’urgence, vaccination et activités nutritionnelles). Nous concentrons également nos efforts sur les transferts des patients depuis les centres communautaires vers le centre de santé de référence (où nous avons aussi mis en place des consultations pour les maladies chroniques), puis vers l’hôpital général de Tombouctou où nous améliorons la prise en charge des patients aux soins intensifs, aux urgences, au bloc opératoire, en chirurgie, en maternité, en pédiatrie-nutrition, ainsi qu’en médecine interne.


Autres activités MSF au Mali

Depuis 2009, MSF et le ministère de la santé malien mènent un projet pédiatrique à Koutiala (575 000 habitants, dont 200 000 ont entre 6 mois et 5 ans), au sud-est du pays, où la mortalité infantile, et notamment celle liée au paludisme, ainsi que la prévalence de la malnutrition aigüe sévère chez les enfants âgés de 6 mois à 5 ans sont très élevées. MSF a mis en place une unité pédiatrique et nutritionnelle au sein du centre de santé de référence de la ville de Koutiala, dont le nombre de lits varie entre 200 et 400 selon la saison et le pic annuel de paludisme. MSF appuie également cinq aires de santé du district pour y renforcer l’accès aux soins primaires des communautés rurales ; et entreprend annuellement une Chimio Prévention Saisonnière (CPS) du paludisme (plus de 510 000 enfants couverts entre 2012 et 2014). De juillet 2009 à fin 2014, plus de 400 000 consultations ont été dispensées, dont plus de 178 000 pour des cas de paludisme confirmés ; plus de 35 600 enfants ont été hospitalisés, dont plus de 22 000 cas de paludisme sévère ; près de 34 500 enfants malnutris ont été pris en charge en ambulatoire et plus de 24 000 ont été hospitalisés ; 59 500 enfants ont été vaccinés contre la rougeole, plus de 30 000 contre la tuberculose, plus de 33 000 contre la fièvre jaune et plus de 45 000 contre la poliomélyte. Depuis mars 2010, MSF a mis en place un projet pilote sur l’aire de santé de Konseguela, avec un « paquet minimum » de soins pédiatriques curatifs et préventifs associé à un suivi régulier des enfants de moins de 2 ans. L’objectif : permettre une croissance harmonieuse et éviter nombre de décès précoces (plus de 44 700 consultations de suivi pour des nourrissons non-malades ont été dispensées depuis 2010 et près de 13 000 moustiquaires ont été distribuées depuis 2011).  

Suite au premier cas d’Ebola « importé » sur le territoire malien, en octobre 2014, huit autres cas ont été déclarés (dont six décès). MSF est intervenue sur les districts sanitaires de Yanfolila et Sélingué - province de Sikasso - frontaliers avec la Guinée : mise en place d’un centre de traitement d’Ebola de 10 lits à Koutiala, où le personnel a été formé ; réaménagement et/ou construction de deux sites de transit/observation à Yanfolila et Sélingué ; appui à 24 centres de santé communautaires, à Yanfolila et à Sélingué (formation, donations de matériel et d’équipement) ; et mise en place d’un système d’alerte/surveillance et de réponse adaptée. Ce projet a fermé en février dernier.

À lire aussi