Palestine : immersion photographique dans les «Occupied Minds» de Cisjordanie

Les habitants d'Hébron sont susceptibles d'être soudainement exposés à des événements potentiellement traumatiques qui peuvent avoir des effets sur leur santé mentale. Palestine. 2018.
Les habitants d'Hébron sont susceptibles d'être soudainement exposés à des événements potentiellement traumatiques qui peuvent avoir des effets sur leur santé mentale. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos

Le photographe Moises Saman (agence Magnum) met en lumière l’impact de la violence et de l’occupation israélienne à travers une série photographique intitulée « Occupied Minds », réalisée dans la ville d'Hébron en collaboration avec Médecins Sans Frontières. Les équipes de l’association offrent des soins de santé mentale aux populations de cette ville depuis 2001 et ont pris en charge près de 6 400 patients pour la seule année 2018.

Avec cette série, Moises Saman tente de nous immerger dans la vie de ces personnes qui souffrent de troubles mentaux consécutifs à la violence généralisée qui règne à Hébron et en Cisjordanie, et d’attirer l’attention du public sur les effets de l’occupation.

« Les Palestiniens vivant en Cisjordanie subissent un énorme niveau de violence directe et indirecte dans leur vie quotidienne, ce qui a un impact sur la santé mentale de nombre d'entre eux », explique Juan Carlos Ramos, chef de mission MSF en Palestine.

Dans une rue d'Hébron. Palestine. 2018.
 © Moises Saman/Magnum Photos
Dans une rue d'Hébron. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos

« Chaque jour, nos équipes travaillent pour aider les personnes souffrant directement des actes de violence, y compris la détention de proches, les raids violents dans les maisons et les écoles, les démolitions de maisons, le meurtre de membres de leur famille, les perquisitions aux checkpoints et le harcèlement quotidien par les colons et les soldats », poursuit-il.

Les manifestations qui se tiennent parfois le vendredi après la prière donnent souvent lieu à des débordements violents. Palestine. 2018.
 © Moises Saman/Magnum Photos
Les manifestations qui se tiennent parfois le vendredi après la prière donnent souvent lieu à des débordements violents. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos

« Nous vivons dans un endroit où beaucoup d'événements traumatiques se produisent. Cela conduit à la colère, à l'inquiétude et au manque d'espoir. De nombreuses personnes touchées sont des adolescents et cela marquera leur vie d'adulte. À cet âge, ils veulent la liberté, se déplacer librement, un avenir », explique Mervat Suboh, psychologue MSF à Hébron.

Mervat Suboh, une psychologue palestinienne MSF qui travaille à Hébron, appelle un patient pour prendre rendez-vous. Palestine. 2018.
 © Moises Saman/Magnum Photos
Mervat Suboh, une psychologue palestinienne MSF qui travaille à Hébron, appelle un patient pour prendre rendez-vous. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos

Une étude conduite par Médecins Sans Frontières à Hébron en mai 2018 a révélé qu’un tiers des personnes interrogées signalent avoir souffert émotionnellement durant les 30 jours précédents l’entretien. Près de 4 800 habitants d’Hébron ont participé à cette étude.

Mahmoud est un Palestinien de 74 ans qui souffre de troubles cognitifs dus à un accident vasculaire cérébral. Il a par la suite été frappé par des soldats israéliens à un check-point. Il est désormais alité et pris en charge par sa femme. Palestine. 2018.
 © Moises Saman/Magnum Photos
Mahmoud est un Palestinien de 74 ans qui souffre de troubles cognitifs dus à un accident vasculaire cérébral. Il a par la suite été frappé par des soldats israéliens à un check-point. Il est désormais alité et pris en charge par sa femme. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos

Les principaux symptômes observés par les équipes de MSF sont l’anxiété, les problèmes de sommeil et les sentiments de tristesse et de peur. Chez les enfants, les symptômes comprennent l'énurésie nocturne, les cauchemars, les troubles de l'alimentation et les troubles du comportement.

Raed a 43 ans. Il est père de six enfants et vit à Hébron. Il s'est fait tirer dans la hanche par des soldats israéliens lors d'un affrontement, suivant les funérailles d'un garçon palestinien tué par l'armée israélienne. Raed souffre de symptômes dépressifs et ne peut plus subvenir aux besoins de sa famille. Palestine. 2018.
 © Moises Saman/Magnum Photos
Raed a 43 ans. Il est père de six enfants et vit à Hébron. Il s'est fait tirer dans la hanche par des soldats israéliens lors d'un affrontement, suivant les funérailles d'un garçon palestinien tué par l'armée israélienne. Raed souffre de symptômes dépressifs et ne peut plus subvenir aux besoins de sa famille. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos
Youssef habite dans le camp de réfugiés de Al-Arroub dans le sud de la Cisjordanie. Son enfance a été façonnée par la violence. Palestine. 2018.
 © Moises Saman/Magnum Photos
Youssef habite dans le camp de réfugiés de Al-Arroub dans le sud de la Cisjordanie. Son enfance a été façonnée par la violence. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos

« J'ai beaucoup couvert le Moyen-Orient, mais c'était la première fois que je me rendais à Hébron. Ce qui m’a le plus frappé, c’est que l’impact de l’occupation israélienne est vraiment omniprésent, affectant pratiquement tous les aspects de la vie des gens, explique Moises Saman. Ce sont des histoires individuelles, mais leurs souffrances sont collectives et transgénérationnelles. »

Sans liberté de mouvement, les Palestiniens sont obligés de trouver des chemins autour des check-points et des barrières de séparation avec Israël, pour trouver du travail, aller à l'école ou visiter leur famille. Palestine. 2018.
 © Moises Saman/Magnum Photos
Sans liberté de mouvement, les Palestiniens sont obligés de trouver des chemins autour des check-points et des barrières de séparation avec Israël, pour trouver du travail, aller à l'école ou visiter leur famille. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos
Hébron est divisée en zone H1, contrôlée par l'Autorité palestinienne, et H2, sous contrôle de l'armée israélienne, qui protège notamment près de 850 colons. Palestine. 2018.
 © Moises Saman/Magnum Photos
Hébron est divisée en zone H1, contrôlée par l'Autorité palestinienne, et H2, sous contrôle de l'armée israélienne, qui protège notamment près de 850 colons. Palestine. 2018. © Moises Saman/Magnum Photos

Une exposition « Occupied Minds » se tiendra à Amman en Jordanie jusqu’au 31 octobre avant de voyager dans d’autres villes.

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