Libye – Des besoins méconnus mais réels

Zone de Tripoli 2012
Zone de Tripoli, 2012 © Sebastien Van Malleghem

Le système de santé en Libye est très mal en point. « C’est un pays où les difficultés ne sont pas forcément visibles d’emblée, constate Malika Saim, coordinatrice d’urgence MSF. Mais les besoins sont très importants. Depuis notre première mission en avril 2015, on constate une nette dégradation du système de soins. »

La guerre contre Kadhafi en 2011, puis l’intensification du conflit armé en 2014 entre les diverses factions politiques ont notamment eu pour effet de faire fuir les nombreuses infirmières étrangères qui travaillaient en Libye.  Des hôpitaux sont aujourd’hui fermés ou en difficulté parce qu’ils ont été détruits ou parce qu'ils manquent de personnels médicaux expérimentés.

A cela s’ajoutent les pénuries de médicaments, notamment d’insuline ou de matériel pour les dialyses. Car l’approvisionnement en médicaments est  un problème dans ce pays qui dispose de deux banques centrales et de deux ministères de la Santé rattachés à deux différents gouvernements se disputant le pouvoir. L’un est basé à Tobrouk dans l’est tandis que l’autre, basé à Tripoli, contrôle la plupart des régions de l’ouest.  

Pour venir en aide aux hôpitaux encore ouverts, MSF procède à des donations de médicaments. A l’Hôpital Central de Misrata, ce sont surtout les antibiotiques et les antalgiques qui manquent.  Outre ces donations, l’équipe MSF assure des formations : au chevet du patient, dans la salle d’urgences et au bloc opératoire. Le but : faire en sorte que les infirmières-chefs de chaque service forment, à leur tour, les infirmières qui n'ont pour tout bagage qu'une formation de quelques mois.

A l’hôpital public de Zouara - situé près de la frontière tunisienne et seule structure du district à prendre en charge les urgences - une équipe MSF assure aussi  une formation aux urgences et aux soins intensifs de manière à faciliter la prise en charge des blessés.  Suite au bombardement américain et aux attaques lancées par les forces de l’Etat islamique, fin février dans la zone de Sabrata, l’hôpital a ainsi été en mesure de recevoir une quinzaine de blessés.

« Dans l’est de la Libye, la problématique humanitaire est la même : manque de personnel formé et pénurie de médicaments, explique Malika Saïm.  Nous apportons un soutien similaire aux hôpitaux qui reçoivent des blessés ».  Dans la ville de Benghazi où s’affrontent des forces djihadistes et l’armée nationale affiliée au gouvernement de Tobrouk, MSF fournit des médicaments à trois hôpitaux. Dans l’un deux, au Benghazi Medical Center, l’équipe MSF va aussi organiser  une formation aux urgences. A la suite de combats de début mars à Benghazi, les hôpitaux de la ville ont reçu plus d’une centaine de blessés. D’autres victimes ont été pris en charge dans les hôpitaux d’El-Marj et d’Al-Abyar, situés à l’est de Benghazi et avec lesquels MSF collabore.

Il faut aussi faire face aux besoins des personnes déplacées par les violences, Benghazi en compte plus de 100 000. A ces familles, MSF distribue de la nourriture et assure, en étroite collaboration avec une ONG locale, dans un dispensaire ouvert le 20 février dernier, des consultations en pédiatrie et gynécologie-obstétrique. Par ailleurs, MSF donne des vaccins à des centres de santé situés dans des régions de l’est comme de l’ouest car la chute de la couverture vaccinale et les difficultés d’accès aux soins maternels sont d’autres facettes de la crise sanitaire en Libye.  

Malgré la grave détérioration du système de soins,  très peu d’acteurs humanitaires, à l’instar de MSF, apportent leur aide. Du fait de ses ressources pétrolières, la Libye est toujours considérée comme un pays riche, ce qu’elle n’est plus. Et le système de santé est à l’image du pays; les hôpitaux sont effectivement équipés d’appareils de pointe mais qui, faute d’entretien et de disponibilité des pièces détachées, sont rarement opérationnels. 

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