Les promesses non tenues de Merck sur l'Efavirenz

Contrairement à ce que le laboratoire pharmaceutique américain
annonçait il y a 16 mois, le prix de la nouvelle formulation de 600 mg
d'efavirenz, un médicament contre le sida, n'a pas diminué dans les
pays en développement.

Les malades des pays pauvres qui en ont besoin sont obligés d'acheter les trois comprimés de 200 mg à 1,37$, soit 44% plus cher que le prix promis par Merck. En octobre 2002, le laboratoire pharmaceutique américain Merck annonce son intention de réduire le prix du Stocrin© (efavirenz, EFV) à moins d'un dollar par jour pour les pays en développement. Seize mois plus tard, cette promesse n'a pas été tenue.

L'efavirenz est pourtant l'une des molécules recommandées par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) pour le traitement de première ligne du sida et l'un des trois médicaments indispensables des trithérapies, particulièrement pour les malades co-infectés par le VIH et la tuberculose. Les comprimés de 600 mg d'efavirenz permettraient aux patients de prendre un seul médicament par jour, à la place de trois comprimés de 200 mg qui existe déjà.

Merck n'a toujours pas enregistré cette nouvelle formulation dans les pays en développement très touchés par le sida, comme l'Afrique du sud, le Malawi et le Nigéria, ce qui interdit aux patients de disposer de ce médicament facile d'utilisation. Or, une telle offre sur les prix n'a aucun impact si elle ne s'accompagne pas d'un enregistrement rapide du médicament.

Le laboratoire pharmaceutique n'a pas non plus tenu sa promesse, pour les pays en développement, de fixer le prix des comprimés de 600 mg équivalent à celui des trois comprimés de 200 mg. Pourtant, aux Etats-Unis et en Europe les malades vivant avec le VIH/sida paient le même prix pour l'une ou l'autre formule. Mais les patients des pays pauvres qui ont besoin de l'efavirenz sont obligés d'acheter les trois comprimés de 200 mg à 1,37$, soit 44% plus cher que le prix promis par Merck.

"Ils nous ont trompé et les conséquences sur les patients sont inacceptables", souligne le Dr Eric Goemaere, chef de mission pour MSF en Afrique du sud. "Cela fait maintenant plus d'un an et demi que nous attendons de pouvoir donner aux patients vivant avec le sida et co-infectés par la tuberculose la formulation promise par Merck, qui leur permettrait à la fois de vivre mieux et de mieux adhérer au traitement. Nous sommes réellement fatigués d'attendre !

Mais le véritable problème est qu'il n'existe aujourd'hui aucune version générique de l'efavirenz. Merck est donc en position de faire payer son médicament au prix que lui seul décide et de tarder encore pour lancer l'enregistrement de son produit. En Afrique du sud, la prévalence de la tuberculose parmi les patients vivant avec le VIH/sida est très élevée. Nous n'avons donc aucune alternative que d'utiliser ce médicament, ce qui rend les trithérapies trois fois plus élevées que les autres combinaisons de la même classe, et qui sont, elles, disponibles en version générique."

L'offre de Merck faite il y a 18 mois avait eu lieu alors que le laboratoire et ses partenaires lançaient les comprimés de 600 mg d'efavirenz aux Etats-Unis et en Europe. "Il semble donc que l'offre de Merck pour les pays en développement consistait surtout à attirer l'attention sur son produit et à augmenter ses parts de marché dans les pays riches" déclare Ellen t'Hoen, directrice de la Campagne d'Accès aux Médicaments Essentiels de MSF.

"Si Merck avait véritablement eu l'intention de rendre l'efavirenz plus largement disponible dans les pays en développement, le laboratoire aurait immédiatement commencé l'enregistrement de son produit dans les pays concernés, sitôt après son annonce et, en même temps, diminué le prix des comprimés de 200 mg. Nous invitons aujourd'hui le laboratoire Merck à tenir ses promesses et à réduire immédiatement le prix de ses comprimés de 200 mg, la seule formulation d'Efavirenz aujourd'hui largement disponible."

Médecins Sans Frontières demande au laboratoire Merck de diminuer immédiatement le prix des comprimés de 200 mg à 0.32 $, afin que le prix réel du médicament soit égal à l'offre annoncée, soit 0.95$ par jour. MSF incite également Merck à enregistrer rapidement les formulations de 600 mg dans les pays en développement et de tenir sa promesse d'accorder aux malades des pays pauvres ce médicament essentiel au prix promis.

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