RDC : une épidémie de choléra de plus en plus préoccupante à travers le pays

Opération de MSF à Sake, Nord-Kivu
Un membre de l’équipe de MSF désinfecte la salle où les patients atteints de choléra sont pris en charge au centre de santé de référence de Sake, soutenu par MSF dans le cadre de sa réponse d’urgence. Nord Kivu, Février 2025.  © Jospin Mwisha

La République démocratique du Congo (RDC) est frappée par une épidémie de choléra d’une intensité alarmante. En seulement neuf mois, plus de 58 000 cas ont été enregistrés par le ministère de la Santé. Il s’agit de l’une des épidémies les plus graves de ces dix dernières années, révélant l’ampleur de la crise sanitaire qui touche le pays. Face à cette progression rapide, Médecins sans Frontières (MSF) appelle à une mobilisation immédiate et renforcée des autorités nationales, des acteurs humanitaires et des partenaires internationaux pour contenir la propagation de la maladie. 

Le choléra touche désormais 20 des 26 provinces du pays. Entre janvier et la mi-octobre, plus de 1 700 décès ont été enregistrés, avec un taux de létalité supérieur à 3.0 %. La situation ne cesse de s’aggraver, s’étendant à de nouvelles zones de santé, y compris des provinces jusque-là non endémiques au choléra.  

Les inondations, les conflits, les déplacements, les mauvaises conditions d’hygiène, ainsi que l’insuffisance des systèmes d’assainissement et d’approvisionnement en eau provoquent de vastes flambées de cette infection bactérienne hautement contagieuse qui, sans traitement, peut être rapidement mortelle. Or, à l’approche de la saison des pluies, la situation risque encore de se dégrader, notamment dans les zones urbaines densément peuplées comme Kinshasa, ou dans les zones rurales accueillant un grand nombre de personnes déplacées. Cette période favorise en effet une propagation accrue de la maladie, pourtant traitable et évitable. 

La réponse à l’épidémie se heurte à plusieurs obstacles majeurs : un financement insuffisant du gouvernement congolais, la présence limitée des acteurs humanitaires et un manque de coordination dans le mécanisme d’intervention d’urgence. De plus, la faiblesse des systèmes de surveillance et d’identification de cas suspects, le manque de personnel et de matériel médical, ainsi que la distribution limitée de vaccins, compromettent sérieusement la mise en œuvre d'une réponse rapide, efficace et durable face à l’épidémie.

Depuis janvier 2025, les équipes MSF ont intensifié leurs efforts pour pallier les faiblesses des mécanismes d'intervention d'urgence des autorités sanitaires et d'autres acteurs. Elles ont renforcé leurs activités dans plusieurs provinces du pays, notamment dans le Nord-Kivu et les zones les plus touchées, comme à Fizi (Sud-Kivu) et Kongakonga (Tshopo). Depuis janvier, elles ont déjà mené 16 interventions d’urgence en soutien au ministère de la Santé, permettant de soigner plus de 35 800 patients et de vacciner plus de 22 000 personnes contre la maladie. Mais « à ce stade critique, seule une mobilisation générale permettra de contenir la maladie sur le terrain et de freiner l’expansion alarmante des foyers épidémiques », insiste le Dr Jean Gilbert Ndong, coordinateur médical de MSF en RDC. 

Afin de ralentir la propagation de la maladie, MSF soutient également le ministère de la Santé dans la prise en charge médicale dans les centres de traitements spécialisés, la formation d’agents de santé communautaire et la mise en place de points de chloration, ainsi que le renforcement des systèmes d’approvisionnement en eau et d’assainissement. 

Mais les équipes de MSF doivent composer avec des difficultés logistiques, administratives et sécuritaires qui entravent leur accès aux patients. « L'insécurité persistante, marquée par les affrontements entre groupes armés le long des axes principaux, entrave les déplacements et retarde la livraison de l'aide, obligeant les équipes à effectuer de longs détours pour éviter les zones à risque », déplore Ton Berg, cheffe des programmes de MSF au Sud-Kivu. 

Pour les communautés elles-mêmes, l'accès aux soins de santé constitue un défi immense. Les distances à parcourir, le manque de transport ou l’insécurité rendent difficile l'accès aux structures médicales. Et même lorsqu’elles parviennent à rejoindre un centre de santé, celui-ci est souvent sous-équipé et incapable de répondre à leurs besoins essentiels, laissant les populations les plus vulnérables sans les soins indispensables.  

« Nous appelons à une action coordonnée et urgente pour garantir la fourniture rapide de soins médicaux, notamment un accès sans entrave et un investissement durable dans l'accès à l'eau potable et à l'assainissement », plaide Ton Berg. 

Notes

    À lire aussi