France : MSF demande des solutions d’hébergement adaptées pour les mineurs isolés étrangers

A Marseille, MSF héberge depuis décembre 2021 vingt jeunes étrangers qui ont saisi un juge des enfants pour faire reconnaître leur minorité et bénéficier de la protection de l’Aide sociale à l’enfance.
A Marseille, MSF héberge depuis décembre 2021 vingt jeunes étrangers qui ont saisi un juge des enfants pour faire reconnaître leur minorité et bénéficier de la protection de l’Aide sociale à l’enfance. © MSF/Serena Colagrande

Suite à l’évacuation du campement de mineurs isolés étrangers situé place de la Bastille à Paris et à l’expulsion d’une cinquantaine de jeunes étrangers de deux squats de la rue de la Canebière à Marseille, MSF demande une solution d’accueil pérenne et adaptée à leur âge et à leur vulnérabilité, d’autant plus nécessaire à l’approche de l’hiver.

 

Solutions inadaptées

Faute de prise en charge par les conseils départementaux, plusieurs centaines de jeunes étrangers âgés de 14 à 17 ans sont contraints de vivre à la rue ou dans des bâtiments insalubres. A Marseille, des dizaines de jeunes qui avaient trouvé refuge dans deux squats situés dans la rue de la Canebière en janvier ont été expulsés le 21 septembre. A Paris, depuis le mois de mai, une soixantaine de jeunes dormait dans des tentes installées place de la Bastille, jusqu’à leur évacuation le 23 septembre. Dans les deux cas, la seule réponse apportée par les pouvoirs publics a été une mise à l’abri dans des centres d’hébergement dédiés aux adultes : une solution temporaire et inadaptée à leur situation.

« Les dispositifs d’hébergement d’urgence classiques, dont le public est composé d’adultes beaucoup plus âgés et en situation de grande précarité, ne constituent en aucun cas une solution adaptée à des gamins scolarisés et nécessitant une grande attention médicale et sociale », affirme Julien Delozanne, responsable du programme de MSF à Marseille.

Après avoir été évalués majeurs et s’être vu notifier un refus de prise en charge par le Conseil départemental, ces jeunes ont saisi un juge des enfants pour faire reconnaître leur minorité et bénéficier de la protection de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). « La possibilité d’un recours auprès du juge des enfants est un droit établi par la loi, mais ce droit est illusoire, car durant la période du recours ils se trouvent sans hébergement ni accompagnement. En ignorant cette réalité, les pouvoirs publics jouent un jeu politique dangereux qui met en péril la santé physique et mentale de ces jeunes », selon Xavier Crombé, responsable des projets de MSF en France.

Pathologies et troubles psychiques

Parmi les jeunes du squat de la Canebière, MSF a identifié plusieurs cas, affectés de graves pathologies médicales et de troubles psychiques, dont le suivi médical nécessite un hébergement stable et sécurisé, adapté à leur âge. Cinq jeunes ont ainsi été diagnostiqués avec une tuberculose latente et sont suivis par une infirmière de MSF. « Si aucun suivi médical n’est fait après avoir posé le diagnostic, la maladie peut s’aggraver, jusqu’à mettre en danger le pronostic vital du patient, particulièrement lorsque les conditions de vie sont difficiles », précise Marine Lasserre, infirmière pour MSF à Marseille. MSF a également pris en charge un jeune affecté par une grave pathologie mentale. Considéré majeur par les évaluateurs du département, il a été remis à la rue, malgré ses troubles, la veille de son rendez-vous médical chez un psychiatre.

Pendant huit mois, les jeunes vivant dans les deux squats sur la rue de la Canebière ont été hébergés, soignés et scolarisés par des collectifs et des associations, qui ont dû combler le vide laissé par les pouvoirs publics. « Les jeunes ont ainsi pu être protégés des périls de la rue. Cette évacuation remet en question tout le bénéfice de cette prise en charge », regrette Julien Delozanne.  

 

Les associations, les collectifs solidaires et MSF restent mobilisés pour répondre aux besoins de ces jeunes (alimentation, vêtements, hygiène, hébergement) et leur apporter un soutien médical, juridique, social et administratif. Environ 80% des jeunes en recours suivis par MSF à Marseille et en Ile-de-France finissent par être reconnus mineurs et pris en charge par l’ASE. Le tissage associatif mis en place autour de ces jeunes leur permet ainsi d’être dans des conditions plus favorables à la défense de leurs droits.

 « Les squats de Marseille et les campements de mineurs isolés étrangers en recours à Paris offraient un exemple de prise en charge collective reposant uniquement sur l’aide apportée par les bénévoles et les associations. Il est temps que les pouvoirs publics prennent leur part afin de trouver une solution d’accueil pérenne et adaptée à la vulnérabilité de ces jeunes », conclut Xavier Crombé.

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