Éthiopie : les réductions de l’aide mettent en danger les vies des réfugiés dans la région de Gambella
Communiqué de presse

Les conditions de vie de plus de 395 000 réfugiés, principalement originaires du Soudan du Sud, dans la région de Gambella dans le sud-ouest de l’Éthiopie, se détériorent rapidement, à la suite des réductions significatives du financement de l’aide humanitaire de bailleurs clés tels que USAID. Ces réductions ont conduit à la suspension des services de prise en charge de la malnutrition dans quatre des sept camps de réfugiés de la région. 80 000 enfants de moins de cinq ans sont exposés à un risque de malnutrition sévère et potentiellement mortelle, alerte Médecins sans Frontières (MSF), qui fournit des soins depuis plus de dix ans dans le camp de Kule.
« Nous recevons de la nourriture une fois par mois — du maïs, du blé et du sorgho — mais il en manque toujours pour finir le mois », raconte Nyauahial Puoch, une mère qui a parcouru à pied environ 8 kilomètres depuis le camp de réfugiés de Tierkidi pour obtenir des soins pour sa fille de 17 mois à la clinique de MSF dans le camp de Kule. « Depuis l’année dernière, les rations diminuent. Certains des produits que nous recevions ne sont plus du tout fournis. » Sa fille souffre de malnutrition.
Depuis octobre 2024, les réfugiés du camp de Kule reçoivent seulement 600 calories par jour, soit moins de 30 % de l’apport calorique quotidien minimum recommandé de 2 100 calories par personne. D’autres camps de réfugiés de la région connaissent une situation similaire. Parfois, la distribution de nourriture a été suspendue pendant des mois en raison de ruptures de la chaîne d'approvisionnement internationale et de pénuries de financement.
En 2025, MSF a enregistré une augmentation de 55 % des admissions d’enfants dans son centre de prise en charge nutritionnelle par rapport à l’année précédente, la moitié de ces enfants venant d'autres camps de la région.
« Nous avons marché trois heures depuis notre maison dans le camp d'Akula pour arriver à l’hôpital de MSF », déclare Kuoth, une patiente dont l’enfant d’un an a reçu des soins à l’hôpital de MSF à Kule. « Notre enfant souffrait de toux, de diarrhée et de malnutrition sévère. Il a dû être hospitalisé pendant 15 jours jusqu’à sa guérison. »
Le nombre de femmes reçues en consultations prénatales a également augmenté de 72 % par rapport à 2024.
« Nous recevons davantage de patients en provenance d’autres camps », explique Armand Dirks, coordinateur de projet de MSF à Gambella. « C’est en grande partie parce que ces services ne sont plus disponibles localement en raison du retrait de nombreuses ONG de la région après les réductions de financement. MSF est submergée par l’augmentation du nombre de patients, et nous craignons que ce chiffre continue d'augmenter dans les mois à venir. »
Les réductions de financement ont également conduit à une réduction des activités de prévention des maladies, telles que les programmes de prévention du paludisme. En juillet 2025, le nombre de patients atteints de paludisme se présentant aux structures de MSF a augmenté d’environ 125 % par rapport à juin 2025. MSF a traité plus de 23 800 cas depuis janvier, dont plus de la moitié viennent des camps de réfugiés voisins.
Avec la réduction drastique cette année des activités clés de prévention du paludisme, telles que la distribution de moustiquaires, la pulvérisation de produit anti-moustique, ajoutée aux difficultés croissantes d’accès rapide aux soins, MSF craint que la région ait du mal à contrôler la propagation de la maladie pendant la saison des pluies qui dure de mai à octobre, ce qui augmentera la pression sur un système de santé déjà fragile.
« On s’attend à une forte augmentation des cas pendant cette période de transmission maximale », a déclaré Birhanu Sahile, coordinateur médical adjoint de MSF. « Cela représente une menace sérieuse pour les réfugiés déjà vulnérables. »
Pour faire face à cette situation, MSF renforce ses services de traitement du paludisme dans la région et prévoit d’établir un poste de santé dédié au paludisme dans le camp de réfugiés de Tierkidi abritant plus de 74 000 réfugiés. Les équipes de MSF distribuent également des moustiquaires et soutiennent les mesures de contrôle et de prévention pour les réfugiés vivant dans le camp de Kule.
« En marchant dans le camp, vous verrez de nombreux bâtiments vides — des espaces autrefois utilisés par les ONG qui se sont maintenant retirées », explique Armand Dirks.
« MSF travaille à pleine capacité, mais l'ampleur des besoins dans le camp de Kule dépasse largement ce que nous pouvons faire seuls », poursuit Birhanu Sahile. « Sans un soutien urgent et des interventions d'autres acteurs, cette crise continuera de s’aggraver, mettant ainsi des milliers de vies en danger. »
Alors que les capacités des ONG pour répondre aux besoins en soins de santé dans les camps de réfugiés diminuent, MSF appelle le gouvernement éthiopien à prendre des mesures claires et décisives pour favoriser l’intégration des réfugiés dans les services locaux de Gambella et renforcer le système de santé actuel.