Enquête sur le bombardement de l’hôpital Shiara au Yémen : des conclusions tardives et insatisfaisantes

MSF Aden trauma hospital
Yémen, Hôpital MSF d'Aden, Décembre 2018.  © Agnes Varraine-Leca/MSF

Il aura fallu trois ans au Joint Incident Assessment Team (JIAT) - l'organisme désigné par la coalition internationale pour enquêter sur les bombardements au Yémen - pour rendre ses conclusions sur le bombardement de l’hôpital Shiara à Razeh, soutenu par MSF. Derrière “le dysfonctionnement” évoqué se cache une lourde série d’attaques sur les structures médicales au Yémen. 

Le 10 janvier 2016, un tir de la coalition internationale, dirigée par l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis, touchait l’hôpital Shiara à Razeh, soutenu par MSF, faisant six morts et huit blessés. 

Dans ses conclusions, rendues publiques le 23 octobre 2019 et pour lesquelles aucun rapport écrit n’est disponible, le JIAT reconnaît "un dysfonctionnement du projectile ayant entraîné un écart par rapport à la cible" et recommande "une assistance volontaire pour les pertes matérielles et humaines". 

MSF prend acte des conclusions du JIAT, qui reconnaissent la responsabilité de la coalition internationale dans cette attaque. Mais cet événement tragique rappelle une fois de plus que les belligérants doivent mettre en place toutes les mesures nécessaires pour garantir la protection des installations médicales, qui demeurent un espace protégé selon le droit international humanitaire. 

Depuis le début de l’offensive de la coalition en 2015, les infrastructures civiles - y compris les hôpitaux - dans le Nord du pays ont fait l’objet d’attaques massives et répétées, à l’instar du bombardement d’un bus scolaire à Dhayan en 2018 ou celui de la prison de Dhamar en 2019.

Les structures de MSF ont été frappées à cinq reprises par les bombardements de la coalition depuis le début de la guerre. Lors de ces précédentes enquêtes sur ces incidents, le JIAT a tenté de faire porter la responsabilité à MSF, comme ce fut le cas lors du bombardement du centre de choléra à Abs en juin 2018, ou de pointer des dysfonctionnements techniques.

MSF considère que le travail d’investigation du JIAT reste opaque, ses recommandations vagues, tardives et complaisantes vis à vis de la coalition. L’organisation demande que des enquêtes indépendantes soient menées sur ces événements, qu’elles soient conduites de manière transparente et dans des délais raisonnables, et qu’elles donnent lieu à des rapports écrits et publiques.

MSF appelle toutes les parties au conflit, et particulièrement la coalition internationale, à garantir la sécurité des structures médicales, du personnel de santé et des civils au Yémen.

À lire aussi