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Soudan du sud : vivre en sécurité dans les camps, à quel prix?

Des enfants dessinent pendant leur cours à l'école du site de protection des civils de Bentiu. 2018. Soudan du Sud. 
Des enfants dessinent pendant leur cours à l'école du site de protection des civils de Bentiu. 2018. Soudan du Sud.  © Emin Ozmen/Magnum Photos

Depuis 2013, quatre millions de personnes ont été déplacées par les combats au Soudan du Sud, dont deux millions à l’intérieur même du pays. Les sites de protection des civils (SPC), créés alors pour permettre à la population de se mettre à l’abri des combats, sont aujourd’hui des lieux où il est plus question de survie que de protection. Reportage dans les SPC de Bentiu et Malakal, où les équipes de MSF interviennent.

En septembre 2018, un nouvel accord de paix prévoyant un partage du pouvoir a été signé à Addis-Abeba, la capitale de l’Éthiopie, par le président Salva Kiir et son opposant, Riek Machar. L’avenir des sites de protection des civils (SPC) est depuis évoqué, ainsi que celui des 180 000 personnes vivant aujourd’hui dans six de ces camps. Bien que les conditions de vie soient très difficiles dans les SPC, pour beaucoup, elles restent préférables à la vie en dehors des camps.

Teresa a fui les violences dans sa ville natale de Mayendit et s’est réfugiée dans le camp de Bentiu, à 75 kilomètres de là. « Quand mon village a été attaqué, beaucoup de personnes ont été séparées et des enfants se sont même retrouvés à s’enfuir avec des familles qu’ils ne connaissaient pas. Tout le monde a fui ou a été tué », raconte la mère de trois enfants.

Des barbiers dans la zone du marché du site de protection des civils de Bentiu. 2018. Soudan du Sud.
 © Emin Ozmen/Magnum Photos
Des barbiers dans la zone du marché du site de protection des civils de Bentiu. 2018. Soudan du Sud. © Emin Ozmen/Magnum Photos

Des conditions de vie désastreuses

100 000 personnes vivent dans le camp de Bentiu, dans le nord du pays, et les enjeux de sécurité, de santé et d'accès à l’eau y sont colossaux. Bien que les SPC soient protégés par les forces de la Mission des Nations unies au Soudan du Sud (MINUSS), la sécurité reste relative dans le camp. Les vols, les pillages et les violences sexuelles sont récurrents. Ceux qui ont un travail ou une source de revenus s’exposent à un risque accru de violences.

Principales interventions de Médecins Sans Frontières au Soudan du Sud. Source : Rapport international d'activités 2017.
 © MSF
Principales interventions de Médecins Sans Frontières au Soudan du Sud. Source : Rapport international d'activités 2017. © MSF

« Rassembler autant de personnes au même endroit est dangereux sur le plan sanitaire, surtout lorsque les gens ne sont pas correctement logés et qu’ils s’entassent dans des abris collés les uns aux autres. Si une personne se trouve atteinte de tuberculose sans en connaître les symptômes, elle risque d’infecter les occupants vivant à proximité. Dans le camp, les risques de contamination sont importants », explique Peter, père de cinq enfants vivant à Bentiu depuis cinq ans, et originaire de la ville voisine de Rubkona.

Des enfants jouent dans le site de protection des civils de Bentiu. 2018. Soudan du Sud. 
 © Emin Ozmen/Magnum Photos
Des enfants jouent dans le site de protection des civils de Bentiu. 2018. Soudan du Sud.  © Emin Ozmen/Magnum Photos

Dans le camp, le trop-plein des latrines s’écoule le long des berges et forme une boue stagnante et épaisse, dans laquelle les enfants jouent. Près de la moitié des patients reçus au service ambulatoire ou hospitalisés dans le centre de santé de 160 lits de MSF sont des enfants de moins de cinq ans. Beaucoup souffrent de diarrhée sévère aiguë, d’affections cutanées, d’infections des yeux, qui pourraient être évitées en améliorant les conditions d’assainissement et d’approvisionnement en eau.

Un taux de suicide alarmant

À l’est de Bentiu, Malakal, capitale de l'État du Nil Supérieur et deuxième ville la plus peuplée avant la guerre, a été lourdement affectée par la guerre. Les destructions y restent visibles : bâtiments en ruines, voitures incendiées et quartiers vides rappellent constamment la violence des combats.

Martha est âgée de 27 ans et elle vit sur le site de protection des civils de Malakal, dans le nord-est du Soudan du Sud. Elle habitait dans la ville de Malakal mais elle a rejoint le site de protection des civils en 2014 à cause du conflit. Elle a été admise dans l'hôpital de MSF avec une pneumonie. 2019. Soudan du Sud. 
 © MSF/Igor Barbero
Martha est âgée de 27 ans et elle vit sur le site de protection des civils de Malakal, dans le nord-est du Soudan du Sud. Elle habitait dans la ville de Malakal mais elle a rejoint le site de protection des civils en 2014 à cause du conflit. Elle a été admise dans l'hôpital de MSF avec une pneumonie. 2019. Soudan du Sud.  © MSF/Igor Barbero

Les équipes MSF y gèrent un hôpital au sein du SPC, dans lequel 30 000 personnes ont trouvé refuge. « On peut se procurer facilement des graines de sorgho ici, mais on n’a pas l’argent pour les broyer, ni d’eau pour les cuisiner. Il n’y a pas assez d’eau, nous sommes trop nombreux ici », explique Martha, jeune femme de 27 ans qui vient de l’est de Malakal.

Achol est âgée de 32 ans. Elle est avec Timothy John, son septième enfant, dans l'hôpital MSF du site de protection des civils de Malakal. 2019. Soudan du Sud. 
 © MSF/Igor Barbero
Achol est âgée de 32 ans. Elle est avec Timothy John, son septième enfant, dans l'hôpital MSF du site de protection des civils de Malakal. 2019. Soudan du Sud.  © MSF/Igor Barbero

En 2018, 51 personnes ayant tenté de se suicider ont été admises à l’hôpital de MSF dans le camp. Les équipes de MSF ont effectué plus de 2 400 consultations de santé mentale. Certains patients ont été profondément affectés par le niveau de violence extrême du conflit, et ressentent un désespoir exacerbé par leurs conditions de vie actuelles.

« La vie est très dure pour tout le monde, particulièrement pour les femmes. Ces dernières années nous ont tous affectés. Nous avons perdu des proches et tout ce que nous possédions en fuyant. Certains préfèrent se donner la mort plutôt que de continuer à vivre ainsi », conclut Achol, une jeune femme âgée de 32 ans.

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