Libéria : à Westpoint, fournir des soins psychiatriques dans les communautés

Libéria : à Westpoint, fournir des soins psychiatriques dans les communautés
Hôpital Bardnesville Junction à Gardnesville: © marco garofalo

Médecins Sans Frontières étend son programme de soins gratuits pour les personnes souffrant de troubles mentaux dans le bidonville de West Point à Monrovia, la capitale du Libéria.

Environ 1 350 personnes atteintes de troubles mentaux ou d'épilepsie sont suivies et traitées dans cinq établissements de santé de Monrovia ainsi que dans d'autres régions du comté de Montserrado. 

« Les troubles mentaux touchent chaque année environ 2 à 3% de la population, explique le Dr Gregory Keane, conseiller en santé mentale de MSF. Les personnes atteintes de psychose non traitée, de dépression grave ou d'autres troubles sévères peuvent avoir des difficultés à gérer leur vie quotidienne. Les familles ne savent pas comment réagir lorsqu’aucun traitement médical n'est disponible. »

Au cours des 30 dernières années, les Libériens ont connu deux guerres civiles et une épidémie d'Ebola qui ont coûté la vie à des milliers de personnes dans la région, notamment parmi le personnel médical. Le pays dispose de services médicaux limités pour les personnes souffrant de troubles mentaux, avec un seul hôpital psychiatrique.

En collaboration avec le ministère de la Santé, MSF soutient neuf professionnels en santé mentale dans des centres de soins de santé primaires à Bensonville, Bromley, Clara Town, Pipeline et West Point. Après une formation de six mois, ils évaluent les patients et assurent leur traitement avec le soutien continu d’un psychiatre de MSF, Hassan Nasser, et d’un psychologue, Saima Zai.

« Il est extrêmement important d'aider les membres de la famille à surmonter la stigmatisation sociale et à éviter des pratiques préjudiciables »,  explique Nasser.

« J'ai vu des personnes enchaînées ou enfermées à la maison à cause de cette forte stigmatisation ou de la peur d'un comportement agressif. Mais quand les gens acceptent qu'il s'agit d’un problème de santé avant tout, et que nous les traitons, ils sont mieux insérés et peuvent avoir une vie normale dans leurs communautés. »

Dans le cadre du programme de santé mentale de MSF au Libéria, des agents de proximité identifient les patients qui ont besoin d'un traitement pour des troubles de santé mentale.
 © MSF
Dans le cadre du programme de santé mentale de MSF au Libéria, des agents de proximité identifient les patients qui ont besoin d'un traitement pour des troubles de santé mentale. © MSF

La demande de traitement en santé mentale est déjà forte à West Point, une zone urbaine située sur une étroite péninsule côtière et surpeuplée. MSF, le ministère de la Santé et le Conseil catholique national de la santé travaillent dans le centre de soins de santé primaire Star of the Sea.

Auparavant, plus du quart des patients en santé mentale de la ville voisine de Clara Town étaient des résidents de West Point. Avec le traitement désormais disponible localement, plus de patients sont attendus.

« La densité de population à West Point est très élevée, explique Justine Hallard, coordinatrice de projet MSF. Il y a parfois des inondations dans la région, les gens vivent dans des conditions très difficiles, dans des logements surpeuplés. Le stress peut conduire à un taux plus élevé de troubles mentaux. »

Comme dans d’autres endroits, le programme de santé mentale de West Point fait largement appel à des travailleurs locaux, appelés volontaires de santé communautaire gouvernementaux, pour rendre visite aux patients et effectuer un suivi par téléphone. 

« Les volontaires de santé communautaire du gouvernement sont vraiment la clé de cet effort, raconte Justine Hallard. Si nous augmentons le nombre de patients chaque mois, c’est grâce au travail extraordinaire de ces personnes. Elles savent parler avec les gens et les sensibiliser à la santé mentale, renforçant ainsi le rôle joué par les familles et les communautés pour aider les personnes qui ont besoin de soins. »

MSF fournit des médicaments dans cinq établissements de santé. Toutefois, les Libériens ne peuvent pas toujours se les procurer et l’approvisionnement peut être interrompu, ce qui conduit les patients à des rechutes.

Au Liberia, MSF gère actuellement un hôpital pédiatrique, l'hôpital de Bardnesville Junction, et le programme de santé mentale, qui a débuté en 2017.
 © marco garofalo
Au Liberia, MSF gère actuellement un hôpital pédiatrique, l'hôpital de Bardnesville Junction, et le programme de santé mentale, qui a débuté en 2017. © marco garofalo

C'est l'un des principaux défis auxquels sont confrontées les personnes souffrant de problèmes de santé mentale au Libéria, selon Benjamin Ballah, secrétaire général d'une organisation libérienne qui milite pour des services de santé mentale.

« Vous trouvez beaucoup de personnes atteintes de maladie mentale, explique Ballah. Nous demandons un soutien des programmes de santé mentale au niveau national. Vous ne pouvez pas construire un système de santé sans santé mentale. »

Selon le secrétaire général, la lutte contre la stigmatisation sociale est l'autre défi majeur. Les patients épileptiques sont également confrontés à ce type de stigmatisation en société, mais des traitements peuvent les aider. Avec le soutien de MSF, le personnel médical évaluent les patients épileptiques et fournit des médicaments qui permettent de contrôler les crises.

« Il y a une stigmatisation lorsque les gens ne peuvent pas contrôler leurs crises et ne peuvent pas vivre normalement, dit Justine Hallard. Les enfants qui souffrent d'épilepsie trop souvent ne peuvent pas aller à l'école parce qu'ils sont stigmatisés et ne jouent même pas avec d'autres enfants. Quand ils sont sous traitement, ils retournent à l'école et peuvent mener une vie normale. »

MSF a commencé à travailler au Libéria en 1990 et a fourni des soins médicaux pendant les années de guerre civile. En 2014, les équipes MSF sont intervenus pour lutter contre l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest. MSF gère actuellement un hôpital pédiatrique, l'hôpital de Bardnesville Junction, et le programme de santé mentale, qui a débuté en 2017.

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