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Afghanistan : le récit de la prise de la ville d’Hérat, par un médecin MSF

Vue d'un camp de personnes déplacées installé en bordure d'Hérat. MSF gère une clinique à proximité du camp. Afghanistan. 2019.
Vue d'un camp de personnes déplacées installé en bordure d'Hérat. MSF gère une clinique à proximité du camp. Afghanistan. 2019. © Andrew Quilty

Après des mois de combats à la périphérie d'Hérat en Afghanistan, les troupes de l'Émirat islamique d'Afghanistan, également appelés talibans, ont pris le contrôle de la ville le 12 août. MSF y gère un centre nutritionnel thérapeutique, une clinique pour personnes déplacées et un centre de traitement de la Covid-19. Un médecin afghan, employé par MSF, revient sur ces quelques jours qui ont bouleversé la vie des populations de la région, et sur les défis auxquels ont dû faire face les travailleurs de santé.

Lorsque les combats se sont approchés d'Hérat, les gens étaient inquiets. Moi aussi, ne sachant pas ce qu’il allait se passer. Lorsque les affrontements ont commencé à l'intérieur de la ville, de nombreuses personnes ont eu peur et sont restées chez elles. En seulement trois heures, la situation a basculé et l'Émirat islamique d'Afghanistan a pris le contrôle total de la ville.

Reprendre les activités

Pendant les combats, de nombreuses personnes ont été transportées à l'hôpital régional d’Hérat. Quand les habitants de la ville l’ont appris, ils sont montés sur leurs vélos et se sont rendus à l'hôpital pour donner leur sang. Il y a eu tellement de dons que les équipes de l’hôpital ont été obligées d’annoncer que les réserves étaient suffisantes et qu’elles passeraient un appel s’il en fallait de nouveau.

Le matin suivant la prise de la ville, je me suis rendu dans notre centre nutritionnel thérapeutique pour aider les équipes. Quand je suis arrivé sur place, ils n’étaient pas encore nombreux. Ils ne savaient pas quelle était la situation dans la ville et si nos activités se poursuivaient. Nous avons commencé par donner des médicaments à nos patients, puis nous avons contacté notre personnel pour leur faire savoir que la ville était ouverte et qu'ils pouvaient venir travailler en toute sécurité. Au bout de quelques heures, nous avons réussi à réunir toute notre équipe et nous avons continué à traiter les patients.

Certains de mes collègues m'ont raconté qu'en quittant leur maison pour venir travailler ce matin-là, leurs voisins, inquiets, leur avaient demandé : « Qu'est-ce que tu fais ? Il faut rester chez soi. » Mais notre travail est d'aider les gens, et notre présence était essentielle puisqu’un grand nombre d’établissements de santé étaient fermés.

Une jeune patiente dans la clinique MSF installée à proximité du camp de personnes déplacées d'Hérat. Afghanistan. 2019.
 © Andrew Quilty
Une jeune patiente dans la clinique MSF installée à proximité du camp de personnes déplacées d'Hérat. Afghanistan. 2019. © Andrew Quilty

Nous disposons de 42 lits permanents dans ce centre et nous avions augmenté la capacité de prise en charge en ajoutant 18 lits sous tentes. Malgré cela, nous sommes toujours en sous-capacité : c'était déjà le cas avant la prise de la ville par les talibans, c'était encore le cas après. Nous avons plus de 80 enfants malnutris dans le service, et ce chiffre ne cesse d’augmenter. Il y a quelque temps, nous avons pris en charge un enfant atteint de malnutrition dont la famille était extrêmement pauvre. Le père nous avait dit qu’il n’avait même pas 10 Afghanis (10 centimes d’euros) pour payer le trajet jusqu’à l’hôpital. Alors, ils ont été obligés de vendre leurs moutons et leurs vaches. Les soins que nous offrons à Hérat sont essentiels.

Un avenir incertain

Le premier dimanche après l’arrivée des talibans, de nombreuses personnes se sont rendues dans notre clinique installée à proximité d’un camp de déplacés à Hérat. La plupart des gens viennent des provinces de Badghis et de Farah. Nous avons d'abord commencé à travailler avec deux médecins, puis trois et maintenant quatre. Il y avait beaucoup de personnes qui venaient à la clinique. Un jour, un de nos médecins a examiné plus de 150 patients. Les autres organisations humanitaires internationales ont suspendu leurs opérations, pour des raisons de sécurité, ou parce qu’elles n’arrivaient pas à payer leurs salariés.

C'est une période incertaine. Les travailleurs de santé sont fatigués, ils travaillent très dur tout en espérant que cela va se calmer. Désormais, la principale inquiétude des équipes concerne la reprise des activités des autres établissements de santé, qui n’est pas garantie. Certaines recevaient des fonds de la Banque mondiale, mais celle-ci a arrêté ses financements. Sans cet apport, certaines structures de santé ne pourront pas continuer leurs activités. On sait que des travailleurs de santé de ces établissements cherchent déjà un autre emploi.

Notre responsabilité est de prendre en charge les personnes qui se présentent à nous. Mais actuellement, MSF est la seule organisation internationale à travailler à Hérat. Avant, nous pouvions orienter certains patients vers d'autres établissements de santé, maintenant nous avons le sentiment d’être leur seule option.

Aujourd'hui la situation est stabilisée, mais l'accès aux soins est toujours compromis dans de nombreuses régions du pays.

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