Hépatite C : MSF s’associe à l’opposition au brevet sur le sofosbuvir en Europe

Projet MSF de lutte contre l'hépatite C dans l'hôpital Preah Kossamak à Phnom Penh au Cambodge. MSF
Projet MSF de lutte contre l'hépatite C dans l'hôpital Preah Kossamak à Phnom Penh, au Cambodge. © MSF © MSF

Cette initiative vise à améliorer l’accès à ce médicament-clé pour le traitement de millions de personnes affectées par l'hépatite C.

Médecins Sans Frontières (MSF) a déposé aujourd’hui un dossier d’opposition au brevet du sofosbuvir, un médicament contre l’hépatite C, auprès de l’Office européen des brevets, afin d’améliorer l’accès à des traitements abordables contre la maladie. MSF s’associe ainsi à Médecins du Monde (MDM) et à d’autres organisations de la société civile dans 17 pays, qui ont toutes présenté des oppositions au brevet détenu par le laboratoire pharmaceutique Gilead sur le sofosbuvir, afin de lever les obstacles qui empêchent des millions de personnes de recevoir ce traitement.

« On estime que 80 millions de personnes sont atteintes d’hépatite C dans le monde, et elles devraient toutes pouvoir recevoir ce traitement, où qu’elles vivent, y compris en Europe, explique le Dr. Isaac Chikwanha, spécialiste de l’hépatite C à la Campagne d’Accès aux Médicaments Essentiels (CAME) de MSF. Le sofosbuvir est aujourd’hui hors d’atteinte pour des millions de patients car il est trop cher, et le traitement n’est pas disponible – ou il est rationné à cause de son prix – dans de nombreux pays d’intervention de MSF, comme la Russie, ou des pays dits ‘à revenus intermédiaires’ comme la Thaïlande et le Brésil. Un bon médicament ne sert à rien si les patients qui en ont besoin ne peuvent y accéder. »

Le sofosbuvir est un élément-clé de la plupart des combinaisons thérapeutiques pour le traitement de l’hépatite C. Il fait partie des antiviraux à action directe qui, depuis leur arrivée sur le marché il y a quatre ans, ont permis d’améliorer drastiquement les taux de guérison des patients. Mais en Europe, les prix pratiqués par Gilead atteignent les 55 000 € pour un traitement de douze semaines, tandis qu’aux Etats-Unis, le prix initialement fixé par Gilead était de 84 000 dollars par traitement, soit environ 1 000 dollars par comprimé. Or des études ont montré que le coût de production d’un comprimé de sofosbuvir est inférieur à un euro.

« Le brevet sur le sofosbuvir garantit une situation de monopole à Gilead, et empêche l’accès à des traitements abordables, y compris par des médicaments génériques, en Europe et ailleurs, précise Aliénor Devalière, spécialiste des politiques européennes pour la CAME de MSF. Or ce brevet peut – et doit – être attaqué : les connaissances scientifiques qui ont permis la mise au point du sofosbuvir ne sont pas nouvelles. »

L’accès à des traitements abordables pour l’hépatite C est devenu un enjeu global. Les pays où Gilead détient le monopole du sofosbuvir ne peuvent importer ou produire des versions génériques du médicament ; dans certains pays dits ‘à revenus intermédiaires’, ce sont des accords de licence volontaire particulièrement restrictifs mis en place par Gilead qui privent de nombreux patients de ce traitement. Attaquer le brevet ou s’y opposer, c’est espérer qu’il soit ainsi révoqué ou que sa durée de validité soit raccourcie, permettant l’arrivée de médicaments génériques et une réduction drastique des prix. Des brevets sur le sofosbuvir ont déjà été révoqués en Chine et en Ukraine, tandis que d’autres jugements sont attendus en Argentine, en Inde, au Brésil, en Russie et en Thaïlande, entre autres.
 

Des copies des oppositions au brevet présentées par MSF et les autres organisations seront disponibles sur le Patent Oppositions Database : www.patentoppositions.org/en/drugs/sofosbuvir


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