Syrie : à Idlib, le bombardement des structures de santé, «un pas de plus vers le désastre»

Idlib: Newly displaced persons  Janvier 2018
Idlib: Newly displaced persons - Janvier 2018 © Omar Haj Kadour

Dans le sud du gouvernorat d’Idlib, les combats intenses opposant les forces gouvernementales syriennes et leurs alliés, et des groupes d’opposition armés, ont entraîné depuis décembre le déplacement de dizaines de milliers de familles venues grossir les rangs des centaines de milliers de personnes déjà déplacées dans le nord du gouvernorat. En parallèle, au centre et au nord d’Idlib, les infrastructures civiles dont les structures médicales sont frappées par des bombardements aériens. Omar Ahmed Abenza, chef de mission pour MSF dans le nord-ouest de la Syrie, donne un aperçu de la situation aujourd’hui.

« Hier, un centre de santé à Mishmishan, situé dans la région d’Idlib, dans le nord-ouest de la Syrie, a été touché par une frappe aérienne. C’est un pas de plus vers le désastre : les zones civiles – et plus particulièrement les structures de santé – sont touchées par des frappes aériennes qui atteignent un niveau d’intensité alarmant dans le nord-ouest du pays.

A Mishmishan, MSF soutenait les activités de vaccination du centre de santé. Au deuxième semestre 2017, l’équipe a vacciné plus de 10 000 enfants. Ce service est désormais en ruines. La partie du centre dédiée aux activités de vaccination a été fortement endommagée, et les réfrigérateurs contenant les stocks de vaccins ont été détruits.

Six personnes ont été tuées par cette frappe aérienne, tous des patients et leurs proches, et 17 personnes ont été blessées, dont trois membres du personnel du centre de santé. Le bilan aurait pu être bien plus lourd si l’équipe de vaccination, qui menait des activités de sensibilisation auprès de la population dans un des villages alentour, avait été au centre ce jour-là.

Les blessés ont été pris en charge à l’hôpital de référence de Qunaya, soutenu par MSF. Craignant que l’hôpital soit à son tour bombardé, l’équipe médicale a décidé de réduire ses services, et renvoyé les patients stables chez eux. Ne reste sur place qu’une équipe réduite afin de continuer à gérer le service des urgences et la salle d’opération.

Le bombardement des structures de santé a un effet domino dramatique : un nombre croissant de personnes a besoin de prise en charge médicale, mais il reste de moins en moins de structures de santé, et celles qui restent fonctionnelles sont en général dépassées. Les consultations sont alors conduites à la hâte, le risque d’erreurs de diagnostics augmente, les options de référencement pour les cas les plus critiques sont davantage difficiles à envisager, et parfois même impossibles.

Notre équipe médicale, qui fait des consultations dans les camps de déplacés, rencontre des personnes démunies, à la recherche d’abri pour se protéger du froid, rassemblées sous des tentes, ayant parfois parcouru des dizaines de kilomètres pieds nus, pour fuir les combats ou le risque de bombardements. Les problèmes de santé les plus courants que nos équipes constatent sont les infections des voies respiratoires et les maladies chroniques, comme le diabète ou l’hypertension. Les besoins de santé sont loin d’être couverts : aujourd’hui, dans le nord du gouvernorat d’Idlib, nombreux sont ceux qui n’ont pas la possibilité de voir un infirmier ou un médecin.

La situation empire de jour en jour, et la première urgence est l’arrêt des bombardements sur la population civile et sur les structures de santé. »

MSF est l’une des organisations médicales qui soutient le centre de santé de Mishmishan, en dotation d’équipement médical et de médicaments. Depuis décembre, le soutien de MSF s’est concentré sur le service de vaccination de la structure, à travers la formation et la rémunération des équipes de vaccination, l’équipement du service et l’approvisionnement en vaccins. Dans le reste de la région d’Idlib, trois équipes MSF ambulatoires mènent des consultations médicales, et une équipe effectue des distributions ponctuelles de kits d’hygiène et de survie pour les personnes déplacées. MSF a également signé un accord de partenariat avec l’hôpital de Qunaya, à qui elle apporte un soutien complet. MSF soutient aussi, à distance et à différents niveaux, plusieurs autres hôpitaux et centres de santé syriens dans la région. 

À lire aussi