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RDC : la vaccination, nouveau front de la lutte contre Ebola à Beni

Joseph MbokaniI Kambale, l’un des agents de sensibilisation déployés par le dispositif national de réponse à Ebola, répond aux questions des participants. Les craintes et les rumeurs découragent de nombreuses personnes de se faire vacciner. République démocratique du Congo. 2019. 
Joseph MbokaniI Kambale, l’un des agents de sensibilisation déployés par le dispositif national de réponse à Ebola, répond aux questions des participants. Les craintes et les rumeurs découragent de nombreuses personnes de se faire vacciner. République démocratique du Congo. 2019.  © Samuel Sieber/MSF

Beni, dans la province du Nord-Kivu, est l'un des principaux foyers de l'épidémie d’Ebola en cours en République démocratique du Congo (RDC). Depuis plus d'un an, la réponse à l'épidémie se déploie dans la ville. Sur place depuis les premiers jours de l'épidémie, Médecins Sans Frontières (MSF) a récemment commencé à soutenir les activités de vaccination, un outil prometteur dans la lutte contre la maladie. Mais atteindre les bonnes personnes à temps s’avère complexe.

Esther cligne à peine des yeux lorsqu'un médecin de l'équipe de vaccination lui injecte le vaccin expérimental Ebola appelé rVSV-ZEBOV dans le bras gauche, à Kimbangu, un village au sud-ouest de Beni. Justin*, son fils de deux ans et demi, éclate en sanglots lorsqu'il voit qu’une autre seringue est remplie et ne se calme que quelques minutes après avoir reçu son injection. Le vaccin provoque une petite douleur dans le bras, mais les effets secondaires sont généralement légers et les premiers résultats montrent que le vaccin offre une protection efficace à 95 % des participants après dix jours.

Esther et son fils se sont rendus sur l'un des trois sites de vaccination mis en place chaque jour par MSF à Beni, dans le cadre des efforts renouvelés pour contenir Ebola, en collaboration avec les équipes d'intervention du ministère de la Santé et de l'Organisation mondiale de la Santé. « Il y a eu des cas confirmés d'Ebola dans mon quartier, et une équipe de surveillance m'a dit que nous devrions nous faire vacciner car nous sommes probablement des contacts », explique Esther. 

La mise en place des sites de vaccination suit une routine bien coordonnée. Une série de tables en plastique sont alignées à côté d'une salle d'attente, des formulaires d'inscription et de consentement sont mis en place et l'équipe de vaccination s'habille avec des tenues de protection. Ensuite, un véhicule MSF livre les premiers flacons du vaccin dans une boîte réfrigérée, et un membre de l'équipe de surveillance commence à identifier les personnes qui correspondent aux critères d’éligibilité.

© Samuel Sieber/MSF
© Samuel Sieber/MSF

Les cas d'Ebola sont en baisse à Beni depuis fin août 2019, mais de nouveaux cas suspects et confirmés sont néanmoins admis chaque jour dans les zones d'isolement des centres de santé de la ville, ou dans le centre de traitement Ebola (CTE) géré par MSF. Déjà deux fois, en décembre 2018 et juin 2019, l'épidémie semblait être contenue, mais le nombre de cas est ensuite reparti à la hausse.

Ebola reste une maladie mortelle. Malgré la disponibilité d'un vaccin pour prévenir les infections et de nouveaux traitements pour les patients confirmés, plus de 3 100 personnes ont été infectées depuis le début de cette dixième et plus grande épidémie en RDC, et plus de 2 100 sont mortes à la mi-septembre. Les patients symptomatiques présentant de la fièvre, de la diarrhée ou des vomissements sont infectieux et doivent être isolés et traités le plus rapidement possible. Pourtant, dans l'ensemble du Nord-Kivu, le délai moyen entre la suspicion et le diagnostic d'un cas d'Ebola est de cinq jours, pendant lesquels les malades voyagent souvent et peuvent visiter plusieurs centres de santé. 

L'identification et la vaccination de contacts comme Esther et Justin sont donc fondamentales pour protéger les personnes à risque et représentent l'un des principaux défis pour contenir l'épidémie. Trois équipes MSF ont collaboré à la vaccination de 700 personnes au cours des deux premières semaines de vaccination et plus de 51 000 personnes ont été vaccinées à Beni par la réponse nationale Ebola et ses partenaires jusqu'à maintenant.

Un membre des équipes MSF se prépare à entrer dans la zone à haut risque du centre de traitement Ebola de Beni. République démocratique du Congo. 2019. 
 © Samuel Sieber/MSF
Un membre des équipes MSF se prépare à entrer dans la zone à haut risque du centre de traitement Ebola de Beni. République démocratique du Congo. 2019.  © Samuel Sieber/MSF

Néanmoins, en raison de l'utilisation restreinte et du statut expérimental du vaccin, la stratégie de vaccination dans le Nord-Kivu se limite actuellement à une approche dite “en anneau”. Seuls les contacts directs et indirects de cas probables et confirmés Ebola ou de travailleurs de première ligne comme les médecins et le personnel humanitaire sont ciblés par la campagne actuelle. Les équipes nationales de surveillance ne parviennent toutefois à retracer qu'un quart des contacts connus et probables – les autres ne sont toujours pas identifiés ou ne font l'objet d'aucun suivi. MSF a appelé à la création d'un comité international indépendant chargé d'évaluer et d'étendre la stratégie de vaccination et de gérer l'approvisionnement en vaccins de manière plus transparente.

« Nous aimerions élargir notre stratégie de vaccination et être plus flexibles pour répondre plus rapidement dans les zones sanitaires avec des cas confirmés Ebola, mais nous sommes actuellement limités à un nombre fixe de doses quotidiennes et travaillons dans des sites de vaccination prédéfinis », précise Joseph Musakane, responsable de cette activité pour MSF.

Les craintes et les rumeurs persistantes concernant le vaccin dans les communautés locales posent un défi supplémentaire aux équipes de vaccination. « Beaucoup de gens croient que la piqûre provoque l'impuissance, la maladie mentale, ou même Ebola, détaille Joseph MbokaniI Kambale, l’un des agents de sensibilisation déployés par le dispositif national de réponse à Ebola. D'autres confondent les symptômes d'Ebola avec une autre maladie ou suspectent un empoisonnement, et nous devons souvent convaincre les gens de venir se faire vacciner. »

Une vaccination Ebola dans le centre de santé de Kanzulinzuli à Beni, soutenu par MSF. République démocratique du Congo. 2019. 
 © Samuel Sieber/MSF
Une vaccination Ebola dans le centre de santé de Kanzulinzuli à Beni, soutenu par MSF. République démocratique du Congo. 2019.  © Samuel Sieber/MSF

Rendre le traitement plus accessible et établir un climat de confiance avec la population locale s'est avéré tout aussi important pour les patients présentant des symptômes d'Ebola au début de l’épidémie. Dans un premier temps, les équipes MSF intervenaient dans un grand centre de transit de référence pour les cas suspects, mais elles se sont vite aperçues que les capacités d'isolement seraient beaucoup mieux positionnées au plus près des communautés. « Nous avons commencé à intégrer des petites structures d'isolement dans six des dix-huit centres de santé de Beni, où les patients et les cas suspects se sentaient plus à l'aise à l'époque », explique Tristan Le Lonquer, coordinateur du programme d’urgence de MSF à Goma. 

Les centres de santé sont désormais aussi de possibles sites de vaccination, offrant un espace sécurisé et abrité à proximité des communautés. En même temps, MSF renforce les services de soins de santé primaires existants dans les centres. « Nous soutenons les consultations ambulatoires, les maternités ou les activités de laboratoire, qui sont des services nécessaires et qui risquent d'être négligés pendant la réponse à Ebola », ajoute Tristan.

Un deuxième vaccin expérimental, nécessitant deux doses administrées à 56 jours d'intervalle, vient d'être approuvé en RDC dans le cadre d'un essai clinique, et MSF et son centre de recherche Epicentre font partie du consortium international qui guide l’essai.

À Beni, mettre fin à l'épidémie d'Ebola reste une tâche complexe. MSF n'a repris que récemment le centre de traitement Ebola qui dispose de 13 cubes d'isolement pour les soins d'urgence, trois grands services d'isolement pouvant accueillir jusqu'à 40 patients et où travaillent plus de 160 personnes. 

« Pour briser la chaîne de transmission, nous devons étendre notre approche de vaccination, offrir des possibilités intégrées d'isolement et de traitement, disposer d'un CTE de référence, mais aussi répondre à d'autres besoins de santé et établir une relation de confiance avec la communauté locale. Nous devons être présents sur tous les fronts pour gagner le combat contre Ebola », conclut Tristan Le Lonquer. 

* Les noms des personnes ont été changés pour des raisons de confidentialité.

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