Niger - Une malnutrition cachée mais pourtant bien réelle
Lundi 23 mai à Maradi, Niger, avec les équipes MSF.
Chronique d'une journée ordinaire.
Les premiers à quitter la maison MSF sont Gonzague et Véronique, jeunes médecin et infirmière. Ils vont retrouver leur équipe d'infirmières et d'assistantes nutritionnelles nigériennes et partir pendant deux jours en brousse. Leur mission sera d'identifier dans des villages de la région des enfants sévèrement malnutris et de débuter un traitement médical et nutritionnel adapté à leur état de santé. Ils feront aussi la consultation hebdomadaire d'enfants déjà inclus dans le programme de prise en charge de la malnutrition sévère. Chaque enfant sera pesé, ausculté et recevra les soins nécessaires. Des compléments nutritionnels seront aussi distribués pour que l'enfant reprenne du poids.
Alors que le docteur Innocent fait sa tournée de consultations, la jeune médecin Vanessa se concentre sur les cas les plus sévères du service des soins intensifs. Au bout de quelques heures, ils se retrouveront pour discuter de quelques cas particulièrement inquiétants. Que faire pour la petite Yassera qui est hospitalisée depuis trois mois pour soigner sa tuberculose ? Ils soupçonnent qu'elle ait contracté une méningo-encéphalite virale.
Depuis le début de sa mission à Maradi, Vanessa qui se spécialise à Rouen en cancérologie pédiatrique va de surprise en surprise : ces enfants de un an qui pèsent à peine plus de trois kilos (le poids d'un nouveau né) alors qu'ils devraient en peser aux alentours de six. Cette hypotrophie est particulièrement difficile à voir, donnant à ces jeunes enfants un visage de vieillard au regard insoutenable.
Dounia, pharmacienne nouvellement arrivée, prend connaissance des stocks de médicaments de la mission et identifie les produits qu'il faudra commander. Mego, le nouveau médecin responsable du programme MSF dans la région de Maradi va rencontrer le médecin directeur de l'hôpital public pour se présenter. Ils discuteront particulièrement du suivi de la douzaine d'enfants tuberculeux qui sont soignés dans le centre MSF.
A 11 heures, Théo revient de sa consultation hebdomadaire sur Tiberi, un village proche de Maradi, avec huit enfants nécessitant une hospitalisation. Il confie rapidement les enfants et leur dossier aux infirmiers du centre et repart aussitôt sur Tiberi pour rejoindre son équipe qui poursuit les consultations.
L'après midi a été particulièrement dur au service des soins intensifs du centre MSF de Maridi. Quatre enfants sont décédés malgré les soins qui leur étaient prodigués. Deux venaient juste d'arriver dans un état catastrophique. Les deux autres étaient là depuis plusieurs jours. L'un d'eux avait la rougeole, ce qui aggravait sa malnutrition. Sa mère avait déjà perdu deux enfants à cause de la rougeole.
Perdre des enfants est une énorme frustration. Mais c'est heureusement en partie compensé par la joie de voir les enfants qui étaient des squelettes lors de leur arrivée retrouver un poids normal et de bonnes joues. En effet, surtout sans pathologie associée, les enfants récupèrent vite et en une semaine ils peuvent quitter le centre et continuer à être suivis en ambulatoire.
En fin de journée, Vanessa et Innocent feront le point avec leur quatre collègues médecins nigériens qui assurent les gardes de jours et de nuit au service de soins intensifs.
L'équipe se retrouve à la maison MSF et partage les informations de la journée. Les logisticiens sont très excités car le dispositif pour commencer à distribuer les centaines de tonnes de nourriture est prêt. Les familles des enfants admis dans le programme Médecins Sans Frontières vont recevoir chaque semaine une ration de cinq kilos de farine et un litre d'huile pour préparer le repas familial. Fournir des compléments nutritionnels aux enfants ne suffit plus quand il n'y a plus rien à manger à la maison. A la fin du traitement, les familles partiront avec une ration alimentaire pour un mois, à base de céréales, de haricots et de d'huile.
Pourvu que d'autres agences d'aide viennent rapidement. Compte tenu du nombre important d'enfants sévèrement malnutris à prendre en charge, les programmes MSF n'incluent pas les enfants souffrant de malnutrition modérée. Ceux-ci pourtant nécessitent d'être suivis, et il est donc urgent que d'autres organisations s'y attachent.