Iran - Aider les rescapés du séisme

Cinq jours après que la ville de Bam, en Iran, a été frappée par un
séisme d'une magnitude de 6.3 sur l'échelle de Richter, l'espoir de
retrouver des survivants s'amenuise et les recherches touchent à leur
fin. Cette urgence passée, il faut désormais faire face à d'autres
besoins: prendre en charge les rescapés qui se retrouvent aujourd'hui
dans une situation d'immense précarité, sous tente, en plein hiver,
démunis de tout... C'est maintenant que les traumatismes psychologiques
- consécutifs au séisme - sont susceptibles d'émerger.

Dès le vendredi soir, Médecins Sans Frontières (présente en Iran depuis 1995) s'est rendue sur place. Le constat qui a été fait par notre équipe est que, malheureusement, la majorité des victimes est décédée.

Le dernier bilan fait état de plus de 30.000 morts. On évalue à 20.000 le nombre de personnes rescapées toujours présentes en ville, une majorité d'entre elles ayant d'ores et déjà quitté Bam pour aller s'installer dans leurs familles, ailleurs. Ceux qui restent vivent et dorment sous des tentes.
Les autorités iraniennes sont à la recherche de sites où monter et organiser des camps pour accueillir ces personnes, en attendant la réhabilitation des habitations. Mais beaucoup de rescapés refusent de quitter les ruines de ce qui a été leur maison, pour rejoindre ces sites. Des couvertures leur ont été fournies, des points d'eau ont été installés (assez nombreux pour éviter les files d'attente), 2 à 3 bouteilles d'eau minérale sont données par personne et par jour et la nourriture est également correctement distribuée. Il semble donc que les besoins vitaux soient relativement bien couverts et que, pour le moment, les risques d'épidémies soient faibles.


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L'urgence est maintenant de prendre en charge les rescapés.
© Photo : Tim Dirven

La majeure partie des blessées a été transférée vers les hôpitaux d'autres villes : Mashad, Zahedan et Téhéran. Ainsi, il y a actuellement 350 blessés dans l'hôpital de Kerman (qui en avait reçu 7.000 au moment de l'urgence), à 200 km au nord de Bam, où la prise en charge médicale est très efficace et réactive. Nous avons évalué la situation dans ces hôpitaux : seul du matériel spécifique nous a été demandé et en petite quantité (matériel pour pansements). Il n'y a plus aujourd'hui de blessés graves en attente de soins et, dans les trois hôpitaux de campagne qui ont été montés à Bam juste après la catastrophe (par le Croissant rouge, le gouvernement français, etc.), l'activité s'est ralentie, voire a cessé.

Malgré l'arrivée en masse de nombreux acteurs de l'aide, l'organisation des secours reste aléatoire, notamment en ce qui concerne les distributions de matériel non-alimentaire (couvertures, tentes...). Médecins Sans Frontières a donc mis en place deux équipes mobiles, afin d'identifier, dans différents quartiers de la ville, les populations qui auraient été éventuellement écartées de ces distributions massives et chaotiques, et de déterminer les besoins en eau, en nourriture, en couvertures, et les conditions d'hygiène des populations.

A l'avenir, le problème majeur qu'il nous faudra gérer à Bam sera le maintien de l'hygiène. Nous allons également nous concentrer sur l'accès aux soins de santé primaire, via des consultations mobiles, des distributions ponctuelles et assurerons l'approvisionnement en eau de certaines structures.

Médecins Sans Frontières a également mené des explorations dans trois villages situés plus au sud de l'épicentre. La situation n'y est pas catastrophique, il n'y a eu que peu de dégâts et les rescapés ont été pris en charge. Certains centres de santé ont été fermés, le personnel médical s'étant déplacé sur Bam au moment de l'urgence. Nous allons donc assurer l'intérim médical en attendant leur retour et continuerons à évaluer la situation dans les villages encore non-vus et aux endroits où la population de Bam se regroupera, à terme.

Du matériel de secours a été acheminé sur place (en provenance de Bagdad, Dubaï, Téhéran et de notre base logistique de Bordeaux) : tentes-dispensaires, couvertures, matériel d'aduction de l'eau, kits chirurgicaux et médicaux, 10 tonnes de médicaments et de matériel d'hygiène, ainsi que 15 tonnes de biscuits protéinés...


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Hôpital de Kerman
© Photo : Tim Dirven

Trois néphrologues ont mené une évaluation à Kerman, où ils n'ont pas détecté d'arrivée massive de cas de "crush syndrome". Au lendemain d'un tremblement de terre, ce syndrome apparaît fréquemment chez les blessés, après leur dégagement. Il s'agit d'une insuffisance rénale aiguë, causée par l'écrasement des masses musculaires qui libèrent alors leurs substances. La réponse à ce type de syndrome, fatal dans un cas sur deux, est la dialyse, soit une reprise de la fonction rénale par voie artificielle. Cette évaluation du service de néphrologie de l'hôpital de Shafa (capacité de 350 lits et centre de référence en matière de dialyse pour la province de Kerman), a révélé que les 13 machines de dialyse étaient toutes occupées, pendant qu'environ 20 patients (malades chroniques et victimes de Bam) étaient en attente. L'équipe médicale de l'hôpital est compétente et bien formée. Médecins Sans Frontières a pris la décision de faire venir de Bruxelles 6 machines de dialyse supplémentaires qui seront sur place mercredi matin.

Enfin, deux psychiatres de Médecins Sans Frontières partiront vendredi, faire une évaluation des besoins en santé mentale et, si besoins il y a, mettre en place un programme d'aide psychologique aux personnes traumatisées par le séisme. Ils viendront renforcer notre équipe, constituée de 13 personnes, actuellement présente à Bam.

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