Haïti : un hôpital de traumatologie au cœur des violences à Port-au Prince

MSF Tabarre
Radiographie du thorax de Dourgé, 37 ans. Il se trouve aux soins intensifs du service de traumatologie de l'hôpital de Tabarre depuis 5 jours. Agent de sécurité, il est arrivé aux urgences le 5 décembre 2019, suite au braquage de la banque pour laquelle il travaille à Croix-des-Missions. Avant de prendre la fuite les assaillants lui ont tiré dessus à deux reprises. Une des deux balles s’est logée dans sa cage thoracique. Trop près de la colonne vertébrale, cette dernière ne peut être retirée et lui paralyse la jambe droite. Père de 2 enfants, il a commencé à travailler comme agent de sécurité 4 mois auparavant, mais la crise économique et politique actuellement en cours dans le pays l'empêchait parfois de se rendre sur son lieu de travail. © Leonora Baumann

Au cours des trois mois qui ont suivi son ouverture, l'hôpital de traumatologie de Tabarre, géré par Médecins Sans Frontières (MSF) à Port-au-Prince, a admis plus de 360 ​​patients nécessitant des soins vitaux, dont plus de 220 patients blessés lors des épisodes de violence dans la capitale.

« Depuis l'ouverture de l'hôpital de Tabarre, fin novembre 2019, nous avons constaté quotidiennement l'impact dévastateur de la violence - des combats entre gangs à la violence associée aux manifestations politiques - sur la vie des habitants de Port-au-Prince et au-delà », raconte Hassan Issa, chef de mission MSF en Haïti. En effet, depuis septembre 2019, d'importantes manifestations, souvent violentes, ont lieu dans la capitale, en contestation de la hausse du coût de la vie et du manque d'opportunités économiques. 

« Le nombre de blessures graves dues à la violence que nous avons traitées reflète la situation désastreuse qui règne aujourd'hui dans les zones urbaines d'Haïti, où fusillades, détournements de voitures et enlèvements se produisent régulièrement », renchérit Hassan Issa. 

Anderson Alexandre, 30 ans, père de deux enfants, a reçu deux balles dans le pied lors d'une fusillade le samedi 21 décembre 2019 dans le quartier Delmas de Port-au-Prince alors qu'il était en train d'acheter de l'eau pour sa famille. Il a été transporté à l'hôpital MSF de Tabarre pour y être soigné.
 © Nico Dauterive/MSF
Anderson Alexandre, 30 ans, père de deux enfants, a reçu deux balles dans le pied lors d'une fusillade le samedi 21 décembre 2019 dans le quartier Delmas de Port-au-Prince alors qu'il était en train d'acheter de l'eau pour sa famille. Il a été transporté à l'hôpital MSF de Tabarre pour y être soigné. © Nico Dauterive/MSF

MSF a rapidement doublé la capacité de l’hôpital en passant à 50 lits afin de pouvoir prendre en charge davantage de patients. Depuis lors, l'hôpital tourne quasiment à plein régime, avec des pics d'admission sporadiques à la suite d'incidents violents majeurs ou d'accidents. 

En trois mois, l'équipe de traumatologie a pris en charge des patients de nombreux quartiers de Port-au-Prince et des alentours ; principalement pour des blessures par balle et des accidents de la circulation.

L'hôpital est ouvert quotidiennement pour répondre aux besoins de la population. Lorsque nécessaire, MSF met en place des trajets accompagnés pour le personnel afin d'assurer un service 24h / 24, malgré les barrages routiers armés et un couvre-feu dans toute la ville, mis en place ponctuellement, comme il y a peu suite à une fusillade meurtrière entre l'armée et des manifestants de la police. Outre les soins d'urgence, des consultations de suivi et de physiothérapie en ambulatoire sont proposées aux patients depuis janvier.

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