Venezuela : apporter des soins aux communautés indigènes isolées

Une équipe MSF se prépare pour des visites médicales dans l'État du Delta Amacuro. Venezuela. 2023.
Une équipe MSF se prépare pour des visites médicales dans l'État du Delta Amacuro. Venezuela. 2023. © Matias Delacroix

Depuis juillet 2022, les équipes de MSF travaillent  avec les autorités locales pour apporter des soins de santé aux communautés indigènes isolées de l’État du Delta Amacuro au Venezuela. L’accès à ces populations est un défi en soi : la plupart vivent dispersées le long des rives de l’Orénoque, un fleuve qui est aujourd'hui la principale voie de communication de la région.

Adelia, âgée de 18 ans, est enceinte de 38 semaines. Elle n’a bénéficié d’aucun examen prénatal. Membre de la communauté Warao, elle avait prévu, dès le début des douleurs de l’accouchement, de rendre visite au wisirato, un guérisseur spirituel et pourvoyeur de médecine traditionnelle. Mais lorsque les contractions ont commencé, elles étaient si fortes qu’Adelia a pris peur.

La veille, elle avait remarqué deux bateaux de Médecins Sans Frontières qui naviguaient sur le fleuve Orénoque. Ils étaient en route pour fournir des soins médicaux dans la communauté voisine de Nabasanuka. Après avoir persuadé sa mère de l’accompagner, elles ont pagayé pendant deux heures sur leur bateau, pour se rendre à la clinique de Nabasanuka.

Adelia et son enfant. Venezuela. 2023.
 © Matias Delacroix
Adelia et son enfant. Venezuela. 2023. © Matias Delacroix

Adelia a été considérée par le personnel de santé comme présentant un risque élevé, en raison de son âge et de l’absence de suivi pendant sa grossesse. Malgré cela et en dépit des limites d’un centre de santé ne disposant que d’installations de base, Adelia a pu donner naissance dans de bonnes conditions à son fils, quelques heures après son arrivée.

Pour atteindre les cliniques où elles prodiguent des soins, les équipes de MSF doivent voyager par bateau à moteur pendant au moins six heures depuis Tucupita, la capitale de l’État. De leur côté, les patients doivent souvent pagayer sur leurs canoës pendant des heures, voire des jours, pour consulter un médecin.

Une enfant souffrant de fièvre en consultation avec un membre des équipe MSF. Elle a voyagé plusieurs heures en bateau avec sa famille pour se rendre à Nabasanuka et recevoir des soins. Venezuela. 2023.
 © Matias Delacroix
Une enfant souffrant de fièvre en consultation avec un membre des équipe MSF. Elle a voyagé plusieurs heures en bateau avec sa famille pour se rendre à Nabasanuka et recevoir des soins. Venezuela. 2023. © Matias Delacroix

Les communautés indigènes de cette région souffrent entre autres de plusieurs maladies évitables causées par les conditions précaires dans lesquelles elles vivent et par les multiples obstacles qu’elles rencontrent pour accéder aux soins de santé. Il s’agit notamment de maladies transmises par l’eau, telles que les parasitoses et les diarrhées, de maladies propagées par les insectes, notamment par les moustiques, comme le paludisme, d’infections respiratoires, d’affections cutanées et de malnutrition. L’absence de soins prénatals et postnatals augmente également les risques pour les femmes enceintes et leurs bébés.

« Les difficultés à recruter du personnel dans ces endroits isolés et le manque de fournitures et de médicaments contribuent également aux difficultés rencontrées par les communautés pour obtenir des soins médicaux adaptés et de qualité », explique Carlos Dominguez, coordonnateur de projet MSF dans le Delta Amacuro.

Des membres de la communauté Warao attendent d'être reçus en consultation par un médecin MSF à la clinique de Nabasanuka. Venezuela. 2023.

 
 © Matias Delacroix
Des membres de la communauté Warao attendent d'être reçus en consultation par un médecin MSF à la clinique de Nabasanuka. Venezuela. 2023.   © Matias Delacroix

En collaboration avec les autorités locales, MSF travaille dans deux cliniques ambulatoires dans les communautés de San Francisco de Guayo et de Nabasanuka, toutes deux situées dans la municipalité d’Antonio Díaz, dans l’est de l’État. Trois semaines par mois, une équipe multidisciplinaire de MSF composée de médecins, d’infirmiers, de pharmaciens, de spécialistes de l’eau, de l’assainissement, de la logistique et de la promotion de la santé s’installe au point de santé, fournissant des soins médicaux généraux à environ 70 personnes par jour.

La promotion de la santé est un aspect important du travail de MSF à Delta Amacuro. « En informant les gens, il est possible de les sensibiliser à des pratiques saines, à une bonne hygiène et à la prévention des maladies, sans négliger les traditions de la communauté, explique Carlos Dominguez. Non seulement cela a un impact direct sur la santé des gens, mais cela favorise également l’autonomie de la communauté et une approche proactive de la santé. »

MSF organise également des transferts hospitaliers pour les patients et les patientes qui ont besoin de soins spécialisés. L’équipe médicale de MSF a par exemple récemment contacté les autorités sanitaires pour demander un bateau-ambulance depuis Tucupita pour un enfant de trois ans. Il avait besoin, en urgence, d'un traitement indisponible à Nabanasuka. Ses parents avaient pagayé pendant quatre heures pour l’amener jusqu’à la clinique, et il leur aurait fallu sept jours pour pagayer jusqu’à Tucupita, alors que le voyage en ambulance ne dure que six heures.

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