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Syrie : témoignage d'un chirurgien

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syrie capture ecran médecin 1 © MSF

"Nous essayons d’aménager ces hôpitaux, sans pouvoir respecter les normes habituelles. Il n’y a pas de respirateurs artificiels ni de matériel de stérilisation dignes de ce nom. Nous utilisons des pièces dans des maisons. Donc quoique vous essayiez d’avoir, vous ne pouvez atteindre les normes requises pour faire des opérations chirurgicales. Mais c’est le maximum qu’on peut faire. "

Mon nom a été enregistré par les services de sécurité et je suis recherché parce que je soignais les manifestants. Il y a trois types de cas parmi les blessés. Les premiers sont ceux qui pouvaient être traités à la clinique, principalement les personnes blessées par des balles de fusils. Ce genre de balles donne beaucoup d'éclats et des plaies multiples. Le traitement de ces plaies et des fractures ‐ comme la pose d’un plâtre ‐ peut aussi se faire à la clinique. Ce sont des choses simples.
Il y a ensuite les cas froids. Par exemple un patient avec une balle dans la jambe. Là, nous pouvons garder le blessé deux ou trois jours avant de l’envoyer à l'hôpital et nous nous coordonnons avec l'hôpital pour que l’opération consistant à enlever la balle soit faite clandestinement. Parce que si nous envoyons quelqu'un à l'hôpital et que la sécurité le découvre, il sera arrêté. Donc, pour les cas froids, nous stabilisons la blessure, puis en utilisant un faux nom ou un faux dossier médical, nous nous arrangeons pour que les patients soient opérés dans des hôpitaux.

Le troisième type de cas, ce sont les cas sévères. Avec ceux‐ci, nous n'avons pas le choix, on doit les emmener à l'hôpital. Et c’est le hasard qui fait que le patient est arrêté ou non par la sécurité. Mais toutes les informations sur le patient seront enregistrées par la sécurité : qui l’a traité, comment il a été blessé et tous les détails.

Dans les hôpitaux publics, il y a une procédure à suivre. Et avec cette procédure, le nom du patient est enregistré auprès de la sécurité et de ceux qui soutiennent le régime dans l'hôpital. Dans ce genre de circonstances, vous ne pouvez donc pas vraiment aider un patient.

Parfois, des médecins arrivent à traiter des cas simples et à les laisser sortir sans qu’ils soient vus ou enregistrés. Mais si une admission est nécessaire pour le patient, alors l'administration de l'hôpital en est informée et l’information transmise à la sécurité.

La plupart du personnel infirmier dans ces hôpitaux est pour le régime. Par exemple, ils commencent à dire en face d'un patient qu'ils vont amputer sa jambe parce qu'il est pour révolution. Parfois, ils insultent les patients, les frappent, et leur disent : « Vous voulez la liberté? C’est ça la liberté que vous voulez ? ». Parfois aussi, ils décident d’amputer parce que ces patients ne valent pas la peine, selon eux, d’être secourus ou d’avoir leurs membres sauvés.

Dans les hôpitaux publics, il y a du matériel et des médicaments. Mais le problème est que 95% des blessés ne vont pas dans les hôpitaux publics. Ils sont souvent soignés dans un hôpital mobile, dans la maison qu’ont choisie les gens du quartier pour mettre les blessés et décider de ce qu’il fallait faire. Evidemment, il n’y a pas assez d'hôpitaux mobiles, mais au moins nous pouvons essayer de les secourir ou d’opérer les cas urgents.

Voilà ce que nous faisons. Le patient est amené dans une maison, puis des gens l’emmènent après lui avoir bandé les yeux dans un autre endroit où il y recevra des soins. Même les médecins ne savent pas où sont ces hôpitaux mobiles. Eux aussi ont les yeux bandés et sont emmenés pour soigner les patients. Ni les patients ni les médecins ne savent où se trouvent les hôpitaux mobiles.

Nous essayons d’aménager ces hôpitaux, sans pouvoir respecter les normes habituelles. Il n’y a pas de respirateurs artificiels ni de matériel de stérilisation dignes de ce nom. Nous utilisons des pièces dans des maisons. Donc quoique vous essayiez d’avoir, vous ne pouvez atteindre les normes requises pour faire des opérations chirurgicales. Mais c’est le maximum qu’on peut faire.

Nous avons besoin de respirateurs artificiels ou d’appareils de ventilation mobiles ainsi que d’autres appareils pour être en mesure d’opérer dans les hôpitaux mobiles. Nous avons aménagé des blocs opératoires qui sont totalement dissimulés pour les utiliser quand la situation est vraiment explosive. Ce sont des pièces cachées dans des maisons qui ont été murées de sorte que si les forces de sécurité font une perquisition, elles ne découvrent pas la pièce. Ces blocs sont ouverts pour les cas sévères et graves ou quand il y a un nombre énorme de blessés.

Oui la violence augmente et le nombre de patients aussi. Et les armes utilisées sont pires. Maintenant nous avons des blessés touchés par des balles à fragmentation.

J'ai soigné un jeune homme qui avait reçu six balles. Il roulait en voiture avec sa famille et ne s'est pas arrêté au barrage. Alors ils ont tiré plusieurs fois sur la voiture.

Le niveau de violence varie, c'est pourquoi les cas varient en fonction de la gravité de la situation. Dans un cas, les forces de sécurité sont entrées dans le bloc opératoire et ont emmené le patient qui était sous anesthésie. C’était dans un hôpital privé.

Tant que je travaillais dans la clandestinité et que personne ne savait ce que j'aidais à soigner des blessés, ma vie n’était pas menacée. Mais dès que mon nom a été connu par les forces de sécurité, je n’étais pas prêt à mettre ma famille en danger. Ce dont on a le plus besoin, ce sont des appareils d'échographie, de tables d’opération mobiles, d’appareils de radiographie et de respirateurs artificiels.

Dossier de presse

Retrouvez tous nos témoignages de patients et de médecins syriens dans notre dossier de presse consacré à la situation en Syrie.

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