Soudan : MSF porte assistance à 50 000 nouveaux déplacés

Clinique mobikle MSF Soudan du Sud
Clinique mobikle MSF, Soudan du Sud © Kate Geraghty

De violentes attaques dans la région de Muhajariya depuis le début du mois d'octobre ont contraint au moins 50 000 civils ont fui vers la savane. Des villages ont été réduits en cendres, des civils blessés par balle, les points d'eau et de ravitaillement détruits. MSF a mis en place des centres de consultations fixes et ambulatoires, dispense des soins chirurgicaux aux blessés, et distribue matériel et nourriture aux déplacés.

Dans la savane aride du Sud-Darfour, sous un acacia épineux, quelques familles cherchent à se protéger du soleil implacable. Hommes, femmes et enfants sont assis parmi les maigres possessions qu'ils ont pu sauver dans leur fuite. Pour seul abri, ils ont attaché une couverture aux branches, créant un petit point d'ombre sur le sol poussiéreux.

Au cours de leurs déplacements à l'extérieur de Muhajariya, les équipes MSF ont rencontré des centaines de familles vivant ainsi, près de buissons et sous des arbres, dispersées sur des dizaines de kilomètres de territoire inhospitalier. L'eau se fait rare : la saison sèche a commencé, et certains n'ont d'autres choix que de boire l'eau stagnante des flaques qu'ils partagent avec le bétail.

Lors des consultations, les médecins et les infirmières de MSF constatent des signes de carences alimentaires. Les cas de diarrhées et de maladies cutanées se multiplient rapidement, et certains enfants sont déjà atteints d'infections respiratoires à cause des nuits froides.

Au moins 50.000 civils ont fui vers le refuge précaire que leur offre la savane, après une série de violentes attaques sur Muhajariya et les régions avoisinantes. Plusieurs n'en étaient pas à leur première fuite. Déjà déplacés, ils vivaient dans des conditions difficiles dans des camps en bordure de la ville.

107 blessés par balle, dont un quart de civils

Après une période relativement calme à Muhajariya, des combats et des conflits internes ont éclaté le 2 octobre dernier. Ces combats ont duré deux mois, ciblant souvent les civils, forçant un nombre croissant de personnes à fuir. Lorsque les équipes MSF ont pu circuler, elles ont trouvé des civils blessés par balles et passés à tabac, des villages rasés par les flammes, des points d'eau et des entrepôts de nourriture complètement détruits.

Un homme âgé, étendu sous un arbre, victime d'un coup de feu et d'une fracture ouverte du fémur, raconte : « dix personnes ont pénétré chez moi. Ils m'ont demandé de m'identifier et de leur dire si j'avais une arme, puis ils ont tiré sur moi, pris tout mon argent et brûlé ma maison. J'étais encore à l'intérieur quand ils y ont mis le feu. »

À partir du début d'octobre, la violence s'est poursuivie de façon intermittente. Dans certains cas, les gens qui avaient pris la fuite ont été attaqués une fois de plus et forcés à errer dans la région pour y trouver refuge. Depuis le début des affrontements, nos équipes ont soigné 131 blessés dans ces affrontements, dont 107 avaient été blessées par balle. Un quart étaient des civils.

Par moments, les patients de la clinique de Muhajariya ne se sentaient pas en sécurité. Quand, suite à un nouvel épisode de combats le 23 octobre, le personnel de MSF a dû se mettre à l'abri, 15 patients se sont enfuis de l'hôpital.

« Je ne vois pas où les déplacés peuvent aller »

Les équipes médicales de MSF sont quotidiennement confrontées aux souffrances, au désespoir de ces populations, qui malgré ces épreuves, tentent de poursuivre leur vie par tous les moyens, avec peu de ressources.

« Une femme m'a raconté qu'elle était dans sa maison avec ses sept enfants lorsque les combats ont éclaté, raconte Jonathan Henry, coordonnateur du projet de MSF à Muhajariya. Des hommes armés ont brûlé sa maison et tous ses biens. Ils ont tiré sur ses enfants alors qu'ils s'enfuyaient. Maintenant, elle a rejoint les déplacés et veut s'éloigner le plus possible de Muhajariya. Je ne vois vraiment pas où ils peuvent aller. »

Dans les endroits où ils se sentent en sécurité, les déplacés creusent dans les lits des rivières de petits puits de surface pour obtenir de l'eau. L'équipe MSF fournit de l'eau aux groupes les plus vulnérables en la transportant par camion et en réparant les installations locales. Mais les points d'eau s'épuisent dans plusieurs endroits.

« Nous avons de l'eau pour une semaine, c'est tout. Après, il faudra aller ailleurs pour en chercher, mais je ne sais pas où », confie une jeune fille de 16 ans, qui a pris la fuite pendant que des hommes attaquaient et brûlaient son village. Elle a raconté à MSF que quatre membres de sa famille ont été tués et que, depuis, les survivants vivaient sous un arbre.

Un besoin critique d'aide humanitaire

La saison des pluies a été abondante cette année, et la récolte est bonne, mais la plupart des gens ont peur de retourner chez eux. Les équipes MSF ont vu des champs partiellement récoltés, mais ce qu'il reste se gâte. Certains déplacés soignés par MSF ont été blessés alors qu'ils retournaient travailler dans leurs champs.

Les organismes d'aide ont distribué de la nourriture, mais la situation changeante et les déplacements continus des populations rendent difficile la tâche d'acheminer aux gens la nourriture dont ils ont besoin.

Au cours des dernières semaines, MSF a mis une clinique sur pied à Sileah (36 kilomètres au sud de Muhajariya) en vue de fournir une aide médicale à quelque 17.000 déplacés qui s'y sont regroupés.

MSF a démarré une campagne de vaccination contre la rougeole pour les enfants de 6 mois à 5 ans, a distribué 4.500 bâches de plastique, plus de 7.300 couvertures et de la nourriture. Même en tenant compte des efforts d'autres organisations d'aide, de l'ONU et du gouvernement soudanais, des dizaines de milliers de personnes ont toujours un besoin critique d'aide humanitaire, notamment de matériel d'abris de base, de nourriture et d'eau.

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