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Niger : le point sur la vaccination contre les épidémies de rougeole et de méningite

Des enfants attendent d'être vaccinés contre la méningite dans un centre établi dans leur village par MSF et le ministère de la Santé. Plus de 33 500 personnes de 2 à 29 ans ont été vaccinées pendant cette campagne. 
Des enfants attendent d'être vaccinés contre la méningite dans un site établi dans leur village par MSF et le ministère de la Santé. Plus de 33 500 personnes de 2 à 29 ans ont été vaccinées pendant cette campagne, en avril 2018.  © Elise Mertens/MSF

Miriam Alía est responsable de la vaccination et de la réponse aux épidémies chez Médecins Sans Frontières. Elle revient sur les épidémies de méningite C et de rougeole qui ont touché le Niger depuis début 2018.

Pourquoi ces épidémies de méningite C et de rougeole ont-elles eu lieu ?

Cette année encore, le Niger a été confronté à plusieurs épidémies de méningite C et de rougeole, deux maladies mortelles et hautement contagieuses. Même si la vaccination aurait dû permettre d’éviter ces deux épidémies, chaque cas présente une problématique différente.

Dans le cas de la méningite, il n'existe pas de vaccin abordable et efficace pour tous les sérogroupes de la maladie. En outre, la faible production des vaccins à l'échelle mondiale, lié au faible intérêt des laboratoires pharmaceutiques pour ces marchés, réduit leur utilisation à une mesure réactive lorsqu'une épidémie est déclarée. Par conséquent, ces délais supplémentaires de mise en œuvre sont des freins à la mise en place d’une campagne de vaccination efficace.

D'autre part, bien que le vaccin contre la rougeole soit inclus dans les programmes de vaccination systématique depuis 1974, la couverture vaccinale obtenue, soit la proportion de personnes vaccinées, est insuffisante pour éviter la transmission de la maladie.

Dans le cas de la méningite C, nous avons assisté ces dernières années à de grandes épidémies dans la région. La situation s'est-elle améliorée cette année ?

L'année a été plutôt calme dans la région souvent appelée ceinture de la méningite en Afrique. Toutefois, une importante pénurie demeure au niveau de la production de vaccins. Le Groupe international de coordination pour l’approvisionnement en vaccins, l'organisme qui gère les vaccins dont la production est faible pour les distribuer selon des critères épidémiologiques et d'équité, a cette année établi un stock minimum de cinq millions de vaccins pour le sérogroupe C de la méningite. Une fois de plus, il n’a pas été possible d’y parvenir et nous continuons à vacciner uniquement lorsque le seuil épidémique est franchi et non pas, comme il serait plus recommandable, de manière préventive ou dès que le niveau d'alerte [1] est atteint.

Un crieur public annonce le lancement de la campagne de vaccination aux habitants du village. Les activités de promotion de la santé sont fondamentales dans la mobilisation de la population et visent à assurer une meilleure couverture vaccinale.
 © Elise Mertens/MSF
Un crieur public annonce le lancement de la campagne de vaccination aux habitants du village. Les activités de promotion de la santé sont fondamentales dans la mobilisation de la population et visent à assurer une meilleure couverture vaccinale. © Elise Mertens/MSF

Pourquoi y a-t-il une pénurie de vaccins contre la méningite ?

Il existe différents types de méningite, on distingue les sérogroupes A, B, C, W135 et X, et aucun vaccin n'est efficace contre chacun d’entre eux. Pour l'instant, le meilleur vaccin disponible est le conjugué tétravalent, qui est efficace contre les quatre sérogroupes les plus courants actuellement, mais son coût est très élevé. Le Serum Institute of India travaille sur un vaccin conjugué pentavalent (A, C, Y, W-135, X) qui devrait être économique, efficace et sûr, mais qui ne sera pas disponible avant 2020. Dans la perspective d'un vaccin capable de couvrir tous les besoins, considérant qu’en général les vaccins ont des coûts très élevés, les autres laboratoires n'investissent pas dans la production de nouveaux vaccins de peur de ne pas les vendre.

Quelle a été la réponse à l'épidémie de méningite C au Niger ?

En collaboration avec le ministère de la Santé, nous avons vacciné plus de 30 000 personnes contre la méningite C dans la région de Tahoua et nous avons soutenu la prise en charge des malades. Nous avons été surpris de constater un tel pourcentage de cas du sérogroupe X, contre lequel aucun vaccin n'existe actuellement. Il s'agit d'une préoccupation majeure pour les années à venir.

© MSF
© MSF

Existe-t-il d'autres stratégies de prévention de la méningite C ?

De nouvelles stratégies de prévention ont été testées, comme l'administration d'une dose d'un antibiotique appelé ciprofloxacine. Cette méthode a été expérimentée au Niger en 2017 et une étude publiée sur la revue scientifique « PLOS Medicine » en juin 2018 a montré que, lorsque cet antibiotique est administré à tous les habitants d'une zone rurale, la transmission de la maladie est considérablement réduite. De futures études sont prévues pour mesurer l'impact de cette stratégie dans les milieux urbains. Il pourrait s'agir d'un outil supplémentaire face à de nouvelles épidémies, en particulier celles de faible envergure.

95 %

Pour prévenir la propagation de la rougeole, la protection de la population doit atteindre un minimum de 95 %, et ces taux de couverture sont difficiles à maintenir parmi cette population.

Et dans le cas de la rougeole, pourquoi le calendrier de vaccination systématique ne permet-il pas d’enrayer les épidémies ?

Le calendrier est très strict en ce qui concerne l'âge. Au Niger, le protocole national stipule que les enfants doivent être vaccinés jusqu'à 23 mois, mais les vaccins fournis par GAVI, l'Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination, permettent uniquement de couvrir les enfants de moins de 12 mois. La dose de rappel du vaccin contre la rougeole à 15 mois n'est donc pas inclue, et les enfants de plus d'un an qui arrivent au centre de santé ne sont pas vaccinés non plus.

Il convient également de garder à l'esprit qu'une grande partie de la population du Niger vit de la transhumance ou dans des zones touchées par le conflit, de sorte que les Nigériens ont peu accès à la vaccination offerte dans les centres de santé. Pour prévenir la propagation de la rougeole, la protection de la population doit atteindre un minimum de 95 %, et ces taux de couverture sont difficiles à maintenir parmi cette population.

Une femme est vaccinée dans un site de vaccination établi par MSF et le ministère de la Santé. 
 © Elise Mertens/MSF
Une femme est vaccinée dans un site de vaccination établi par MSF et le ministère de la Santé.  © Elise Mertens/MSF

Comment le taux de couverture pourrait-il être amélioré ?

Le calendrier de vaccination infantile devrait être plus flexible et se poursuivre jusqu'à l'âge de 5 ans. Tout contact d'un enfant avec le système de santé devrait être l'occasion de mettre à jour son carnet de vaccination.

Des campagnes de vaccination multiantigénique devraient aussi être menées pour protéger les enfants du plus grand nombre de maladies possible. Par exemple, nous répondons actuellement à une épidémie de rougeole à Arlit (Agadez) et, en plus de vacciner contre la rougeole, nous en profitons pour ajouter dans la même campagne le vaccin pentavalent [2]  et le vaccin antipneumococcique.

Dans la mesure du possible et si les vaccins sont disponibles, nous incluons également le vaccin contre le tétanos pour les femmes enceintes ou en âge de procréer. Ce vaccin requiert cinq doses et, dans des contextes tels que le Niger, la plupart des femmes ne les reçoivent pas toutes. Nous saisissons donc cette opportunité pour leur apporter, à elles et aux futurs nouveau-nés, une bonne protection. Il faut saisir chaque opportunité pour vacciner contre les maladies mortelles.

Depuis le début de l'année 2018, MSF, en collaboration avec le ministère de la Santé, a vacciné plus de 179 460 personnes au Niger : 145 843 enfants âgés de 6 mois à 15 ans contre la rougeole dans neuf centres de santé des régions de Tahoua et d'Agadez ; et 33 620 personnes âgées de 2 à 29 ans contre la méningite C dans trois centres de santé de la région de Tahoua. Actuellement, l'organisation mène une campagne de vaccination contre la rougeole à Arlit, Agadez, dans le but de vacciner plus de 50 000 enfants de moins de 5 ans ; parmi ces enfants, ceux de moins d'un an recevront également le vaccin pentavalent et antipneumococcique.

[1] Les seuils d'alerte et épidémique à respectivement 5 et 15 cas de méningite pour 100 000 habitants et par semaine dans localités de plus de 30 000 habitants. Le seuil épidémique peut être abaissé à 10 cas/100 000 habitants/semaine lorsque le risque d'épidémie est élevé.

[2] Diphtérie, coqueluche, tétanos, haemophilus influenzae type B et hépatite B.

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