Syrie : la réponse médicale dans la Ghouta orientale atteint ses limites, MSF demande un cessez-le-feu immédiat

(Photo d'archive) Deux ambulances détruites par un bombardement aérien, dans l'est de la Ghouta, en décembre 2016.
(Photo d'archive) Deux ambulances détruites par un bombardement aérien, dans l'est de la Ghouta, en décembre 2016. © MSF

MSF appelle à un cessez-le-feu immédiat pour soigner les victimes des bombardements intensifs en cours depuis le 18 février dans la Ghouta orientale.

Les hôpitaux et les cliniques soutenus par MSF ont fait état de plus de 2 500 blessés et plus de 520 morts, après cinq jours de bombardements intenses et de tirs d’artillerie – du dimanche 18 février au vendredi 23 février. La plupart des victimes sont des femmes et des enfants : vendredi 23 février, ils représentaient 58% des blessés et 48% des morts comptabilisés par 9 des structures soutenues par MSF.

Depuis le début de l’offensive, 13 structures soutenues par MSF ont été touchées par des bombardements. Le personnel médical sur place travaille sans relâche depuis six jours, dans des conditions extrêmes ne lui permettant pas de traiter les patients de manière adéquate. Les routes pour les transférer vers des structures de soins sont impraticables à cause des dégâts causés par les combats, le matériel médical et les médicaments sont limités, et le nombre de patients continue à augmenter, tout comme la fatigue du personnel médical.

Apres six jours de bombardements incessants, les médecins soutenus par MSF à l’intérieur de l’enclave demandent l’arrêt des bombardements. Même avec un réapprovisionnement en fournitures médicales, ils n’ont plus la capacité physique de traiter les blessés.

Pour que le personnel médical puisse faire son travail, les bombardements et les tirs d’artilleries du Gouvernement syrien et des groupes armés dans la Ghouta orientale doivent cesser immédiatement. Une réponse humanitaire est urgente et nécessaire, c’est pourquoi MSF insiste pour que les points suivants soient inclus dans le cadre de cette réponse :

  • Une pause dans les bombardements et tirs d’artillerie pour permettre la réorganisation de la réponse médicale ;
  • L’autorisation des évacuations médicales pour les patients critiques ;
  • L’autorisation, pour des groupes humanitaires médicaux indépendants, d’entrer dans la zone pour apporter un soutien direct ;
  • Un réapprovisionnement massif en fournitures médicales et en médicaments vitaux ; et
  • L’assurance avant, pendant et après toute pause dans le conflit, que les zones civiles, des deux côtés, et notamment les structures de santé, ne soient pas touchées par les combats.
     

Nous appelons individuellement chaque état membre des Nations unies engagé militairement en Syrie ou qui soutient des parties prenantes au conflit en Syrie, à assumer leurs responsabilités dans la catastrophe médicale en cours, et à utiliser de leur influence pour diminuer la crise. 


Mise à jour au 26 février 2018 :

Au soir du dimanche 25 février, 10 hôpitaux et cliniques, parmi ceux que soutient MSF dans la Ghouta orientale, faisaient état de plus de 3300 blessés et de plus de 630 morts (depuis le soir du 18 février).

Ces chiffres sont clairement sous-estimés car toutes les structures soutenues par MSF n’ont pas pu transmettre leurs derniers décomptes, et ils ne tiennent pas non plus compte des décomptes des autres structures non soutenues par MSF.


Mise à jour au 7 mars 2018 :

Au soir du 4 mars, 10 hôpitaux et cliniques, parmi ceux soutenus par MSF dans la Ghouta orientale, ainsi que 10 autres structures à qui MSF effectue des donations de matériel médical d'urgence, faisaient état de plus de 4800 blessés et de plus de 1000 morts (depuis le soir du 18 février).

Comme précédemment, ces chiffres sont clairement sous-estimés car toutes les structures soutenues par MSF n’ont pas pu transmettre leurs derniers décomptes, et ils ne tiennent pas non plus compte des décomptes des autres structures non soutenues par MSF.


Témoignages de personnels médicaux travaillant dans la Ghouta orientale :

Un assistant médical travaillant dans une clinique de santé – 23 février

« Notre point médical a été bombardé. Nous avons dû aller dans un autre endroit, qui a aussi été bombardé. Les secouristes et les autres personnes présentes dans la zone ont accouru pour sortir les victimes des décombres. C’est à ce moment-là que le second bombardement a eu lieu, au même endroit que le premier, là où tout le monde était rassemblé. Nous avions près de 100 blessés, et aucun endroit pour les soigner. »

Docteure – Directrice d’un grand hôpital de campagne – 24 février

« Si vous comptez les centaines de corps, ceux encore vivants et ceux déjà morts, il n’y a rien que vous pouvez faire pour eux. Même avec suffisamment de fournitures médicales, il n’y a rien que vous pouvez faire pour répondre aux besoins d’un nombre aussi important de personnes. Ce n’est pas tant de matériel médical dont nous avons besoin, mais d’un arrêt des bombardements. 

Nous ne pouvons pas transférer de patients en dehors de l’hôpital. Toute personne se trouvant dans la rue, qu’elle soit à pied ou en voiture, est presque sûre de mourir. Nous ne pouvons même pas référer les patients critiques à l’unité de soins intensifs qui ne se trouve qu’à 5km d’ici. Nous sommes obligés de les garder, alors qu’ici nous n’avons aucun masque respiratoire. Nous n’avons pas d’autre choix que d’utiliser des ventilateurs manuels, ce qui signifie que chaque patient a besoin que quelqu’un manie ce ventilateur pour lui. Avec autant de patients qui arrivent, c’est impossible. Nous perdons tellement de patients à cause du matériel dont nous manquons. Les patients auraient une chance de survivre, si nous pouvions les référer à l’unité de soins intensifs à 5km d’ici, mais avec l’intensité des bombardements, nous ne pouvons pas. »

Docteur (Homme) travaillant dans un hôpital de campagne – 24 février

« Notre hôpital est plein, et nous avons déjà été touchés par les bombardements deux fois. Lorsque les patients ont commencé à arriver en nombre, nous les avons envoyés vers une autre structure, normalement utilisée comme dispensaire de proximité. Nous l’utilisons désormais uniquement pour avoir assez d’espace pour traiter, comme on le peut, nos patients. Nous sommes 250 personnes ici (employés et patients) et nous n’avons rien à manger. »

Docteur (Homme) travaillant dans un hôpital de campagne – 24 février

« Cela devient extrêmement difficile de référer des patients. Chaque fois qu’une ambulance part d’ici, elle est bombardée. La seule façon pour nous de référer des patients est d’utiliser des tunnels souterrains. »

Notes

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