Nigeria : MSF alerte sur une aggravation de la malnutrition dans le nord-ouest du pays

malnutrition a Katsina dans le nord ouest du Nigeria
De nouveaux patients arrivent au centre de nutrition thérapeutique de MSF à Katsina, dans le nord ouest du Nigeria. Certains sont référés, d'autres viennent se faire examiner.  © MSF/Ehab Zawati

Face à l’aggravation de la crise nutritionnelle dans le nord-ouest du Nigeria, Médecins sans Frontières (MSF) a renforcé ses activités mais la réponse humanitaire actuelle demeure insuffisante pour éviter une catastrophe dans les mois à venir.

MSF a ouvert trois nouveaux centres nutritionnels thérapeutiques ambulatoires, en plus des 10 centres hospitaliers et des 32 centres ambulatoires qu'elle gère déjà dans les États de Kano, Katsina, Kebbi, Sokoto et Zamfara.

Entre janvier et mai de cette année, les équipes de MSF dans le nord-ouest du Nigeria ont soigné 10 200 enfants qui ont dû être hospitalisés pour malnutrition sévère et complications médicales et ont admis 51 000 enfants dans les programmes ambulatoires. Les hospitalisations ont augmenté de 26 % par rapport à la même période en 2022 - des chiffres qui étaient pourtant déjà très élevés.

Cette année, les admissions devraient continuer à augmenter. La période de soudure, quatre mois entre mai et août pendant lesquels il n’y a pas de récoltes au Nigeria et où les stocks de nourriture diminuent, n’a commencé que récemment. Pourtant, dans plusieurs centres de traitement MSF, tous les lits sont déjà occupés. « A mesure que la période de soudure avance, nous recevons plus de cas d'enfants malnutris », explique Htet Aung Kyi, coordinateur médical de MSF.

Le nord-ouest du Nigeria affiche des indicateurs de santé parmi les plus mauvais du pays. L'escalade des violences de ces dernières années a contribué à transformer une situation de malnutrition déjà préoccupante en une crise de grande ampleur. Des groupes armés attaquent régulièrement les villes, pillent les maisons, enlèvent les habitants pour obtenir une rançon. De nombreuses personnes ont fui pour se réfugier dans des zones plus sûres. D'autres sont restées, mais ne peuvent plus accéder à leur ferme ou à leur lieu de travail en raison de l'insécurité. Celles ayant besoin de soins hésitent à se rendre dans les centres de santé ou les hôpitaux à cause de l’insécurité sur le trajet.

Les équipes MSF constatent que des enfants soignés pour malnutrition et autorisés à rentrer chez eux doivent fréquemment être à nouveau admis plus tard, car leurs familles ont du mal à trouver suffisamment de nourriture pour les maintenir en bonne santé. Les enfants se retrouvent alors coincés dans une spirale de malnutrition dont il est difficile de sortir.

« Nous mangeons quand nous avons de la nourriture, mais il y a des jours où nous avons faim, et parfois les enfants doivent mendier pour avoir à manger », explique Sadiya, dont l'enfant a été traité pour malnutrition au centre nutritionnel thérapeutique de MSF à Katsina.

Selon le Bureau des statistiques du Nigeria, environ 78 % des habitants du nord-ouest du pays vivent sous le seuil de pauvreté. Les soins médicaux y sont souvent inabordables pour la population ou difficiles d'accès, et de nombreux enfants n'ont jamais été vaccinés contre les maladies infantiles courantes. L'aide internationale apportée à la région est très limitée. Autant de facteurs qui ont contribué à la hausse du nombre d'enfants souffrant de malnutrition et nécessitant un traitement d'urgence.

Malgré l'accentuation de la crise, le nord-ouest du Nigeria ne bénéficie pas du soutien nécessaire à la mise en place d’une réponse vitale adéquate, qui doit inclure des mesures préventives telles que des distributions de nourriture et l'amélioration de la sécurité alimentaire, ainsi que la détection précoce des cas de malnutrition et leur traitement en temps utile. MSF demande instamment à toutes les organisations humanitaires travaillant dans le pays d'intensifier leur réponse humanitaire et appelle le gouvernement nigérian et les autorités sanitaires locales à agir dès maintenant pour éviter des pertes humaines dans les mois à venir.

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