Gaza : nos collègues et ceux qu’ils aident sont en train de mourir de faim

Famine et survie : la malnutrition à Gaza
Session de sensibilisation à la malnutrition dans la salle d'attente de la clinique MSF de Gaza City, Gaza, juin 2025. © Nour Alsaqqa/MSF

Deux mois après le début des activités de la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), un organisme contrôlé par le gouvernement israélien, 110 organisations tirent à nouveau la sonnette d'alarme et exhortent les gouvernements à agir : il faut de toute urgence mettre fin au siège ; ouvrir tous les points de passage terrestres ; rétablir l'approvisionnement en nourriture, en eau potable, en fournitures médicales et en carburant par l'intermédiaire des Nations unies, et mettre en place un cessez-le-feu permanent. 

Tandis que l’armée israélienne continue d’affamer les Palestiniens de Gaza, c’est au tour des travailleurs humanitaires de rejoindre les longues files d’attente pour tenter d’obtenir de la nourriture, souvent au péril de leur vie et en risquant d’être abattus. Dans la bande de Gaza, les réserves alimentaires sont à présent épuisées. « Chaque matin, la même question résonne à Gaza : vais-je manger aujourd'hui ? », a déclaré l’un des représentants d’agence travaillant sur place. 

Les massacres sur les sites de distribution de nourriture sont quasi quotidiens depuis le début des activités du GHF. Le 13 juillet, les Nations unies ont confirmé que 875 Palestiniens avaient été tués alors qu'ils cherchaient de la nourriture, dont 201 sur des routes d’acheminement de l’aide humanitaire et les autres aux points de distribution. Des milliers d'autres ont été blessés.  

Depuis le début de la guerre, l'armée israélienne a déplacé de force deux millions de Palestiniens. L'ordre de déplacement le plus récent a été émis le 20 juillet, confinant l’ensemble de la population de Gaza sur moins de 12 % du territoire. Le Programme alimentaire mondial a averti que les conditions actuelles rendaient les opérations intenables.  

Des tonnes de nourriture, d'eau potable, de fournitures médicales, de tentes et de carburant se trouvent dans des entrepôts à l’extérieur de Gaza – certains se situent à l’intérieur de Gaza mais restent tout autant inaccessibles. Les organisations humanitaires ne peuvent ni y accéder ni acheminer l’aide et rappellent que l'utilisation de la famine comme arme contre les civils constitue un crime de guerre. 

Les restrictions, les retards et la fragmentation du territoire créés et imposés par le gouvernement israélien dans le cadre de son siège total ont engendré le chaos, la famine et la mort. « Les enfants disent à leurs parents qu'ils veulent aller au paradis, parce qu'au moins il y aura de la nourriture » a rapporté un travailleur humanitaire qui apporte un soutien psychosocial.  

Les médecins signalent des taux record de malnutrition aiguë, en particulier chez les enfants et les personnes âgées. Les maladies se répandent, les marchés sont vides, les déchets s'accumulent, les adultes s'effondrent dans les rues à cause de la faim et de la déshydratation. Les distributions à Gaza se limitent actuellement à 28 camions par jour, ce qui est loin d'être suffisant pour plus de deux millions de personnes, dont beaucoup ont d’ores et déjà survécu à des semaines sans assistance.  

Le système humanitaire dirigé par les Nations unies n'a pas échoué, il a été entravé par le gouvernement israélien. 

Les agences humanitaires ont la capacité et les ressources nécessaires pour mettre en place rapidement une réponse à l’échelle des besoins. Sans accès, nous ne pouvons pas aider celles et ceux qui en ont besoin, y compris nos propres équipes épuisées et affamées.  

Le 10 juillet, l'Union européenne et Israël ont annoncé des mesures visant à accroître l'aide. Mais ces promesses de soi-disant « progrès » sonnent creux. Il n'y a aucun véritable changement sur le terrain. Chaque jour qui passe sans aide signifie davantage de morts.  

À Gaza, des enfants meurent de faim dans l'attente de promesses qui ne se concrétisent jamais. Le système humanitaire ne peut pas fonctionner sur des mots creux et sans engagement politique qui permette concrètement d’accéder aux Palestiniens.  

Les gouvernements doivent cesser d'attendre pour agir. Il est temps de prendre des mesures décisives : exiger un cessez-le-feu immédiat et permanent ; lever toutes les restrictions bureaucratiques et administratives ; ouvrir tous les points de passage terrestres ; garantir l'accès à tous les Palestiniens sur l'ensemble du territoire ; refuser les modèles de distribution contrôlés par l'armée israélienne ; rétablir une réponse humanitaire dirigée par les Nations unies ; continuer à financer des organisations humanitaires impartiales et fondées sur des principes. Les États doivent prendre des mesures concrètes pour mettre fin au siège, notamment en arrêtant le transfert d'armes et de munitions à l’armée israélienne. 

Les arrangements au coup par coup et les gestes symboliques, comme les largages aériens ou les accords d'aide ni faits ni à faire, sont un écran de fumée. Ils ne peuvent en aucun cas remplacer les obligations légales et morales des États de protéger les civils palestiniens et de garantir un accès à grande échelle à Gaza et aux Palestiniens qui y vivent. Nos décideurs politiques ont la responsabilité de sauver des vies ; ne rien faire, c'est être complice.  

Notes

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