Soudan : l’hépatite E se propage dans les camps de réfugiés éthiopiens

Une jeune fille rapporte un jerrican d'eau dans son abri du camp d'Al Tanideba au Soudan. 2021.
Une jeune fille rapporte un jerrican d'eau dans son abri du camp de réfugiés éthiopiens d'Al Tanideba au Soudan. 2021. © MSF/Dalila Mahdawi

Des cas d’hépatite E ont été recensés dans les camps de réfugiés des États de Gedaref et de Kassala, dans l'est du Soudan, qui accueillent les populations éthiopiennes ayant fui le conflit dans la région du Tigré. Une situation dangereuse pour des dizaines de milliers de personnes, révélatrice des lacunes de la réponse humanitaire internationale.

Au cours des dernières semaines, les équipes médicales MSF du camp d'Oum Rakouba et du centre de transit d'Al Hashaba, situés dans l’État de Gedaref, ont reçu 278 personnes touchées par le virus de l’hépatite E. 16 patients ont dû être hospitalisés, parmi lesquels on dénombre 3 femmes enceintes. Certains patients, arrivés dans le coma, ont nécessité une prise en charge immédiate. Dans le camp d'Oum Rakouba, on enregistre désormais une moyenne quotidienne de 15 cas d'hépatite E.

« Depuis le premier jour, la réponse humanitaire a été en retard par rapport aux besoins des réfugiés, explique François Zamparini, coordinateur d'urgence de MSF dans l'État de Gedaref. Les premiers avertissements concernant l'assainissement, l'hygiène et les abris inadéquats n'ont pas été pris en compte. La construction de latrines et de fontaines a été beaucoup trop lente. En conséquence, la défécation à l'air libre est généralisée dans les camps. Les réfugiés du Tigré paient le prix d'une mauvaise coordination internationale. »

De nombreux patients reçus par les équipes MSF présentent une jaunisse aiguë, caractéristique du virus de l’hépatite E, ainsi que des vomissements et des douleurs à l’estomac. Le virus est particulièrement dangereux pour les femmes enceintes, pour lesquelles le risque de décès est d'environ 25 %. Comme la typhoïde, la dysenterie et le choléra, le virus de l'hépatite E se développe dans des environnements où les conditions d’hygiène et d’assainissement ne sont pas suffisantes. 

Dans le camp d’Al Tanideba, dans lequel six cas d’hépatite E ont été identifiés, comme dans celui d’Oum Rakouba, les latrines sont rares ou inutilisables. À Oum Rakouba, il n'y a que 175 latrines pour 20 000 personnes, tandis qu'à Al Tanideba de nombreuses latrines ont été détruites par les intempéries. Près de 40 000 personnes vivent dans ces deux camps.

« Les toilettes posent problème depuis notre arrivée, explique Mehrut, qui vit à Al Tanideba avec ses cinq enfants. Elles ne sont jamais nettoyées ou entretenues et nous ne nous sentons pas à l'aise de les utiliser. » Des latrines sont en cours de construction, mais beaucoup ne devraient pas être prêtes avant des mois alors que la saison des pluies qui s’installe est propice au développement des maladies hydriques.

« La propagation du virus de l'hépatite E aurait pu être évitée si des infrastructures basiques avaient été mises en place à temps, explique Sergio Scor, coordinateur de projet MSF. C’est un échec : la réponse humanitaire internationale n’a pas été en capacité de fournir des services dignes et fonctionnels à un nombre relativement restreint de réfugiés. »

Les équipes MSF ont renforcé les mesures d’hygiène et d’assainissement dans ces camps, en augmentant le niveau de chlore dans l’eau et en désinfectant les puits dont elles ont la responsabilité. Elles ont également intensifié les campagnes de sensibilisation et d’éducation sanitaire, et assuré un suivi auprès des femmes enceintes, une population particulièrement à risque.

À lire aussi