RCA : Malgré l’accord de paix, MSF continue d’étendre son intervention d'urgence

Patients attendant d'être reçus en consultation centre de santé de Damara janvier 2013
Patients attendant d'être reçus en consultation, centre de santé de Damara, janvier 2013 © Chloé Cébron/MSF

Avant même les derniers événements politiques, la République Centrafricaine (RCA) était déjà un contexte d’urgence médicale chronique. MSF, acteur majeur de la santé dans le pays, porte assistance aux milliers de personnes qui, fuyant les attaques des groupes rebelles, ont trouvé refuge en brousse mais se retrouvent dans des conditions très précaires et sans assistance médicale.

Vendredi 11 janvier 2013, un accord de sortie de crise prévoyant, entre autres, un cessez-le-feu, a été conclu entre le gouvernement et les groupes rebelles centrafricains. MSF continue néanmoins d'étendre son intervention d'urgence afin d’améliorer l’accès aux soins dans les zones où les services médicaux de base ne sont plus disponibles. « De nombreux centres de santé ont fermé lorsque le personnel médical a fui. Les rares structures restées ouvertes sont à court de médicaments essentiels ou bien ont vu leurs stocks totalement pillés », constate Sylvain Groulx, coordinateur MSF en RCA.

Dans le projet de Batangafo, au nord-ouest de la RCA, le nombre de consultations à l’hôpital a chuté de 128 par jour en moyenne au cours des 10 jours ayant précédé la prise de la ville par les rebelles, à environ 66 par jour au cours des 10 jours qui ont suivi. Fuyant la menace d’une attaque, des milliers de familles ont trouvé refuge dans la brousse et y sont encore. Ces déplacés dorment dehors, sans moustiquaires, ni eau potable et disposent de très peu de nourriture. Anita, 22 ans et originaire de Damara, témoigne : « lorsqu’on a entendu dire que les rebelles se rapprochaient, les gens sont partis se réfugier en brousse. Mes quatre enfants et moi sommes partis à une quinzaine de kilomètres de Damara. Nous n'y sommes pas retournés depuis. On dort dehors et il fait froid. On boit de l’eau qu’on trouve dans les ruisseaux. Les enfants et les adultes tombent vite malades dans ces conditions. J’ai peur de tous ces soldats en ville, mais je voudrais ramener mes enfants à la maison au plus vite ».

Le risque d'exposition au paludisme et aux infections respiratoires aiguës – des pathologies ayant déjà un taux de prévalence très important en temps normaux – est accru et, cumulé à l'absence de prise en charge médicale rapide, peut faire augmenter des taux de mortalité déjà au dessus des seuils d’urgence, notamment chez les moins de 5 ans.

Le 10 janvier, MSF a ouvert un programme d'urgence à Damara. Nos équipes y fournissent des soins de santé primaires via des dispensaires mobiles et prennent en charge jusqu'à une centaine de patients par jour, surtout des cas de paludisme et de malnutrition. Nicolas, infirmier local, explique : « on a du quitter l’hôpital. Avec tous les militaires dans les environs, on ne pouvait plus faire notre travail correctement. On est revenus grâce à MSF. La neutralité et le logo de MSF nous protègent. C’est ce qui nous permet de revenir travailler ». En décembre dernier, à Kaga Bandoro, une équipe chirurgicale a pris en charge 6 plaies par balles et 27 personnes brûlées lors de l'explosion d'une station d'essence. MSF a évalué 7 centres de santé de Bangui, la capitale, et nos équipes mobiles s’y rendent régulièrement pour y assurer des formations sur le diagnostic rapide du paludisme. Par ailleurs, des médicaments antipaludéens pour 840 malades y ont été distribués. MSF est également prête à mener des interventions chirurgicales d’urgence à la maternité Castor et apporte un soutien matériel à l'hôpital communautaire de la ville. Enfin, MSF a envoyé des équipes évaluer la situation de Grimari à Bria et Sibut. Plusieurs tonnes de médicaments seront immédiatement distribuées aux centres de santé ouverts dans ces zones.

Des décennies de violence et d’insécurité (liés aux affrontements entre groupes rebelles et forces gouvernementales, mais aussi du fait de bandits armés), ont fait de la RCA un contexte d’urgence médicale chronique. Ainsi, une enquête de mortalité MSF menée en avril 2012 a révélé que 60% des enfants de moins de 5 ans décèdent à domicile. Avant décembre 2012, l’accès aux soins était déjà très entravé par le nombre insuffisant de ressources humaines qualifiées ; la très faible présence du ministère de la Santé en dehors de Bangui ; ainsi que par les fréquentes ruptures de stocks de médicaments et de matériels médicaux essentiels. Or, sans garantie de stabilité gouvernementale ni de sécurité assurée pour le personnel humanitaire, les financements des bailleurs de fonds internationaux et des organisations humanitaires risquent de diminuer.
 

Depuis 1997, MSF est présente auprès des populations victimes des crises en RCA. A ce titre, MSF y est devenue un acteur majeur de la santé. 75 personnels internationaux travaillent dans 5 des 17 préfectures du pays. Un chiffre qui devrait augmenter prochainement afin de soutenir les programmes d’urgence. Tout au long de la crise en RCA, MSF a maintenu ses personnels expatriés et nationaux dans ses  7 projets « réguliers » (Carnot, Paoua, Boguila, Batangafo, Kabo, Ndélé et Zémio).

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