"Occupation, violences et humiliations au quotidien"

Depuis novembre 2000, pour faire face aux conséquences de la seconde
Intifada, des équipes MSF apportent un soutien médical et
psychologiques aux populations palestiniennes en Cisjordanie et dans la
bande de Gaza. Lors de leurs visites dans les familles, elles ont
recueilli de nombreux témoignages, rassemblés dans le rapport
"Occupation, violences et humiliations au quotidien: Journal de bord
des équipes psycho-médicales de MSF à Gaza." En voici l'introduction.

Plusieurs mois après le début de l'Intifada d'Al-Aqsa, la réalité quotidienne des populations civiles confrontées à la violence est extrêmement préoccupante. La violence de l'occupation israélienne, le piège dans lequel est prise la population palestinienne, la disproportion des moyens employés ont de lourdes conséquences pour les civils qui les subissent. La répression israélienne prend des allures de punition collective et les moyens militaires utilisés sont ceux habituellement déployés dans les situations de guerre conventionnelle, et non contre des civils.

Le blocus économique imposé par Israël aux territoires palestiniens fragilise encore une structure sociale déjà précaire et souligne l'extrême dépendance dans laquelle sont maintenues les familles palestiniennes.

Entraves quotidiennes

De fait, les conditions de vie quotidienne de ces familles ne cessent de se dégrader. Les Palestiniens vivent dans la peur permanente des représailles de l'armée israélienne et des colons juifs. Leur frustration à l'égard de l'Autorité Palestinienne augmente. Les familles palestiniennes disposent de moins en moins de revenus pour vivre. Les Palestiniens employés en Israël ne peuvent plus se rendre à leur travail, la circulation des personnes et des biens est régulièrement entravée.

Sous prétexte de prévenir des actes terroristes, des maisons palestiniennes, situées à proximité de colonies juives, ou de routes utilisées par les colons, sont rasées, réquisitionnées, en toute impunité ; des familles palestiniennes se voient contraintes de fuir leur foyer en raison de tirs réguliers contre leur village. Les intimidations et les humiliations sont quotidiennes.

Les obstacles à l'accès aux soins sont nombreux. Il est devenu difficile de circuler librement ; les contrôles sont fréquents, longs et humiliants. Autant dire que, pour certaines familles, il devient impossible de se rendre dans les structures médicales palestiniennes ou d'avoir accès à un médecin. Pour certains malades, la peur de voir leur maison réquisitionnée ou détruite pendant leur absence est si grande qu'elle les pousse à renoncer à se faire soigner. L'accès aux soins pour la population est dès lors soumis à de nombreux aléas, alors même que la violence exercée contre les familles palestiniennes et le climat de terreur dans lequel elles vivent génèrent des états de stress et de peur panique très intenses, réclamant une prise en charge soutenue.

Soutien psycho-médical à domicile aux personnes les plus exposées

Dans ce nouveau contexte de violence, Médecins Sans Frontières vient d'ouvrir deux nouvelles missions d'assistance dans les Territoires palestiniens. L'une dans la bande de Gaza, la deuxième dans la vieille ville d'Hébron.
Adaptées à un contexte de violence très particulier, ces interventions ont pour spécificité:

1. de rassembler des médecins et des psychologues dans une pratique clinique conjointe, car les événements actuels provoquent à la fois des troubles physiologiques et psychologiques : accentuation des pathologies chroniques ou antérieures par le stress, colère, angoisses, peur " d'avoir été empoisonné ", troubles du sommeil ou de l'alimentation... La consultation médicale permet de détecter et de soigner les troubles physiologiques. Parallèlement, le psychologue peut commencer un travail thérapeutique permettant aux patients d'exprimer leur peur, de traiter leurs traumatismes et de réduire leur stress.

2. d'être axées sur des visites à domicile, car les entraves opposées à la circulation des personnes ainsi que la terreur ressentie par les patients les empêchent le plus souvent de se déplacer pour consulter.

3. de s'adresser en priorité aux personnes (adultes et enfants) les plus exposées
, c'est-à-dire celles qui vivent à proximité de lieux d'affrontements, de zones bombardées, de colonies juives ou de camps militaires israéliens.

Ce document présente les observations des équipes de Médecins Sans Frontières dans les Territoires palestiniens recueillies depuis novembre 2000, lors de leurs premières visites dans les familles. Les extraits du journal de bord de l'équipe de Gaza, et le témoignage de l'anesthésiste qui a travaillé dans l'hôpital de Qalqylia en Cisjordanie décrivent, tous deux, les conditions de vie quotidienne des familles palestiniennes, entre violences, peur, intimidations et humiliations. Ils soulignent également les contraintes imposées au travail des équipes médicales.

À lire aussi