Ethiopie : des foules à la recherche de nourriture

A Shewkare dans le district de Kindo Didaye région SNNP des centaines de personnes se présentent au dépistage dans l'espoir d'être admises dans un programme nutritionnel MSF
A Shewkare, dans le district de Kindo Didaye, région SNNP, des centaines de personnes se présentent au dépistage dans l'espoir d'être admises dans un programme nutritionnel MSF © Anne Yzèbe/MSF

En quatre mois, environ 40 000 personnes ont reçu de la nourriture thérapeutique ou enrichie après leur admission dans un programme nutritionnel de MSF dans le sud de l'Ethiopie. Des foules se pressent aux entrées des centres nutritionnels pour essayer d'obtenir quelque chose à manger.

24 000 personnes souffrant de malnutrition sévère ont été admises dans les programmes nutritionnels MSF dans les régions Oromo et SNNP (Région des nations, nationalités et peuples du Sud), dans le sud de l'Ethiopie. Les patients sont principalement de jeunes enfants mais, dans certains programmes, figure une forte proportion d'enfants plus âgés ou d'adultes. En moyenne, deux patients sur dix sont âgés de plus de cinq ans.

De plus, 17 000 enfants, souffrant de malnutrition modérée, et femmes, enceintes ou allaitantes, ont reçu une ou plusieurs rations alimentaires. 2 500 tonnes de farine enrichie, plus de 200 tonnes d'huile et plus de 300 tonnes d'autres aliments (lentilles, maïs, sucre) ont été acheminées sur les terrains et sont distribuées directement aux bénéficiaires par les équipes MSF.

3 000 tonnes de nourriture

" Au début de l'intervention à la mi-mai, nous ouvrions de nouveaux centres nutritionnels aussi vite que possible et les enfants sévèrement malnutris affluaient. Depuis un mois, on note que le nombre d'admissions de patients malnutris sévère baisse lentement dans la plupart des centres " explique Renzo Fricke, coordinateur d'urgence des programmes nutritionnels dans le sud de l'Ethiopie.

« Pour les enfants qui étaient le plus en danger, le traitement a été efficace et pour les autres, l'ouverture de programmes nutritionnels pour les malnutris modérés a limité l'apparition de nouveaux cas sévères ».

Ces distributions de nourriture ont généré un immense espoir chez la population puisqu'une plus large proportion de la population a une chance d'être admise dans ce programme. Dans certains endroits, un tiers des enfants de moins de cinq ans sont modérément malnutris.

Des foules aux portes des centres

A Tunto, dans la région SNNP, l'équipe considère comme un « jour tranquille » celui où moins d'un millier de personnes jouent des coudes à l'entrée pour être sûres de rentrer. Certains jours, près de deux milliers de personnes se sont présentées au centre et l'équipe n'avait pas d'autre choix que de suspendre ses activités pour éviter un incident dans la foule.

Boaglesh pèse 30 kilos pour une taille de 149cm, elle va devoir prendre 10 kilos avant d'être considérée comme guérie selon les critères nutritionnels.

Chaque équipe cherche de nouvelles stratégies pour améliorer le contrôle de la foule et pour limiter la charge de travail au niveau du dépistage. Toute une partie de la population continue de venir jour après jour, avec l'espoir de rentrer dans les critères d'admission et de recevoir une ration alimentaire.

Si le manque d'accès à la nourriture est évident, les médecins et les infirmiers des centres nutritionnels MSF notent également un manque d'accès aux soins médicaux. Le prix des aliments comme celui des médicaments est trop élevé pour une large partie de la population dans ces zones. Les problèmes intestinaux, diarrhées et vers, sont fréquents chez les enfants et de nombreux adultes malnutris souffrent d'une maladie chronique.

Bogalesh, une parmi des milliers

A quelques dizaines de kilomètres de Tunto, à Mudulla, la file s'étend sur des centaines de mètres devant le centre de nutrition. Mais ici, les activités pour les enfants modérément malnutris vont seulement commencer et le nombre de cas sévères reste élevé.

Dans cette zone, un quart des patients sont des enfants âgés de 5 à 14 ans et 12% sont des adultes. Bogalesh vient pour la première fois. Un voisin lui a conseillé de se rendre au centre parce qu'elle pourrait y recevoir de la nourriture. Elle a attendu jusqu'à ce qu'elle puisse se lever, elle souffre d'arthrite. Bogalesh pèse 30 kilos pour une taille de 149 cm, elle va devoir prendre 10 kilos avant d'être considérée comme guérie, selon les critères nutritionnels.

Chaque semaine, au cours de son traitement, elle recevra 5 kilos de farine, 1 litre d'huile et quatorze sachets d'aliment thérapeutique. Cette mère de cinq enfants n'avait encore reçu aucune aide directe, en argent ou en nourriture. Un des ses voisins qui avait eu 50 kilos au titre de l'aide alimentaire d'urgence lui avait donné 3 verres de farine quelques jours plus tôt. Et si peu que ce soit, cette aide était précieuse, la valeur de ce don dépassant le salaire moyen d'une journée de travail.

Rester réactifs

Le dispositif MSF est constamment adapté, avec des ouvertures de programmes selon les besoins identifiés, comme récemment dans les districts de Duna, Sidama ou Gedeo, et la fermeture de certains centres quand le nombre de patients chute. Dans quelques zones, des habitants ont commencé à manger le maïs précoce, cueilli directement dans leur champ, dans d'autres la population doit encore attendre un ou deux mois.MSF intervient également à Teru, au nord-ouest de la capitale éthiopienne, Addis-Abbeba, dans la région Afar, où la période de disette n'a pas encore commencé et 9% des enfants de moins de cinq ans sont sévèrement malnutris. Au total, plus de soixante centres nutritionnels fournissent des soins médicaux et de la nourriture thérapeutique aux personnes sévèrement malnutries. Plusieurs centres sont des hôpitaux où sont soignés les patients malnutris souffrant de complications médicales. La majorité des patients guérissent en quelques semaines en suivant le traitement à domicile avec un suivi hebdomadaire au centre nutritionnel.

 

 

 

 

 

 

 

Un enfant tend le bras et le bracelet permettant de mesurer le statut nutritionnel se resserre au niveau de la couleur jaune, indiquant un risque de malnutrition aiguë.

© Anne Yzèbe/MSF

 

 

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