(r)évolution(s) : vous avez dit insuline ? épisode 1, le diabète
Lorsque l'insuline a été découverte il y a plus de 100 ans, les scientifiques ont vendu le brevet pour 1 dollar. Aujourd'hui, la majeure partie de la fabrication et de la vente d'insuline est contrôlée par trois laboratoires pharmaceutiques : Novo Nordisk, Sanofi et Eli Lilly. L'avenir de la santé des patients diabétiques là où la maladie les tue le plus est ainsi dans les mains d'une poignée de compagnies privées qui pensent avant tout à leur profit.
Il y a 10 ans, à Médecins Sans Frontières (MSF), notre révolution médicale, c’était de réussir à faire venir une petite fille diabétique deux fois par jour dans un centre de santé à Carnot, dans l’ouest de la République centrafricaine, pour qu’elle puisse recevoir de l’insuline.
En une décennie, nous sommes passés d’injections deux fois par jour dans une structure médicale pour des patients et patientes souffrant du diabète dans des zones où l’accès aux soins est souvent restreint, à une autre révolution : celle d’une gestion autonome, à domicile du diabète.
Ce modèle de soins comprend d’une part l’auto-surveillance de la glycémie : cela implique d’avoir accès à des glucomètres ou des capteurs de glucose en continu, sous forme de patchs, qui sont actuellement testés dans le cadre de projets MSF au Liban.
Et d'autre part, il requiert que le patient s’injecte lui-même l’insuline. Pour cela, il faut pouvoir maîtriser la chaîne du froid, souvent dans des zones avec peu ou pas d’électricité. Une solution simple et qui peut sauver des vies est d’utiliser des pots en argile, qui permettent de maintenir l’insuline à la température requise.
Il faut également avoir accès à des stylos à insuline, que les patients préfèrent : ils sont plus faciles à utiliser notamment dans les contextes de crise ou d’urgence, moins stigmatisants et moins douloureux. Sans stylos, les patients reçoivent des flacons d'insuline avec des seringues, et on attend d'eux qu'ils prélèvent la dose correcte, tout en sachant qu’une injection mal-dosée peut être mortelle.
Ces stylos, comme les dispositifs de mesure de la glycémie et les bandelettes de tests, restent très coûteux.
Révolutionner la prise en charge du diabète dans les pays à ressources limitées, c’est possible à condition de surmonter les barrières économiques actuelles, et les intérêts privés. Médecins Sans Frontières (MSF) demande la baisse drastique des prix des stylos à insuline et des dispositifs de surveillance ainsi que des solutions de financement pérennes pour les maladies non transmissibles.