Haïti : des patients en marge du système de santé public

A l'occasion de la conférence de Washington, les bailleurs de fonds doivent se saisir du problème d'accès aux services médicaux pour les populations pauvres d'Haïti.

A l'occasion de la conférence de Washington, les bailleurs de fonds doivent se saisir du problème d'accès aux services médicaux pour les populations pauvres d'Haïti.

Port-au-Prince/Paris/Amsterdam/Bruxelles - 13 avril 2009. Alors que le Premier ministre haïtien, le secrétaire général de l'ONU, des représentants de plus de 30 pays donateurs et d'organisations internationales se réunissent demain à Washington afin de financer des projets pour le développement économique et social d'Haïti, ils ne peuvent faire l'impasse sur la crise qui secoue actuellement son système de santé public, déclare l'organisation humanitaire médicale internationale Médecins Sans Frontières (MSF).

MSF appelle le gouvernement haïtien et les bailleurs internationaux à mettre immédiatement en oeuvre des mesures concrètes visant à améliorer l'accès aux soins de la population haïtienne.

« Il est inacceptable qu'aujourd'hui encore, les Haïtiens les plus pauvres n'aient pas accès à des soins d'urgence en obstétrique et en traumatologie de qualité et à un prix abordable », déclare Brian Phillip Moller, chef de mission au centre de rééducation et de traumatologie de Trinité géré par MSF.

« Au moment où le gouvernement haïtien et les donateurs s'intéressent au développement économique de ce pays, ils ne peuvent ignorer l'insuffisance de soins médicaux publics de qualité et accessibles pour les populations pauvres d'Haïti. »

En dépit d'une plus grande stabilité du pays au cours de ces deux dernières années, les habitants les plus pauvres de Port-au-Prince restent très dépendants des soins médicaux d'urgence dispensés gratuitement par MSF. Les tarifs pratiqués par les structures de santé tant publiques que privées rendent les soins inaccessibles à la plupart des Haïtiens. Les hôpitaux publics et les cliniques souffrent bien souvent de problèmes de gestion, de grèves, d'une pénurie de personnel et d'un manque de médicaments et d'approvisionnement.

« Nos structures médicales sont saturées et nous n'avons parfois d'autre choix que de diriger les patients vers d'autres hôpitaux publics, même s'ils seront confrontés à de nombreux obstacles pour être soignés », déplore Massimiliano Cosci, chef de mission d'un programme MSF à Martissant.

« De nombreux patients nous racontent qu'il n'y a pas de médicaments dans les structures de santé, pas de personnel pour les recevoir, ou encore qu'ils ont été renvoyés chez eux parce qu'elles sont surchargées. Dans bon nombre de cas, ils ont dû abandonner leur traitement faute de moyens financiers suffisants pour couvrir les frais. Pour les patients nécessitant des soins vitaux, cela peut être fatal. La situation est véritablement alarmante. »

Souvent, des patients choisissent de rester chez eux faute de solution à un coût abordable. Le fait était particulièrement frappant début février, quand la maternité gérée par MSF a fermé pendant deux semaines pour cause de déménagement. « Pendant la période de fermeture de notre hôpital, de nombreuses femmes n'avaient nulle part où aller pour recevoir des soins obstétriques », affirme Hans Van Dillen, chef de mission à la maternité Jude Anne gérée par MSF. « Pendant sa période d'activité la plus intense, MSF mettait au monde 1 600 bébés par mois et plus de la moitié des accouchements comportaient des risques pour la mère et l'enfant. »

MSF a commencé à fournir des soins d'urgence quand les violences à Port-au-Prince ont limité l'accès de la population aux soins médicaux. Aujourd'hui, bien que la situation sécuritaire se soit améliorée, les besoins médicaux à destination des populations vulnérables de Port-au-Prince restent largement insatisfaits.

À Haïti, MSF investit plus de 13 millions d'euros par an (17,5 millions de dollars US) dans ses programmes médicaux d'urgence. L'hôpital Maternité Jude Anne géré par MSF prend actuellement en charge 40 % de toutes les urgences obstétricales pour les femmes vulnérables de Port-au-Prince, tandis qu'en 2008, l'hôpital Trinité de MSF a traité 17 950 cas de traumatologie ; ce dernier disposant de la seule unité de soin satisfaisante pour grands brulés.

En 2008, 16 950 cas d'urgence médicale ont par ailleurs été traités à l'hôpital de MSF situé dans le bidonville de Martissant, où n'existe aucun autre service public de santé.

 

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