Mozambique : soigner le cancer du col de l'utérus et « offrir bien plus que de l'espoir »

Mozambique Viral Load
Une infirmière MSF lors d'une consultation pour le dépistage du cancer du col de l'utérus à Alto Mae, Maputo, Mozambique. © Sarah-Eve Hammond/MSF

Aujourd'hui, le cancer du col de l'utérus fait plus de victimes à travers le monde que les complications de la grossesse et de l'accouchement. Séverine Caluwaerts, gynécologue-obstétricienne, a travaillé avec Médecins Sans Frontières sur des projets de santé maternelle dans de nombreux pays d'Afrique et du Moyen-orient. Elle revient ici sur son expérience au Mozambique. 

Il y a deux ans, je me suis rendue à Maputo, la capitale du Mozambique, pour assister une équipe MSF dans ses activités de dépistage du cancer du col de l'utérus et l’aider à surmonter divers obstacles pour traiter les cas les plus difficiles. Nous avons mis nos efforts sur le dépistage des femmes séropositives, car elles sont davantage exposées au développement de ce cancer.

Prévalence du VIH

Au Mozambique, le taux d’infection au VIH est l’un des plus élevés au monde. Une femme sur huit vit avec le virus. Les traitements antirétroviraux ne sont accessibles que depuis quelques années.

Durant tout une matinée, j’ai suivi les consultations de santé sexuelle et reproductive aux côtés des infirmiers. Les femmes, jeunes comme moins jeunes, venaient à la clinique pour des raisons différentes : passer un test de dépistage du VIH, se renseigner sur des questions de planning familial, initier une première visite de soins prénatals ou encore se faire dépister un éventuel cancer du col de l'utérus. Et parfois, tout à la fois. 

Natalia Tamayo, spécialiste des maladies infectieuses MSF au Centre de référence Alto Mae (CRAM) à Maputo, au Mozambique, où des soins sont prodigués, notamment aux patients atteints du VIH.
 © MSF/Ariana Atala
Natalia Tamayo, spécialiste des maladies infectieuses MSF au Centre de référence Alto Mae (CRAM) à Maputo, au Mozambique, où des soins sont prodigués, notamment aux patients atteints du VIH. © MSF/Ariana Atala

Quand Maura* — notre dernière patiente de la matinée — âgée de 40 ans, est arrivée, j'ai d'emblée remarqué sa minceur et le gonflement des ganglions lymphatiques au niveau de son cou. Au moment où l'infirmière lui a demandé les raisons de sa venue à la clinique, elle a répondu : « J'ai mal au ventre et quelque chose de sale sort de mon vagin ».

J’espérais qu’il ne s’agisse « que » d'une maladie sexuellement transmissible, quelque chose de soignable. Mais pendant l'examen, l'infirmière et moi avons observé une grosse masse au niveau du col de l'utérus, qui se prolongeait dans le vagin. Un examen plus approfondi a révélé que cette masse s'étendait jusqu'à la paroi pelvienne.

Une fois Maura rhabillée, nous lui avons conseillé de faire un test de dépistage du VIH. Elle a accepté et — comme nous le soupçonnions — le test s’est avéré positif. L'infirmière s’est assise avec Maura et lui a expliqué qu'elle était doublement atteinte : d'un cancer du col de l'utérus et du VIH. L'infirmière l’a rassurée en lui expliquant que nous ferions tout notre possible et qu'elle serait orientée vers la clinique de prise en charge du VIH afin qu’elle puisse commencer son traitement le jour même.

Toutefois, étant inopérable, son cancer du col de l'utérus s'avérait particulièrement difficile à soigner. Maura devait recourir à de la radiothérapie pour avoir une chance de s’en sortir.  

Un accès limité à la radiothérapie

Il n'existe pas d'unité de radiothérapie au Mozambique.
Les patientes sont adressées à des hôpitaux en Afrique du Sud.
Mais ce système ne fonctionne pas car les distances sont trop importantes et les transferts sont à la fois complexes et trop coûteux.

J'ai pris Maura dans mes bras, lui ai souhaité le meilleur et suis rentrée chez moi avec un vrai sentiment d'impuissance, me disant que ce qui lui arrivait aurait pu être évité, si seulement elle avait pu faire son test de dépistage du VIH plus tôt. 

En vaccinant les jeunes filles et en proposant un dépistage et un traitement le plus tôt possible, nous offrons bien plus que de l'espoir : nous empêchons le cancer du col de l'utérus d’évoluer pour que davantage de femmes comme Maura aient une chance de survivre.

Aujourd'hui, même si la situation s'est légèrement améliorée, il reste encore beaucoup à faire.

 

*Nom d'emprunt

À lire aussi