Iran - Une histoire de réfugiés afghans
Quitter son pays ou y revenir après des années d'exil ne se fait jamais
sans hésitations ni douleurs. Les quelque 1,5 million d'Afghans
aujourd'hui réfugiés en Iran sont bien placés pour le savoir. Arrivés
par vagues successives, depuis l'invasion russe des années 80 jusqu'à
la chute du régime taliban en novembre 2001, ils ont fui la guerre,
l'oppression d'un régime, des conditions de vie misérables. En quête
d'une vie meilleure, leurs espoirs se heurtent à l'arrivée à une toute
autre réalité. Endettés par les frais du voyage, sans emploi, sans
logement, sans existence légale, rejetés par la société et le
gouvernement iraniens, leur situation économique et sociale est plus
que précaire.L'histoire
de cette famille afghane vivant à Zahedan, recueillie par Jean
Chartier, infirmier MSF, pourrait être celle de toute la communauté
réfugiée d'Iran.
Le père, son épouse enceinte et leurs quatre enfants âgés de 10 à 4 ans vivent en haut de la colline, hébergée temporairement dans une maison de quatre petites pièces déjà occupées par trois autres familles. Ils ont prévu de bientôt déménager dans une maison du quartier voisin de Shir-Abad. Mais pour payer les 400.000 rials (45 euros) de loyer, ils savent déjà qu'il leur faudra sous-louer une partie des trois pièces à d'autres réfugiés afghans.
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En vingt ans, le conflit afghan a chassé plus de 4,5 millions d'Afghans
de chez eux, réfugiés au Pakistan, en Iran, ou déplacés au sein de leur
propre pays.
© Tim Dirven
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Emmenant sa famille, il rejoint Zaranj, ville-frontière où il emprunte 2.000.000 rials (225 euros) à un contrebandier afin de payer leur passage. Arrivé à Zahedan, il trouve un logement sans problème et travaille comme journalier, la plupart du temps dans la construction, gagnant 350.000 rials par mois (40 euros). En un an, il parvient à rembourser sa dette auprès du contrebandier afghan. Et s'il ne parvient pas à économiser, il réussit néanmoins à faire vivre sa famille. "Il y avait suffisamment de travail en Iran à ce moment là, nous avions une bonne vie", se souvient-il.
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Déplacés afghans, décembre 2001
© Tim Dirven
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Mourir dans son pays
A Kaboul, la famille est hébergée deux mois chez la grand-mère maternelle. Si la ville est redevenue sûre, la situation de ses habitants est de plus en plus précaire. le coût de la vie augmente sans cesse, et particulièrement les loyers. Les emplois disponibles sont rares. Le père enchaîne les petits boulots (ouvrier, chauffeur, etc.), mais ne gagne pas assez. Il doit se résigner à squatter avec sa famille une maison détruite, où des bâches plastiques remplacent les murs. Mais le propriétaire exige plus d'un mois de salaire comme loyer, et finit par les expulser. Ils n'ont alors d'autre choix que de repartir, une deuxième fois, en Iran.
Argent réclamé par les passeurs, bakchichs aux soldats iraniens, emprunts pour survivre à Zahedan : une fois de plus, la famille se retrouve lourdement endettée. Au total, 8 millions de rials (900 euros) à rembourser, soit plus de deux ans de salaire. Or, aujourd'hui, il y a de moins en moins de travail pour les réfugiés afghans de Zahedan. Malgré tout, cette famille préfère rester ici. De toutes façons elle n'a pas de quoi revenir en arrière...