01

Contexte

L’occupation israélienne de la Cisjordanie, de Gaza et de Jérusalem-Est – depuis plus de 50 ans – pèse lourdement sur les populations, dans un contexte de violences permanentes et d’augmentation croissante du nombre de colonies. Dans la bande de Gaza, les conditions de vie des Palestiniens se sont considérablement dégradées : le blocus instauré en 2007 a plongé l'économie dans le chaos, asphyxiant progressivement les habitants de ce territoire, également le théâtre d'offensives militaires israéliennes régulières et dévastatrices. 
Les restrictions de circulation imposées par les autorités israéliennes affectent durement les populations des territoires palestiniens occupés, notamment dans leur accès aux soins médicaux. Le système de santé palestinien présente de nombreuses déficiences, notamment dans des domaines spécialisés comme la chirurgie ou la santé mentale. Les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) interviennent donc autour de trois axes principaux : la prise en charge des cas de traumatologie, le traitement des grands brûlés et le soutien en santé mentale.
 
Les manifestations dites de la « Grande Marche du Retour », organisées à la frontière par les Gazaouis presque chaque vendredi entre 2018 et 2019 – pour faire reconnaître leurs droits sur leurs terres – ont été lourdement réprimées par les autorités israéliennes : plus de 8 000 personnes ont ainsi été blessées par balles réelles. L'urgence de leur prise en charge opératoire et la nécessité d'un suivi médical postopératoire ont impliqué un renforcement des activités de MSF à Gaza, les capacités de soins locales étant complètement submergées.

Principales villes où interviennent les équipes MSF. Source : rapport international d'activités 2019
Principales villes où interviennent les équipes MSF. Source : rapport international d'activités 2019

À la suite des manifestations de la « Grande Marche du Retour » à Gaza, les équipes MSF sont intervenues en urgence, jusqu'à tripler leurs capacités médicales, pour prendre en charge les patients blessés. Ce documentaire propose de suivre le quotidien de trois patients reçus lors de ces manifestations et suivis médicalement par les équipes MSF à Gaza.

02

Gaza - Cisjordanie : territoires occupés et populations asphyxiées

Dans la bande de Gaza, la situation de la population ne cesse de se dégrader sous l’effet du blocus israélien mis en place en 2007 et qui asphyxie ce territoire en rationnant les entrées et les sorties de matières premières, de biens et de personnes. La population vit quasiment enfermée : chaque demande de sortie – y compris médicale – est soumise à l’approbation d’Israël, qui peut la bloquer sans explication. L’unique autre porte de sortie de Gaza, le point de passage vers l’Égypte, n'ouvre que rarement et de façon très aléatoire. Le blocus ruine ainsi l'économie du territoire, avec un approvisionnement en eau potable et en électricité très limité – aggravé par les tensions entre l’Autorité palestinienne basée à Ramallah et le Hamas au pouvoir à Gaza – qui impacte directement les capacités du système sanitaire, également en proie à des pénuries régulières de médicaments et d'équipements médicaux. Le système de santé est, par ailleurs, de plus en plus inadapté à la situation : les ratios du nombre de médecins, d’infirmiers et de lits d’hôpital par habitants se détériorent fortement, notamment en raison de l’accroissement continu de la population à Gaza. Le personnel médical gazaoui fait en plus les frais de coupes budgétaires dans leurs salaires. Aussi, le niveau de formation des travailleurs de santé diminue du fait d’un manque d’échanges avec les professionnels extérieurs. Dans ce contexte de pauvreté généralisée, les deux tiers de la population de la bande de Gaza seraient dépendantes de l’aide humanitaire.

IN BETWEEN WARS

Présentes auprès des Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie depuis la fin des années 1980, les équipes MSF sont témoins directs de la brutalité de l'occupation, et constatent les mêmes symptômes provoqués par les mêmes causes et leur impuissance à rompre ce cycle interminable de violences et de répression. En 2016, MSF a produit et réalisé une installation immersive IN BETWEEN WARS, présentée à Paris, Amman et Dubaï. En plongeant le visiteur dans le quotidien des patients et des collaborateurs de MSF à partir d'enregistrements sonores, de témoignages filmés et de photos, IN BETWEEN WARS exprime le refus de contribuer à banaliser l'inacceptable.

IN BETWEEN WARS

Visiter le site dédié à l'installation IN BETWEEN WARS

En savoir plus

En Cisjordanie et à Jérusalem-Est, la colonisation se poursuit à un rythme soutenu : on compte désormais près de 650 000 colons installés dans ces territoires. Cette occupation illégale a de lourdes conséquences sur la vie des populations palestiniennes. Elles sont soumises au contrôle permanent de l’armée israélienne, dans un climat de violence généralisée et de harcèlement quotidien. Il n’y a plus de continuité territoriale entre les zones où les Palestiniens peuvent circuler librement, et ces derniers doivent systématiquement demander et obtenir une autorisation des autorités israéliennes pour se déplacer. De nombreux checkpoints coupent ainsi la Cisjordanie. Ils contribuent à l’humiliation quotidienne des Palestiniens, pour qui les arrestations, les démolitions de maisons, les violences et les violations des droits de l’homme sont monnaie courante. Des situations fréquemment rapportées chaque année dans les milliers de consultations en santé mentale, individuelles ou en groupe, dispensées par les équipes MSF à Hébron, Naplouse et Qalqilya.

03

Un cycle de violences sans fin et de répressions meurtrières

Depuis les années 2000, les épisodes de guerre à la frontière entre la bande de Gaza et Israël se répètent avec un recours systématique aux bombardements aériens lors des offensives militaires de l’armée israélienne : opérations « Pluies d'été » (2006), « Plomb durci » (2008-2009), « Pilier de défense » (2012), « Bordure protectrice » (2014). Cette dernière, la quatrième en huit ans, a été la plus meurtrière : près 2 200 morts côté palestinien, dont 70 % de civils, et plus de 10 000 blessés. Les équipes MSF ont été directement témoins d'attaques sur les civils et de destructions délibérées d’infrastructures essentielles.

Entre mars 2018 et la fin 2019, les manifestations pacifiques de la « Grande Marche du Retour », organisées tous les vendredis par les habitants de Gaza, ont été  réprimées dans un bain de sang par les forces armées israéliennes. Semaine après semaine, malgré les efforts des quelques acteurs de santé sur le terrain, les besoins urgents de milliers de personnes souffrant de blessures causées par des balles dévastatrices ont largement dépassé les capacités de soins disponibles dans les services hospitaliers locaux, déjà affaibli par plus de  dix ans du blocus.

Nous n’imaginions pas qu’un tel nombre de personnes seraient blessées par balles

« Nous n’étions pas prêts à ce qui s’est produit. Nous regardions chaque tir de roquette depuis Gaza, chaque assassinat et chaque bombardement, en nous demandant si cela allait déclencher une nouvelle guerre, plus violente encore que celle de 2014. Mais nous n’imaginions pas qu’un tel nombre de personnes seraient blessées par balles pendant les manifestations de la "Grande Marche du Retour". Ces rassemblements ont tourné au bain de sang, avec une régularité implacable, mois après mois, au point de presque nous y habituer. »

Marie-Elisabeth Ingres, Cheffe de mission MSF en Territoires palestiniens occupés

Les équipes MSF ont progressivement augmenté leurs activités pour faire face au nombre important de patients arrivant avec des fractures ouvertes aux jambes. La plupart des blessures – sévères, complexes  et longues à traiter – ont nécessité des opérations de chirurgie reconstructive, avec des risques élevés d'infections osseuses. Dans les trois hôpitaux (deux sont consacrés à la prise en charge des patients de la « Grande Marche du Retour », l'autre au traitement des grands brûlés) qu'elle soutient dans la bande de Gaza, MSF a pratiqué plus de 4 200 interventions chirurgicales a admis plus de 10 000 grands brûlés entre 2018 et 2019. Les équipes ont également dispensé des soins dans quatre cliniques postopératoires, ont assuré des séances de physiothérapies aux patients et ont apporté un soutien psychologique pour aider les patients à supporter des traitements longs et pénibles.