Sauvetages en Méditerranée : les entraves à l’assistance humanitaire vont créer un vide aux conséquences mortelles

Le Prudence durant un sauvetage en Mer Méditerranée Andrew McConnell/Panos Pictures
Le Prudence durant un sauvetage en Mer Méditerranée © Andrew McConnell/Panos Pictures © Andrew McConnell/Panos Pictures

MSF suspend temporairement les activités de son bateau, le Prudence.

Hier, les autorités libyennes ont annoncé l’établissement d’une zone de recherche et sauvetage (SAR) et la limitation de l’accès des bateaux humanitaires aux eaux internationales au large des côtes libyennes. Immédiatement après cette annonce, le Centre de Coordination du Sauvetage Maritime basé à Rome (MRCC) a alerté MSF au sujet des risques de sécurité associés aux menaces exprimées par les garde-côtes libyens à l’encontre des bateaux humanitaires de recherche et sauvetage.

Suite à ces restrictions supplémentaires à l’aide humanitaire indépendante, et face au durcissement du blocus qui retient les migrants en Libye, MSF a décidé de suspendre temporairement les activités de recherche et sauvetage de son bateau, le Prudence. L’équipe de soutien médical de MSF continuera à assister la capacité de sauvetage sur le bateau dirigé par SOS Méditerranée – l’Aquarius – qui navigue actuellement dans les eaux internationales.

« Si ces déclarations sont confirmées et ces directives mises en oeuvre, il y a aura plus de morts en mer et plus de gens seront piégés en Libye, précise Annemarie Loof, directrice des opérations de MSF. Sans les navires des organisations humanitaires, il n’y aura pas assez de capacités pour sauver les gens de la noyade. Ceux qui ne se noieront pas seront interceptés et ramenés en Libye, où ils seront exposés à l’insécurité et à la détention arbitraire. »

Ces déclarations surviennent une semaine à peine après que les autorités italiennes aient déployé des navires militaires en eaux libyennes, afin d’améliorer les capacités des garde-côtes libyens d’intercepter les migrants et de les renvoyer en Libye.

« Ces derniers développements représentent un autre élément inquiétant dans un contexte de plus en plus hostile aux opérations de sauvetage, explique Brice de le Vingne, directeur des opérations de MSF. Les Etats européens et les autorités libyennes mettent conjointement en place un blocus qui empêche les gens de se mettre en sécurité. C’est une atteinte inacceptable à la vie et à la dignité des personne.s »

MSF demande aux autorités libyennes de confirmer rapidement qu’elles respecteront et adhéreront aux obligations légales internationales de secourir les bateaux en détresse, et qu’elles permettront que les sauvetages prennent place en eaux internationales et libyennes. MSF demande également à ce que les autorités libyennes rendent clair que tous les bateaux, affrétés par des ONG ou d’autres, pourront mener ces activités de sauvetage sans encombre et en toute sécurité, et que ni les autorités libyennes ni celles italiennes n’interféreront avec le droit, affirmé par la loi, de débarquer les passagers à un endroit sûr.

« MSF refuse d’être coopté dans un système qui vise à empêcher à tout prix les gens de se rendre dans un endroit sûr, poursuit Brice de le Vingne. Nous demandons à l’Union Européenne et aux autorités italiennes de mettre fin aux stratégies de rétention qui piègent les personnes dans un pays en guerre, sans considérer leurs besoins de protection et d’assistance. Il est urgent de mettre en place des voies légales et sures pour les réfugiés et les migrants, pour réduire des morts et des souffrances inutiles. »

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