URGENCE GAZA

Gaza : la résolution du Conseil de sécurité sur un
cessez-le-feu doit être suivie d’effets immédiats

Lire le communiqué

Fonds d'urgence

Chapo

Grâce à vous, nos équipes interviennent en urgence auprès des populations qui en ont le plus besoin, partout où nous agissons.

je donne au fonds d'urgence MSF 

Histoires de migrants : à bord du Bourbon Argos

En Méditerranée le Bourbon Argos prend la mer.
En Méditerranée, le Bourbon Argos prend la mer. © Gabriele François Casini/MSF

Après le MY Phoenix, MSF a lancé le 9 mai un deuxième bateau de recherche et de sauvetage en mer Méditerranée afin de venir en aide à ceux qui risquent leur vie pour rejoindre l’Europe. Sur le Bourbon Argos se trouve un équipage de 26 personnes dont des spécialistes en opérations de recherche et de sauvetage en mer et du personnel médical. Ce deuxième bateau peut accueillir plus de 700 personnes à son bord. Quatre migrants recueillis en mer par MSF racontent leur histoire, et ce qui les a poussés à fuir leur pays pour prendre la mer.

Freweini, jeune Erythréenne à bord du Bourbon Argos©Julie Remy/MSF

© Julie Remy/MSF

Je m’appelle Freweini, j’ai 38 ans et je suis originaire d’Erythrée. Mon mari est mort mais j’ai 5 enfants, trois sont les miens, deux dont je prends soin et une mère malade. Depuis que j’ai quitté l’Erythrée il y a deux mois, je n’ai parlé à aucun d’entre eux.

Il y a trois ans,  j’ai commencé à avoir des problèmes de dos. Avant ça je pouvais courir partout et faire ce que je voulais. Désormais je peux à peine marcher. Je dois utiliser des béquilles et chaque jour est douloureux.

J’ai besoin de chirurgie pour mon dos. J’ai cherché à me faire soigner chez moi mais ils n’avaient pas les équipements nécessaires sauf si je réussissais à trouver 30 000 dollars. A la place, je me suis tournée vers la médecine traditionnelle et les soins par le feu. Mais cela n’a pas enlevé la douleur, tout ce que ça a fait c’est bruler ma peau. Maintenant j’ai des marques sur tout mon corps.

A cause de mes problèmes de dos, j’ai décidé de trouver un moyen de quitter l’Erythrée. Les commerçants locaux et les gens de mon village m’ont aidée à rassembler suffisamment d’argent pour payer pour le voyage jusqu’à Khartoum, et ensuite pour la Libye, où j’ai embarqué sur un bateau. J’ai été aidée par des personnes tout au long de mon voyage. Tout le monde était si attentionné! Ils m’aidaient à me lever, me portaient parfois. Je suis très reconnaissante.

Quand je suis montée à bord du bateau, je n’avais aucune idée de la durée du voyage. Vous êtes arrivés et vous nous avez secouru. Je me moque du pays dans lequel j’arriverai en Europe. Tout ce que je désire, c’est me faire opérer du dos et être capable de venir en aide à mes enfants. J’espère pouvoir rapidement marcher à nouveau normalement.

 

Tufay Basfil à bord du Bourbon Argos ©Julie Remy/MSF

© Julie Remy/MSF

Je m’appelle Tufay Basfil et je suis originaire d’Erythrée. J’ai été sur la route pendant 5 ans afin d’échapper au régime militaire de mon pays. En Erythrée, tout le monde doit faire son service militaire, qui ne se termine jamais. Officiellement, nous devons servir pendant 10 années, mais après ces 10 ans cela peut continuer. Il n’y pas de réel salaire, nous touchons environs 10$ par mois, ce qui n’est pas assez pour nourrir nos familles.

J’ai quitté l’Erythrée seul et ai voyagé à pieds jusqu’au Camp n°26, juste après la frontière Erythréenne au Soudan. Il n’y a que des Erythréens dans le camp de réfugiés. J’y suis resté pendant 5 ans. Dès que la police découvrait que quelqu’un travaillait, elle nous demandait des pots de vins, de l’argent c’est pour cela que j’ai décidé de partir.
Cela m’a pris sept jours d’aller du Soudan à la frontière Libyenne. Nous étions environ 30 dans un pick-up. Le conducteur allait très vite, deux d’entre nous sont tombés mais il ne s’est pas arrêté. Beaucoup sont morts en chemin.

Une fois à Tripoli, attendant un bateau qui pourrait m’emmener en Europe, j’ai été emprisonné pendant 5 mois par des passeurs. Si nous osions demander quelque chose, les passeurs nous électrocutaient ou tiraient en l’air au-dessus de nos têtes afin que les balles tombent autour de nous. D’autres nous battaient ou nous brulaient. Une fois par jour, on nous donnait des petites portions de pâtes à partager à 10. Il n’y en avait pas suffisamment et certains d’entre nous n’avaient pas une seule nouille. La seule eau que nous avions à boire était de l’eau usée et salée.

C’était très violent en Libye. Même si les femmes étaient enceintes, ils n’en avaient rien à faire. Une des femmes a perdu son enfant de 3 ans, 3 jours avant que nous embarquions sur le bateau de pêche. Désormais tout ce que je veux c’est vivre en paix.

 

migrants à bord du Bourbon Argos

© Julie Remy/MSF

Témoignage anonyme d'un Bengali

Je suis tellement soulagé et heureux d’avoir quitté la Libye. Si j’avais su que les choses tourneraient ainsi, je n’y serais jamais allé.

Au cours des trois dernières années, j’ai fait la vaisselle pour une compagnie pétrolière dans le désert libyen afin d'aider ma famille restée à la maison. Il y a environ un an, les choses ont empiré. Avec l’arrivée des milices armées, les entreprises ont fermé. Les milices prenaient tout ce qu’elles pouvaient et tuaient. C’est devenu si violent que nous avions peur de sortir. La compagnie pour laquelle je travaillais m'avait fait venir en Libye mais ils ont fermé quand les choses sont devenues trop dangereuses.

A cette période, des Bengalis ont été kidnappés et j’ai commencé à avoir très peur. J’ai réalisé que je n’avais plus le choix, je devais partir. Je savais que les voyages en bateau étaient risqués mais je n’avais aucun autre moyen de quitter la Libye. Je n’ai plus de papiers, je ne pouvais donc pas rentrer en avion chez moi.

Nous sommes18 Bengalis, ici sur le Bourbon Argos. Je suis sûr que je vais trouver du travail en Europe pour soutenir ma famille.

 

Samyawit Habutu, à bord du Bourbon Argos ©Julie Remy/MSF

© Julie Remy/MSF

Je m’appelle Samyawit Habutu, j’ai 23 ans. Il y a six ans j’ai été forcée de rejoindre l’armée Erythréenne. Ils ne m’ont pas laissée partir, même après être tombée enceinte et avoir donné naissance à ma fille. Il y a un an, en juin 2014, j’ai décidé de partir. J’ai laissé ma fille à sa grand-mère en Erythrée et j’ai voyagé d’abord jusqu’au camp de réfugiés de Shagarab au Soudan où je suis restée dix jours. J’ai ensuite rejoint la Libye ce qui m’a pris également 10 jours. Sur la route, trois personnes sont tombées du pick-up, l'une s'est cassé sa jambe, les deux autres sont mortes. Le conducteur poussait juste les corps le long de la route et continuait.

A Tripoli, j’ai dû attendre trois mois de plus. Toutes les nuits pendant que j’étais là-bas, un Libyen choisissait deux filles pour coucher avec. Une de mes amies a attrapé le sida et est tombée enceinte de cet homme.

Désormais, je veux seulement être libre, trouver un travail et pouvoir envoyer de l’argent à ma famille. J’aimerais trouver un travail de bureau. Si j’avais su à l’époque ce que je sais maintenant, je n’aurais jamais entrepris ce voyage. Les personnes avec des responsabilités familiales et des problèmes ne devraient pas tenter ça. Seuls les jeunes survivent.

EN SAVOIR PLUS

► Consultez notre dossier consacré à nos opérations de recherche et de sauvetage de migrants en Méditerranée

 

TWITTER

► Suivez le compte @MSF_Sea pour en savoir plus en temps réel.

À lire aussi