Au Yémen « les besoins humanitaires sont immenses »

Marie Elisabeth Ingres chef de mission au Yémen depuis septembre 2014
Marie-Elisabeth Ingres, chef de mission au Yémen depuis septembre 2014 © MSF

Marie-Elisabeth Ingres est chef de mission au Yémen depuis 2014. Elle nous guide ici dans la découverte d'un pays contrasté, complexe où nos programmes humanitaires sont mis en œuvre dans une situation de « quasi-urgence permanente ».

« Les défis sont immenses dans ce pays. La situation politique est souvent violente, instable et complexe, avec de nombreux partis politiques, groupes ethniques ou sociaux dont les alliances alternent. Une partie du territoire est très enclavée, à la fois géographiquement par le relief, par le manque d’infrastructures et bien entendu par l’insécurité. Enfin, la population vit dans une situation de grande pauvreté avec plus de 35% de chômage. Avec l’intensification des affrontements et une augmentation de la pauvreté, nous craignons une crise humanitaire majeure », explique Marie-Elisabeth Ingres.

Pour faire face à ces défis, l’association a développé plusieurs axes d’interventions en coordination avec le ministère de la Santé du Yémen. « Nous avons identifié trois groupes prioritaires, dans le nord du pays : les jeunes hommes victimes de violence ; les femmes enceintes qui n'ont pas accès à des services de santé pour accoucher ainsi que les nouveau-nés et les enfants qui manquent de soins appropriés. L’accès général à la santé diminue lorsque l’on progresse dans les zones rurales, en cessant complètement pour certaines communautés vivant dans des vallées reculées. Dans le sud règne un climat d'instabilité politique et de violence. A Aden et dans les gouvernorats du sud, les victimes de violence manquent d’accès aux soins chirurgicaux et post-opératoires », souligne la chef de mission.

Soigner les habitants dans le nord du pays...

Dans le gouvernorat d’Amran, dans le nord du pays, l'hôpital Al-Salam de Khamer offre des soins à la moitié des habitants d’une région peuplée de plus d'un million de personnes. « L'un des défis auxquels nous faisons face est le manque de services spécialisés vers lesquels référer nos patients. Nous devons donc fournir un très large éventail de soins, précise Marie-Élisabeth. C’est ce qui nous a amenés à développer la kinésithérapie, car de nombreux patients devaient se rendre à Sanaa, après leur opération, pour leur rééducation. »

Afin de surmonter l’obstacle de l’enclavement, le centre de santé de Huth, à 45 minutes de voiture de Khamer, reçoit un soutien technique ainsi qu'en médicaments pour la prise en charge des urgences, de la maternité et de la pédiatrie.

Mais beaucoup reste à faire, notamment pour les enfants souffrant de malnutrition que MSF reçoit de plus en plus, explique Thomas Lauvin, coordinateur médical : « Nous recevons tous les jours des enfants souffrant de malnutrition sévère ou aiguë, souvent accompagnée de complications graves qui nécessitent leur hospitalisation. Nous leur donnons les soins nécessaires ainsi que des compléments nutritionnels. »

… et dans le sud du Yémen

Dans le sud du pays, le service chirurgical d'Aden fournit des soins d'urgence aux victimes de violences. « MSF reçoit ces patients, dont la plupart ont besoin d'une intervention immédiate, précise le Dr Hani Isleem, responsable médical. Nous développons aussi notre capacité de prise en charge de patients nécessitant des actes simples de chirurgie reconstructive pour éviter d’avoir à les référer à l’hôpital régional d’Amman en Jordanie », ajoute Marie-Élisabeth Ingres.

Pour faire face à la recrudescence de violences, MSF a créé le YEP pour "Yémen Emergency Pool". Initié en septembre 2014 pour répondre aux urgences dans le pays,  le YEP réunit une équipe d’intervention mobile, prête à répondre à tous types d'urgences telles que les conflits, les catastrophes naturelles ou les épidémies.

« Le pays est très grand, enclavé et les besoins sont trop lourds pour que nous puissions y répondre seuls. Alors nous faisons de notre mieux pour plaider la cause des populations les plus éloignées, privées de soins, auprès du ministère de la Santé et d'autres acteurs internationaux », conclut Marie-Élisabeth Ingres.

EN SAVOIR PLUS

► Consulter notre dossier sur la crise au Yémen.

À lire aussi