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Une assistance médicale pour les réfugiés et les migrants sur la route de la Méditerranée centrale

Un rescapé assisté par un médecin de MSF à bord de l'Aquarius.
Un rescapé assisté par un médecin de MSF à bord de l'Aquarius. © Laurin Schmid / SOS MEDITERRANEE

Depuis mai 2015, Médecins Sans Frontières (MSF) a démarré des activités de recherche et sauvetage en mer pour venir en aide aux bateaux en détresse en Méditerranée et secourir les personnes à bord. MSF intervient également en Libye pour fournir une assistance médicale aux réfugiés et migrants détenus de façon arbitraire dans des centres de détention. La violence et l’insécurité généralisées dans le pays empêchent un grand nombre d’organisations internationales d’y travailler. Celles comme MSF, qui y déploient des secours, ne peuvent accéder pleinement et sans restriction à l’ensemble des centres de détention où croupissent les réfugiés et migrants.

Les conditions inhumaines des centres de détention pour migrants en Libye

L’impact des soins fournis est limité par l’environnement dans lequel se trouvent les patients : un système de détention arbitraire qui génère souffrance et violence. Un nombre écrasant de détenus ont déjà survécu à des niveaux de violence et d’exploitation inouïs durant leur parcours traumatisant en Libye et depuis leur pays d’origine.

À Tripoli, le nombre de personnes détenues a très fortement augmenté en octobre et novembre 2017, entraînant une détérioration dramatique des conditions déjà terribles dans les centres de la capitale, le surpeuplement y atteignant un niveau extrême. Dans certains centres, jusqu’à 2 000 hommes étaient entassés dans une cellule. Les détenus devaient s’asseoir, se tenir debout ou s’allonger les uns sur les autres car il n’y avait plus d’espace disponible au sol. Les équipes de MSF ne pouvaient physiquement pas entrer dans les cellules en raison du manque d’espace, ce qui les empêchait d’effectuer leurs consultations. Cette situation a également généré davantage de tensions et de violences. De septembre à décembre 2017, MSF a pris en charge plus de 75 personnes pour des blessures liées à des actes de violence telles que des fractures, des brûlures par électrocution, des blessures par balles.

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Dans ces conditions, l’impact des activités médicales menées par MSF fut minime. Les équipes de MSF n’ont pu aider qu’un faible pourcentage des personnes nécessitant des soins de toute urgence et ne pouvaient pas faire de suivi des patients. Entre septembre et décembre 2017, plus de 6 500 consultations ont été réalisées ainsi dans les centres de détention de Tripoli, où travaille MSF. La plupart des problèmes médicaux étaient liés aux conditions de détention : le surpeuplement et le manque de latrines et d’eau potable provoquent des infections des voies respiratoires sévères, des douleurs musculo-squelettiques et des diarrhées aqueuses aiguës. Les équipes MSF ont tenté de se concentrer sur les patients les plus vulnérables, tels que les femmes enceintes, les enfants de moins de cinq ans et les personnes présentant des symptômes mortels ou susceptibles de menacer le pronostic vital.

Le nombre de détenus a diminué en décembre, alors que des milliers de personnes étaient rapatriées en masse vers leur pays d’origine par l’Organisation Internationale des Migrations (OIM). La situation intolérable qui prévalait dans les centres de détention s’est améliorée, avec moins de cas de mauvais traitements et de violence à l’égard des patients. Les équipes MSF sont désormais en mesure d’accéder aux cellules dans les centres de détention où elles travaillent et d’y fournir une assistance médicale aux réfugiés et migrants qui y demeurent détenus arbitrairement. La majorité des problèmes cliniques et psychologiques qui requièrent une prise en charge médicale continue d’être causés par les conditions déplorables de la détention.

Les interceptions des garde-côtes libyens : le retour forcé vers l’enfer

Beaucoup de ceux qui parviennent à fuir la Libye y sont ramenés à partir des eaux internationales, par les garde-côtes libyens soutenus par l’Union européenne. Mener des opérations de recherche et de secours en mer Méditerranée est donc devenu de plus en plus difficile et complexe.

À bord de l’Aquarius, le bateau affrété par S.O.S. Méditerranée, en coopération avec MSF, sillonnant la mer Méditerranée pour porter secours à ceux qui tentent la traversée, les équipes MSF ont de nombreuses fois été témoins de scènes où les garde-côtes libyens interceptent des embarcations remplies de réfugiés, de demandeurs d’asile et de migrants dans les eaux internationales et les ramènent en Libye sous les yeux des forces militaires européennes. Le 31 octobre, le 24 novembre, le 8 décembre 2017, l’Aquarius a reçu l’ordre de ne pas intervenir et les équipes ont assisté impuissantes au retour en Libye de centaines de personnes interceptées et emmenées par les garde-côtes libyens.

Bien que ces interceptions soient présentées comme des « opérations de sauvetage » et saluées par les garde-côtes libyens et leurs partenaires européens, la réalité est que ces migrants et réfugiés sont loin d’être ramenés dans un endroit sûr. Les crimes commis contre les migrants et réfugiés en Libye sont largement connus et ont provoqué une onde d’indignation mondiale. En aucun cas, les migrants et réfugiés à bord d’embarcations en détresse dans les eaux internationales ne devraient y être retournés : ils doivent être débarqués dans un endroit sûr.

Fait sans précédent, le Centre de coordination et de sauvetage (MRCC) à Rome a donné ordre à l’Aquarius à trois reprises en septembre de mener ses opérations de sauvetage sous la coordination des garde-côtes libyens, alors que les bateaux en détresse se trouvaient dans les eaux internationales. Dans chacun des cas, l’ensemble des personnes secourues par l’Aquarius ont finalement pu être emmenés dans un port sûr en Italie.

Il était impossible de savoir avec certitude qui coordonnait ces opérations de sauvetage, sachant qu’il existe plusieurs entités qui se déclarent garde-côtes libyens et mènent des opérations le long de la vaste côte libyenne. Les interlocuteurs sur terre et en mer ne sont pas clairs, tout comme la chaîne de commandement. Durant ces interactions, la sécurité de nos équipes a été une préoccupation majeure, tenant compte des nombreux incidents violents qui ont récemment éclaté entre les garde-côtes libyens et les quelques organisations humanitaires qui continuent de mener des opérations de recherche et de secours en mer Méditerranée.

Des rescapés sur un canot pneumatique en détresse dans la mer Méditerranée.

Des rescapés sur un canot pneumatique en détresse. Janvier 2018. © Laurin Schmid/SOS Méditerranée.

Depuis l’année dernière, en Méditerranée centrale, le nombre de migrants et réfugiés secourus en mer et débarqués en lieu sûr en Italie a chuté : l’Aquarius a sauvé 3 645 personnes entre septembre et décembre 2017, contre 5 608 en 2016, au cours de la même période. Moins d’embarcations semblent quitter la Libye. Les raisons précises de ce changement restent à établir, mais certains facteurs, tels que les conditions climatiques hivernales et l’évolution de la situation politique en Libye jouent un rôle important. Plusieurs observateurs ont rapporté que certaines milices locales étaient payées par l’Italie pour empêcher les départs. Des navires italiens ont été déployés dans les eaux territoriales libyennes dans le cadre d’une stratégie européenne globale visant à verrouiller les côtes libyennes et à maintenir les réfugiés, migrants et demandeurs d’asile dans un pays où ils sont exposés à un niveau de violence et d’exploitation particulièrement alarmant.

L’assistance médicale pour les migrants et les réfugiés à bord et à terre

Au cours des derniers mois de 2017, MSF a poursuivi son assistance médicale à destination des réfugiés et migrants sur la route de la Méditerranée centrale, à l’aide de l’Aquarius, le navire de recherche et de sauvetage de l’organisation affrété en collaboration avec S.O.S. Méditerranée.

À bord du bateau, une partie des blessures prises en charge par les équipes médicales de MSF ont été infligées aux rescapés lors de leur passage en Libye. Ils nous parlent des sévices et des abus subis dans les mains des trafiquants, des groupes armés et des milices en Libye. Environ 12% des femmes secourues étaient enceintes et ont été suivies par une sage-femme de MSF. Les brûlures graves et des infections sévères de la peau sont particulièrement prévalentes. Avec l’approche de l’hiver, les cas d’hypothermie se multiplient parmi les personnes secourues. La houle est telle que d’énormes vagues viennent régulièrement se fracasser sur le pont arrière, trempant les personnes qui y dorment. En novembre, un nombre indéterminé de personnes ont péri noyées après que leur embarcation, un canot pneumatique surchargé, ait soudainement chaviré au cours du sauvetage. L’équipe à bord de l’Aquarius a déployé tous les moyens disponibles pour sauver le maximum de personnes se débattant dans les flots, mais malheureusement beaucoup n’ont pu être sauvés. Les corps n’ont pas été retrouvés.


Découvrez le témoignage d'Alice, qui était sage-femme à bord de l’Aquarius :

Une fois à terre, MSF apporte une première aide psychologique d’urgence aux rescapés des naufrages et des sauvetages particulièrement traumatisants, en parallèle de ses projets médicaux et de santé mentale en Sicile.

Alors que la Libye reste déchirée par des violences et une insécurité généralisées, avec plusieurs régions du pays aux mains de groupes armés rivaux et sans un gouvernement unifié, la souffrance de celles et ceux qui s’y trouvent au cours de leur parcours le long de cette route de la Méditerranée centrale a peu de chances de toucher à sa fin.

Depuis 2011, MSF travaille en Libye en apportant des soins et des références médicales aux réfugiés et aux migrants détenus dans plusieurs centres de détention.

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