Réfugiés maliens en Mauritanie : poursuivre les efforts engagés

Réfugiés maliens à Mbera Mauritanie mars 2013
Réfugiés maliens à Mbera, Mauritanie, mars 2013 © Nyani Quarmyne

Présentes aux côtés des 75 000 réfugiés maliens du camp de Mbéra depuis février 2012, les équipes de MSF renforcent aujourd’hui leurs activités médicales. Même si la phase d’urgence s’achève, tout n’est pas sous contrôle. Les conditions de vie encore précaires des réfugiés demandent une surveillance étroite de la situation sanitaire et la poursuite des efforts engagés. Le point avec le Dr Louis Kakudji Mutokhe, médecin de MSF en Mauritanie.

La situation nutritionnelle s’est-elle améliorée depuis le dernier afflux de réfugiés en janvier ?

En janvier, la situation s’est rapidement dégradée avec un nouvel afflux de réfugiés fuyant la reprise des combats au Mali. Depuis lors, et malgré la mobilisation des différentes organisations dans le camp, la situation nutritionnelle est restée préoccupante : au-dessus des seuils d’urgence. Chaque mois, les centres nutritionnels de MSF enregistrent en moyenne 330 enfants sévèrement malnutris. Chaque jour, cela fait 12 enfants à risque de décès à prendre en charge ! Heureusement, 85% d’entre eux sortent guéris de notre programme.

Quelles mesures ont été prises par MSF pour améliorer la situation médicale ?

Nous avons construit un troisième poste de santé dans la zone d’extension du camp pour améliorer l’accès aux soins et la couverture sanitaire. Ainsi, nous recevons plus de 1800 patients par semaine. L’augmentation des possibilités de prise en charge, le renforcement de capacité du personnel médical et la mobilisation plus importante de promoteurs de la santé nous ont permis d’améliorer notre efficacité : les enfants arrivent plus tôt à l’hôpital et abandonnent moins les soins en cours de traitement.

En collaboration avec le ministère de la santé et l’Unicef, nous avons également mis en place des équipes de vaccination dans les structures de santé pour renforcer les activités de vaccination de routine (PEV) : diphtérie, poliomyélite, tétanos, rougeole, coqueluche... Ce sont là des maladies faciles à prévenir et la vaccination reste un des moyens les plus adaptés pour protéger les enfants. En terme de lutte contre le paludisme, nous nous attendons à une augmentation des patients avec l’arrivée de la saison des pluies ; environ 45 000 moustiquaires imprégnées vont être distribuées dans le camp, en priorité aux enfants de moins de 5 ans et aux femmes enceintes.

Peut-on dire que la situation est sous contrôle ?

Beaucoup d’efforts ont été réalisés ces derniers mois. Il faut les intensifier pour pouvoir maintenir un niveau acceptable de l’aide déployée. Mais la situation reste bien entendu préoccupante.

Il est peu probable que les réfugiés retournent tout de suite au Mali. Même si quelques familles sont rentrées, les tensions existantes au nord du pays ne créent pas encore les conditions favorables pour un retour volontaire des réfugiés. Les dernières familles arrivées il y a quelques semaines dans cette zone sont effrayées, elles refusent de rejoindre le camp et préfèrent rester à Fassala, une ville à la frontière avec le Mali. De même, un grand nombre de réfugiés arrivés au cours de l’année 2012 craignent encore de rentrer au Mali de peur de subir des représailles.

Quant aux conditions de vie dans le camp, elles restent très précaires : l’insécurité alimentaire demeure même si les distributions de nourriture se sont considérablement améliorées. Une fois par mois, les enfants âgés de 6 à 24 mois reçoivent désormais des rations alimentaires contenant du CSB ++ (mélange fortifié composé de lait, d'huile et de sucre), des produits essentiels à leur croissance et qui aide à prévenir la malnutrition. Mais compte tenu du manque de ressources des familles, ces rations sont parfois partagées avec les enfants plus âgés. MSF ajoute donc des biscuits nutritionnels aux ménages dont un des enfants souffre de malnutrition. Il est donc difficile d’être totalement optimiste car certaines causes structurelles de la malnutrition demeurent.

Quelles autres difficultés rencontrez-vous sur le terrain ?

Avec la saison des pluies, les routes sont boueuses et il devient parfois difficile de rejoindre le camp de Mbéra. Nous tentons d’anticiper au mieux : renforcement des structures médicales pour résister à l’eau et aux tempêtes de sable, préparation au pic de paludisme, lutte contre les diarrhées et les infections respiratoires qui restent les premières causes de mortalité, mobilisation pour améliorer l’accès à l’eau et les conditions d’hygiène, incitation pour un recours précoce aux services de santé...

Autre difficulté : les carences de personnels médicaux. MSF a actuellement du mal à recruter des ressources médicales prêtes à travailler dans le camp de Mbéra, en plein désert. C’est pourtant une condition essentielle de l’amélioration de la situation médicale et nutritionnelle des réfugiés.

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